Ivan Illich, l'école et moi

 

 

1

Pourquoi écrire sur Ivan Illich que je ne connais pas plus qu'un autre individu dans le registre de mes pauvres et rachitiques connaissances en ce domaine des hommes comme en tous autres domaines.  Ceux qui ont déjà lu ma littérature ailleurs le savent parfaitement, pas la peine donc d'insister là-dessus. Comme toujours chez moi, je ne sais à quelle occasion ce nom m'est venu à l'esprit, je voulais probablement savoir qui était cet homme : était-ce celui dont j'avais travaillé le livre : "La mort d'Ivan Illich" de Léon Tolstoï ou s'agissait-il d'un autre dont je ne savais rien. ? Alors j'ai pianoté son nom sur Wikipédia pour avoir le cœur net et quelques mots à me mettre dans la tête. Alors très vite je me rendis compte qu'il était une sorte de révolutionnaire remettant en cause toutes les institutions, à commencer par l'éducation qui est mon cheval de bataille aussi depuis plus de vingt années. Contre l'école donc, mais aussi l'hôpital, la vitesse des moyens de transport, de l'écologie politique (je ne sais ce que cela veut dire pour l'instant) et pleins d'autres choses dont nous aurons tout le loisir d'en explorer ici les moindres détails. Puis-je m'identifier à lui aujourd'hui plus d'un demi-siècle après ?

 

2

Seulement comme la perfection n'est pas de ce monde ce monsieur beau parleur et bon prédicateur revient de loin, revient de l'église où il fut au sommet de je ne sais quelle confrérie malgré une maman née d'une famille juive allemande, mais convertie nous dit le dictionnaire imparable actuel. Petit détail tout de même au sujet de cette mère, elle dû quitter l'Autriche car l'antisémitisme montait en grade dans le pays où leur magnifique maison fut récupérée par les nazis. En 1942, Ivan Illich poursuit son éducation à Florence puis après la guerre fait des études de théologie à Rome, ville de toutes les catastrophes comme chacun sait puisqu'il y a là tant d'or qu'on ne saurait qu'en faire ailleurs, je fais allusion au Vatican et aux papes successifs qui se sont succédés en ce lieu de pouvoir extrême, rien a voir avec nos pauvres petites institutions à nous la gauche la droite et tout le cinéma qui est fait là-dessus depuis des siècles de quoi en avoir la nausée que même le pauvre Sartre n'a pu nous en délivrer avec sa pseudo philosophie nourrie de par l'amour de Simone et de toutes ces femmes qu'il aimait malgré sa laideur, le pauvre, pardonnez cet écart incompréhensible dans ce début d'exposé concernant Ivan Illich.

 

3

Au Vatican, on le voit évoluer dans la diplomatie ; mais lui dit "non" déjà, il préfère se diriger vers la prêtrise. À lire ces informations je ne peux vous cacher le parallèle que je fais avec Monseigneur Jean-Marie Lustiger qui lui aussi avait non seulement une mère, mais une famille tout entière juive pour parents et souffrit même d'antisémitisme à l'école Montaigne où il avait fait ses études. À quoi correspond la conversion de ces deux hommes à cette époque-là ? Cette conversion, cette tendance à remettre en cause, va-t-elle se reproduire tout au long de la vie d'Illich, à chaque fois que nous la rencontrerons nous vous la ferons remarquer, comptez sur nous, nous étant moi évidemment. On apprend que sa famille avait des liens anciens avec l'Église catholique romaine, il était donc bien placé pour être pistonné comme il se doit pour approcher ce pouvoir fermé à tous ceux extérieurs à cette grande famille-là.  Quelques années plus tard, en 1951, il part pour les Etats-Unis faire ses églises et en 1956 il part pour Porto Rico afin de voir et comprendre pourquoi ces pauvres gens sont de si magnifiques croyants catholiques. Il profite de son aura pour créer un centre de formation  à l'intention des prêtres vivant là comme s'ils n'étaient pas assez grands pour se former eux-mêmes…

 

4

Aussi innocent qu'un bébé venant de naître, il découvre une similitude entre l'église et l'école. J'adore, ce parallèle me fait jubiler, il me dit que avoir affaire à un gars bien sympa, qu'il va falloir étudier bien sérieusement, à ma façon primitive évidemment et non pas conventionnelle comme il se doit, ce qui me vaudra d'ailleurs encore une fois d'être mis au banc des textes refusés par les maisons d'édition préférant toujours avoir à faire à des universitaires et non à ces gens qui utilisent la littérature pour se faire plaisir et dire des trucs qu'on entend dans le métro entre l'Étoile et Châtelet, aux comptoirs de nos bistrots, ou sur notre canapé Habitat lorsque nous partageons encore des moments heureux entre personnes réunies en famille pour ne pas végéter seules, juste avant l'implacable divorce reflet de nos sociétés civilisées ne supportant pas trop longtemps la vie avec telle ou telle personne, à la longue sont lassantes ces trop nombreuses répétitions affectées à chacun de nous sans même que nous en soyons conscient, c'est affreux madame Germaine… Bref, il est suffoqué de voir le contraste qu'il y a entre les buts avoués de l'éducation et ses résultats.

 

5

Pardon de reprendre parfois mot pour mot ceux de Wikipédia, mais lorsqu'ils sont satisfaisants je ne vois pas pourquoi je m'en priverais, n'en déplaise à certains qui voudraient que l'on écrive toujours que des choses neuves, jamais écrites ailleurs.

Illich s'aperçoit que ces institutions, l'église et l'école, contrairement à ce qu'ils revendiquent, ne font que renforcer les castes, je veux dire les classes sociales : le pauvre sera maintenu dans sa pauvreté et le riche dans sa richesse d'origine. À partir de là, dégouté, il écrit un livre, ça défoule, ce doit être pour cela que nous écrivons, faudra étudier un jour cette question qui n'est pas fondamentale, mais peut intéresser mon cousin Germain, il se pose actuellement des questions sur la nature humaine vivant sur terre. En 1971, à la suite de cette expérience, Ivan écrit : Une société sans école. Porto Rico c'est en 1956, mais en 1960 il décide de quitter cette ville car il a un conflit avec ses pères supérieurs (conflit avec le père symbolique… Freud vient à notre secours !) pour une question de préservatifs à autoriser ou non à la population pour la protéger de je ne sais quoi puisque le sida n'était pas encore en vigueur... Peut-être contre les enfants ?

 

6

Il va jusqu'à préférer les préservatifs à la bombe atomique… Déjà là tu vois le gars pas net dans sa tête à émettre des comparaisons à faire frémir le pape et ses pauvres seins à la Salvador Dali. Pendant dix ans il fonde un centre de formation au Mexique. Faisons une remarque, il passe d'un pays à un autre comme il passe d'une religion à une autre, est-ce une forme d'instabilité ? Mais n'allons pas trop vite en besogne, n'analysons pas à la va-que-je-te-pousse, prenons notre temps. Cela se passe entre 1966 et 1976, date à laquelle l'établissement est fermé pour on ne sait quelles raisons, ensuite il ira enseigner en Allemagne jusqu'en 2002 où il meurt tristement d'une tumeur cancéreuse qu'il n'a pas voulu opérer, la gardant en lui pendant vingt années, et voulant rester fidèle à son concept concernant les hôpitaux que nous étudierons dans quelques jours. La biographie d'Illich arrive à son terme dans Wikipédia et déjà me voilà avec une entrée en matière donnant une idée de ce qu'à été ce bonhomme que j'ai décidé de prendre en otage pour aiguiser mes griffes d'intellectuels sans diplômes, ni quelconque pouvoir, mais ayant des convictions à confronter, au risque de me répéter infiniment.

 

7

Me voilà donc devant ce pavé de 792 pages formant le premier tome de son œuvre, le deuxième je ne l'achèterai que si celui-ci est lu et travaillé, auquel il faut ajouter un autre livre « La perte des sens » pour posséder chez soi la totalité de ce qu'il a pondu en ce bas monde. Regardons à la fin du bouquin de quoi il sera question tout au long de ce travail, oeuvre que j'espère analyser en laissant parler mon cœur ou plutôt les associations qui me viendront le plus librement, non pour vous faire un cours sur Ivan Illich, mais plutôt pour me mettre à l'épreuve face aux mots, aux idées d'un homme ayant remis en question beaucoup de nos institutions ce qui est mon tempérament depuis que je suis pensant et non seulement actif dans une société où la règle est marche ou crève. Je suis conscient des difficultés que je vais rencontrer au cours de mes lectures, il est possible que ce soit écrit d'une manière universitaire, c'est à dire incompréhensible, mais faisons un effort ne serait-ce que pour faire plaisir à un ami qui veut que seul l'effort compte, ce qui n'est pas du tout ma philosophie, mais enfin ne gâchons pas le peu de relations humaines qu'il me reste, mon agenda étant si léger aujourd'hui …

 

8

Table des matières : 1) Libérer l'avenir – appel à une révolution des institutions

                                        2) Une société sans école

                                        3) Énergie et équité (c'est quoi l'équité ?)

                                        4) La convivialité              

                                        5) Némésis médicale – l'expropriation de la santé.

Voilà le programme, ne partez pas, ne fuyez pas, profitons d'être ensemble pour passer un bon moment, comptez sur moi. Avant d'aborder les questions du livre, une préface nous est proposée, je me demande s'il faut la lire ou pas. Il y a, comme dans tout, Des partisans pour chacune des deux options, mais sachez que ma lecture est lente et parfois je rêve d'avaler des centaines de pages en un temps record. Je sais, cela est un phantasme en moi inscrit depuis toujours, les méthodes d'écriture rapide, etc. seulement rien en la matière n'est possible, j'ai expliqué ailleurs que ma mémoire était défectueuse et donc je ne fonctionne pas comme tous ceux qui écrivent intelligemment, je fonctionne autrement et ne m'en plains pas.

 

9

En parcourant les premières lignes de cette préface j'ai l'impression de déflorer en trois secondes ce que contient l'ensemble de l'œuvre, je préfère découvrir l'essence à partir de l'original alors laissons tomber pour l'instant du moins cette préface. Une introduction d'Erich Fromm nous est proposée et là je vais la lire car Fromm a joué un rôle important dans ma formation de PNDPLG – Psy Non Diplômé Par Le Gouvernement - mais là-dessus, déception, rien à dire sinon qu'il caresse dans le sens du poil son ami, ce qui est normal lorsqu'on a un ami. Commençons par le commencement : Libérer l'avenir  - chapitre 1 : Il faut abattre les systèmes sociaux et économiques qui érigent une barrière entre ceux qui ont trop de privilèges et ceux qui n'en ont pas assez. Il signale que nous souffrons tous, nous les privilégiés surement, d'un sentiment de culpabilité et qu'il nous entraine curieusement à contribuer à la souffrance du monde.  Comment est-il possible de voir ce sentiment nourrir notre disposition naturelle à faire le mal ? Comment expliquer cette mécanique humaine le plus simplement à des quidams comme vous qui n'ont pas encore vécu l'expérience à minima nécessaire à la connaissance ?

 

10

Si vous vous sentez coupable de quelque chose, et s'il vous est possible d'appuyer sur un bouton pour faire disparaitre ce sentiment, vous le feriez surement, pour ensuite vous sentir libre comme l'air et vaquer à vos affaires. Seulement ce sentiment de culpabilité agit comme une rage de dents, lancinante d'abord, puis après, se transformant en forte douleur chronique. Si vous n'allez pas chez le dentiste, alors votre mal peut vous entrainer à quelques colères pouvant se mal finir. Ce sentiment de culpabilité a pour moi une raison d'être : recevoir en réponse ce module : "non, tu n'es coupable en rien". Une fois cela acquit, me sentant maintenant libre, je vais pouvoir continuer à faire le mal, objet de ce fameux sentiment, mais maintenant mis à l'œuvre plus radicalement. Conclusion : méfions-nous de ce sentiment-là, il cache toujours quelque chose de pervers. Le Docteur Illich, du haut de sa chaire, nous voit infirmes en tout point, ce que je peux volontiers approuver par certains côtés… Il nous propose un monde nouveau. J'avoue, si cet homme était normal, c'est à dire athée, je tendrais l'oreille avec passion, seulement comme c'est un homme d'Église, je me dis attention où je mets les pieds…

 

11

Bienveillamment, il nous demande de ne plus faire le mal ; faites le bien à la place dit-il, c'est cool ! Comme lui, je reconnais qu'après avoir assouvi ses besoins vitaux l'homme aspire aux choses culturelles ou autre pour se réaliser dans cette société où il a mis les pieds en naissant involontairement. Mais rien n'est simple en ce bas monde, pour nous réaliser nous aurons des obstacles à franchir, des obstacles de plus en plus complexes, et là, Illich, dit tout le mal qu'il pense du progrès, que je veux bien entendre pour ne pas me le mettre à dos, seulement le monde moderne n'est pas que tout noir, il peut émerger de cette société folle quelques bribes de lumière aux couleurs de l'arc-en-ciel fort intéressant pour l'âme et l'intelligence de chacun selon ses possibilités, aussi réduites soient-elles. Donc, tout n'est pas que destruction, monsieur Illich ! Nous devons assumer la responsabilité de l'avenir, avance-t-il, certes, nous sommes responsables de l'avenir de nos enfants et petits enfants, du monde et de tout le reste, et c'est peut-être la première pierre à jeter à la face de ceux qui ont tendance à baisser les bras et à dire qu'il n’y a rien à faire… Me voilà, tout à coup, porte drapeau de la révolution. Hum, hum !

 

12

Mettre un terme au pouvoir qui contraint, à l'autoritarisme de certains, et à la fin des privilèges provenant du bon plaisir de quelques-uns. Selon Ivan, travailler à l'invention de l'avenir implique de diriger ses pas vers la maturité et abandonner ses gros chagrins personnels ou collectifs, ce que Julia Kristeva nomme : faire le deuil du malheur, concept que je trouve séduisant qu'à certaines heures de ma journée pleine d'embuches. Célébration des véritables besoins de l'homme, et surtout repousser les systèmes existants nous les obstruant. Les Américains du nord, dit-il, semblable à des extra-terrestres, sont poussés à faire le bien. Seulement pour faire le bien, il faut avoir, car sinon comment imaginer quiconque donner ce qu'il n'a pas ? La générosité, le don, ne s'adresse donc qu'à ceux qui ont, du moins ont plus que d'autres, ce qui caractérise cette image d'Épinal toujours en vigueur dans certaines religions, sinon toutes, de voir à l'entrée des lieux de culte, pas uniquement puisque devant les distributeurs de billets des banques vous avez des SDF, des pauvres tendant la main à ceux qui entrent là pour se purger, se faire pardonner tout le mal qu'ils font à leurs semblables.

 

13

Cette main propre sortant de sa poche quelques pièces jaunes peu efficaces dans leurs commerces avec d'autres comme eux, n'ayant pas de valeur consubstantielle à leur stature, et surtout ne les appauvrissant nullement en rapport à la masse d'argent qu'ils possèdent à celle de celui qu'ils ont en face d'eux. Maintenant si tu refuses ma monnaie comment vais-je le prendre ? Je dis je, mais là, il s'agit des Américains. En fait, si tu refuses cette main tendue si généreusement, tu prends le risque de me voir très en colère et à l'extrême, de recevoir des bombes sur la gueule. Paradoxalement, je ne crois pas cette façon de voir juste, mais elle m'est venue à l'esprit de l'influence néfaste de ce qui est dit en exergue au chapitre 2 : "La violence : un tendu aux Américains" et où "Il" se pose la question de ce que représente l'évangile américain face à la grande réussite matérielle ? Mais de quelle réussite parle-t-on ? De celle qui rassure la bête humaine, cette masse de chair et de sang toujours en quête d'une force mille fois supérieure à la sienne pour s'y saouler et laisser de côté le réel de sa vie d'une tristesse à mourir, c'est pourquoi le cinéma américain inonde le monde avec les seins de Maryline et la bite à Brando, beurre à l'appui de ma démonstration admirablement douteuse.

 

14

Très jolie expérience des étudiants de Cuernavaca, ville située au Mexique, où il est question de faire la comparaison entre l'expérience de la pauvreté vécue par les sociétés riches et de celles dépourvues de capital. Là, je transcris ces quelques lignes qui me plaisent beaucoup, vraiment beaucoup :

Combien de fois n'avons-nous pas vu un homme désorienté quand la foi qui le soutenait lui échappait soudain : cette foi qui pourrait s'énoncer ainsi :

"La solution américaine est valable pour tous." Tout homme de bonne volonté, qu'il soit travailleur social ici ou missionnaire là-bas, ne saurait manquer de ressentir une douleur paralysante quand il comprend que la grande majorité des êtres humains le considère comme l'étranger exploiteur qui, pour défendre ses privilèges, propage une croyance trompeuse dans les idéaux de la démocratie, de l'égalité de chances et de la libre entreprise, parmi des hommes qui n'ont pas la moindre chance d'en profiter.

 

15

Quels que soient les combats que nous menons, toujours la violence doit être exclue, elle ne provoque que désolation, haine de l'autre et de soi en écho pour le simple fait d'être capable du pire, sinon de l'inacceptable. Plus nos objectifs seront bienveillants envers les autres, plus nous devons nous méfier de nous-mêmes et des bonnes raisons qui nous poussent à agir ainsi. Toujours nous méfier de notre désir de puissance qui nous habite tous. Les Américains ont voulu donner au monde son mode d'emploi pour vivre heureux, et sans nous en rendre compte, nous mordons tous à ce magnifique hameçon, gâteau dégoulinant de crème à vous en rendre malade les tripes noyées de mille richesses aux multiples poisons. Pouvons-nous affirmer que toute intrusion d'un pays dans un autre est obligatoirement guerrière, même pour apporter généreusement ces millions de sacs de riz devant les caméras de la terre entière ? Toute bienveillance serait-elle donc douteuse, alors que faire ? Laisser faire, laisser crever ? Voilà une question auquel je ne voudrais surtout pas être confronté ; à l'idée d'avoir à choisir, je tremble, je tremble et fais dans ma culotte. Mais que nous dit Illich ?

 

16

Lorsqu'on donne de l'argent, il ne profite qu'à un petit nombre, le reste de la population végète dans sa misère au point qu'il n'a pas d'autres choix que de se révolter, devenir violent, c'est là qu'en parallèle au don d'argent, il est donné aux états des armes et des éducateurs pour enseigner comment accepter, comment se la fermer face à ceux qui ont la connaissance, le fameux socle basic, sans quoi tu es de la merde, pardonnez-moi d'être aussi scatologique, mais enfin il y a des limites à ne pas franchir avec ces conneries de socle… De la connaissance et donc du pouvoir, l'enseignant devient alors le parfait bourreau castrateur des masses incultes. Et tout cela au nom du bien, personne ne pourra jamais en douter ; les églises, les écoles, ne sont-elles pas des lieux saints lavés de tous soupçons ? Que le malheur tombe sur celui qui doute sur ce point diablement si fragile. Alors que peut faire le miséreux lorsqu'il voit celui qui enseigne être plus riche que lui d'une façon outrancière ? Que peut-il, sinon l'abattre. La vérité est que cet homme nous enseigne à baisser l'échine devant nos maîtres, il est là pour relèver nos ignorances infectes à faire vomir.

 

17

Tout ce qui est dit ici est un mixe des lignes d'Illich et de mes mots à moi. Seulement attention, cet homme à la plume acerbe et digne, portant la croix d'un Jésus presque nu, n'a-t-il pas été en tant que prédicateur en première ligne pour divulguer, porte à porte, la bonne parole, n'y a-t-il pas par ses discours, un comportement que je connais si bien et haï plus que tout : se fouetter soi-même avant de l'être par autrui ? Cela s'appelle de la perversion… Voyez chers et bons lecteurs comme le parano que je suis fonctionne si bien lorsque l'occasion lui est donnée d'épancher sa lave bleue … Maintenant, avertis, vous pouvez continuer votre lecture, mais conscient, moins aveugle, sachant à quoi vous attendre de la part de votre très humble et respectable serviteur. Il écrit : "Le mot "violence" recouvre toute une gamme d'expériences qui va d'une vitalité frustrée à la destruction hystérique des idoles aliénantes." Il rajoute que l'Amérique latine refuse les valeurs américaines. Permettez-moi cette association : quel autre message nous donnent les islamistes de tout bord avec leur terrorisme sinon qu'ils refusent les tours américaines et les valeurs occidentales ?

 

18

La violence de l'autre doit être entendue et apaisée, elle doit nous aider à nous remettre en question. Face à tant de richesses inaccessibles, quelle porte de sortie a le pauvre? Essayons d'y voir plus clair. Si la société veut l'aliéner, c'est-à-dire profiter de sa faiblesse pour en tirer une richesse par l'exploitation de son travail, par les crédits bancaires auquel il aura recours pour obtenir ce qu'il considère comme indispensable à son bonheur, et bien d'autres choses encore, en deux mots être dans le système capitaliste, vous pourrez toujours voter à droite ou à gauche, rien ne changera : tant qu'il y aura des "bénéfices secondaires", l'homme ne se révoltera pas, car ne dit-on pas "On sait ce que l'on perd, on ne sait pas ce que l'on gagne." D'ailleurs, est-il souhaitable qu'il fasse appel à la "violence" pour se faire entendre, lorsque l'on voit comment elle est récupérée à chaque fois par ceux qui du sommet de leur pouvoir ou du bas de l'échelle sociale de ma concierge, arrivent à étouffer vite fait bien fait avec l'aide substantielle de nos médiats, vulgaires putes payées pour ce travail précis. Si la violence n'est pas la solution du pauvre, quel autre moyen y a-t-il alors ?

 

19

À cette question, mes frères, j'espère que nous trouverons d'ici quelques centaines de pages une réponse nous faisant bander fort sans viagra. Comment ne pas penser au "Printemps arabe" lorsqu'on lit : "La violence spontanée éclate toujours contre la volonté de soumettre l'homme à des idoles. La violence organisée s'installe ensuite par la nécessité de réduire un homme ou un peuple au service de l'idole qu'ils menacent de rejeter." Alors que de ce ramdam généralisé "la sacro-sainte démocratie" était attendue par tous "les démocrates" du monde, quelle ne fut grande la surprise de tous de voir les islamistes l'emporter aux élections de chacun de ces pays. Comment expliquer ce phénomène relevant d'un archaïsme fâcheux inscrit dans les cellules mêmes de nos entrailles : obtenir le contraire au finish de ce pour quoi on s'est battu ? J'ai une interprétation toute personnelle à ce particularisme humain, mais pour l'heure, taisons ce feu qui nous anime, et essayons plutôt d'avancer dans notre lecture. Heureusement, un sage vient à notre secours et gueule à nos oreilles : "Ne mettez jamais des armes dans les mains du peuple, car elles seront toujours utilisées contre lui..." Béni soit-il !

 

20

Et que s'est-il donc passé d'autre en 1968, sans armes, grand Dieu merci, sinon que les syndicats, valeureux représentants des ouvriers, ont été récupérés par le pouvoir pour venir à bout de cette chienlit… Chapitre 3 – "De nationalité américaine et pourtant étrangers…" Qu'on le veuille ou non, lorsque des individus passent de leur pays d'origine à un autre, ils entrent dans la danse des "étrangers à perpétuité". Toute intégration, aussi bonne et réussie soit-elle, reste malheureusement, dans ses profondeurs, à la surface de l'être déplacé. Dans son intimité subsistera toujours : "qu'il n'est pas comme tout le monde", comme ceux qui le reçoivent. Et me voilà un peu gêné d'avoir à traiter du sujet de la religion car je suis, oh grâce à Dieu, hâté jusqu'aux dents, mais puisque c'est le corps même de ce chapitre, allons-y la tête basse et les yeux ailleurs. Après la guerre les Portoricains vont vivre dans des taudis à New-York mais sont rapidement installés dans la banlieue, comme chez nous, y a pas de raison, et Illich nous informe que même s'ils ne sont pas religieux officiellement, dans leurs comportements, tous y font référence.

 

21

Il ne faut pas avoir peur d'avancer que tout homme a besoin de repères pour vivre, de béquilles pour ne pas tomber, personne n'échappe à cette vérité, si pour l'un ce sera Dieu, pour un autre ce sera n'importe quel substitut équivalent, personne n'est exempt d'aimer un objet qu'il vénère ou tout du moins qu'il respecte. Ceci étant dit, la question est de savoir, lorsqu'on est étranger, quel chemin prendre : celui de l'assimilation qui implique de jouer un rôle, en dehors de chez soi, conforme à ce qui est attendu de vous, ou bien, celui de son contraire qui est d'assumer ce que l'on est pleinement, au risque de provoquer le rejet de certains du fait de comportements différents, étranges, étrangers  aux us et coutumes du "pays d'adoption". Chapitre 4 – " L'éloquence du silence". Nous voilà pris dans la  tourmente d'infinies explications sur les bienfaits de l'écoute du silence, et pour bien faire rentrer ce qui est dit dans nos petites têtes d'ignobles défroqués, on nous sort la carte de la Vierge qui après avoir conçu le verbe, elle conçut le silence… Bref, je n’aime pas trop qu'on me mène en bateau dans ces endroits que je ne veux pas fréquenter. Alors pourquoi avoir choisi un homme d'Église pour écrire ?

 

22

J'espère trouver dans quelque temps quelques réponses acceptables à vous soumettre, mais pour l'heure, je dois digérer ce paragraphe plein de bons sentiments. Ces bondieuseries me fatiguent, mais je dois m'accrocher, certains thèmes m'intéressent trop pour abandonner ce travail à peine commencé. Chapitre 5 – La charité trahie. En 1960, le pape Jean XXIII veut envoyer ses sbires catholiciser l'Amérique latine qui en a bien besoin puisque les protestants ont mis le grappin dessus depuis longtemps et dont Illich est l'un des fervents missionnaires. Lui, nous explique que les catholiques sont certes très généreux, trop à ses yeux, au point de noyer le pays bénéficiaire de ces fonds, il voit toute la perversion qui va avec,  en soumettant ces peuples aux règles d'usage du capitalisme nord-américain. Cette générosité devient à nouveau "une plante coloniale entretenue par l'étranger". L'Amérique latine va-t-elle devenir le clone de sa voisine du nord grâce, ou plutôt à cause de cette manne ?  Ce qui est visé par cet apport massif de fonds, c'est d’abord l'étouffement de toute révolte de la part des pauvres dont ces pays regorgent, et ensuite l'apaisement de la culpabilité des Occidentaux à leurs égards.

 

23

Au bout d'un moment le peuple se sent grugé, se rend compte que l'Église est devenue une affaire venue de l'extérieur pour le soumettre… Lorsqu'un homme ou une société fait du bien, méfions-nous-en,  il se cache peut-être surement probablement quelques loups aux dents longues derrière. "Nous sommes coupables d'avoir gaspillé la vie d'hommes et de femmes qui se consacrent à la tâche de l'évangélisation de l'Amérique latine". Des gens de bonnes volontés arrivent dans des pays pauvres pour apporter secours. De fait, ce sont des étrangers étiquetés comme tel et quelques soient leurs bonnes actions, il est raisonnable de se dire que derrière cette façade se niche le diable en personne, et il est légitime pour celui qui reçoit de se dire à quelle sauce allons-nous être mangé, que va-t-on nous piller encore ? Est-ce à dire qu'il ne faut jamais rien faire pour aider celui qui crève de faim ? " La démocratie devenue l'idéal chrétien" tient, tient, est-ce à dire que la démocratie est chrétienne ? Ne l'oublions pas, ces bons mots, ces bonnes intentions proviennent d'un homme qui "a consacré six années à la formation de centaines de missionnaires destinés à l'Amérique latine" …

 

24

Le coupable se flagelle lui-même, toutefois, nous devons lui reconnaître cette clairvoyance, il dit : "l'église cache le cancer qui ronge l'homme qui a besoin d'un chirurgien", oui toutes religions est là pour camoufler ce qui est à voir, car cela impliquerait de prendre des décisions difficiles, impliquant de lourdes conséquences. "Le vendeur de quincaillerie menace de déverser son assortiment d'imitation bon marché d'un modèle démodé dans son propre pays (USA). Avant de donner à autrui, il convient de peser les conséquences de ces dons. "Le riche peut décider de ne pas donner, tandis que le pauvre peut difficilement refuser le don"… Et donc "l'aumône fait le mendiant", j'aime bien cette formule, nous devrons l'explorer un jour. "Le cœur du problème est de savoir pourquoi nous envoyons des hommes et de l'argent dans ces pays-là, la finalité et l'authenticité de ce geste". Voilà de bonnes questions, affaires à suivre… Chapitre 6 – Disparition de l'ecclésiastique. Aussi opposé sommes-nous, lui le croyant et moi l'athée, il se  trouve que nous avons un point commun qui est de vouloir toujours remettre en cause toutes nos certitudes…

 

25

Nous cherchons obsessionnellement comment procéder, comment réparer tout chose et ne pas rester sur nos acquits, elles endorment et engluent tout le monde. Par contre, l'énumération des problèmes liés à cette société particulière constituée d'hommes dévoués à l'Église ne m'intéresse nullement, je vais donc parcourir ce paragraphe vite fait pour passer à autre chose de plus intéressant, enfin… du moins je l'espère ! Mais avant d'en finir avec "ça", je voudrais relever ici un détail qui révèle peut-être "une tendance de ce monsieur" que nous retrouverons probablement tout au long de son discours et ses propositions pour changer le monde. Il dit : "des familles pourraient se retrouver autour d'une table, chez eux, plutôt que devant un autel pour prier". Il y a là une volonté inconsciente de vouloir changer l'affectation des choses bien établies depuis des siècles, ce qui est fait pour me plaire, à priori, je dis bien à priori.  Chapitre 7 – L'Église désarmée. Ça commence bien : "Seule l'église possède le pouvoir de "révéler" la signification du développement…" Vite, allons visiter la table des matières pour voir combien de temps encore nous aurons à nous farcir de la sainteté …

 

26

Rappelons ce qui m'a fait venir à cet homme : sa remise en cause de l'école, l'énergie, le médical et le reste… Ouf, j'apprends que l'enseignement est le prochain chapitre, alors patience ! Aïe ! Ouille ! "La fonction de l'église est d'annoncer l'évangile"… Si ma pauvre mère juive savait mes lectures actuelles, elle me déshériterait sur le champ de sa richesse de pauvre femme absolue. Il rajoute, le bougre, pour m'achever : "c'est la célébration chrétienne de l'expérience du changement". Ne fermons pas le livre, une surprise nous y attend : " À Cuernavaca, nous avons ouvert un centre de formation, où des hommes découvrent leurs réactions profondes face à un changement…" Ensuite, il se pose des questions sur ce que ressentent les hommes, individuellement ou collectivement, face à telle catastrophe ou un déracinement remettant tout ce qu'ils ont connu avant. Nous ne sommes pas loin de la psychanalyse, notons ce détail, nous risquons d'en avoir besoin par la suite. L'église nous apprend beaucoup, écrit-il. D'abord la transcendance de l'expérience de la vie… ça veut dire quoi ? Que nous sommes responsables de nos péchés et diable, si nous sommes dans cette satanée situation…

 

27

… C'est la faute à tout ce qui nous aliène : les fameuses "choses" de Perec, les systèmes dans lesquelles nous vivons et les héros qui nous égorgent l'esprit. Alors là mon sang ne fait qu'un tour, je frémis de haut en bas, j'appelle Jeannette réveille-toi, il est cinq heures à l'horloge de l'église. À la vérité, ce qui fait du bien à l'homme c'est d'avoir l'attention portée sur un objet quelconque qui lui permet d'échapper au réel. Les religions et tant d'autres choses n'ont pour objectif que d'attirer les hommes à eux, pour leur bien évidemment, mais par ricochet il y a cet effet pervers derrière ces bonnes intentions, qui est de manipuler plus facilement les foules avec ce genre de conneries. Que Dieu me pardonne de prendre tant de liberté, mais le servir quand on ne croit pas en lui n'est pas une tâche facile, reconnaissez-le, s'il vous plait ! Si les religions ont cet effet pervers, ils ne sont pas les seules à servir de diversion à ce fameux réel qui nous sort des yeux, à se demander si c'est une bonne chose de le fuir ainsi. Mais je dis là une bêtise, ou presque, car la diversion est obligatoire si l'on veut continuer à vivre le réel, les deux sont associés, liés l'un à l'autre, nous sommes pris au piège, faits comme des rats.

 

28

Donc, église ou pas, de toute façon nous sommes esclaves de cette manne de survie, nous avons besoin de nous raccrocher à n'importe quoi. Prenant conscience de cet état de fait, que pouvons-nous faire, que pouvons-nous décider ? Quelles valeurs donner à telle ou telle catégorie culturelle ou cultuelle ayant cette fonction, ce rôle vital ? La religion d'abord, la culture ensuite, l'amour d'une personne ou de toutes autres choses, le sexe évidemment, sa collection d'œuvres d'art, de timbres, de pièces d'or, les biens matériels, l'argent, mais aussi le culte de la pauvreté, ça existe, de l'installation dans la misère vécue comme un sacrifice, un dogme, un lien avec les Dieux célestes de nos églises bien bâties de pierres et de diamants. Cette prise de conscience nous mène où ? Au moins à prendre de la distance envers toute chose. Quant à réguler les péchés des humains, comment faire lorsqu'on s'adresse à des masses et non à l'homme dans ce qu'il a de plus individuel, de plus particulier ? Le péché que l'on se fait pardonner, pour pouvoir le reproduire aussitôt sorti de l'église, est la pire des méthodes de réparation. La seule que je connaisse est la compréhension, l'analyse, mais bon, ça c'est mes histoires…

 

29

L'homme pèche, car c'est dans sa nature, personne n'y échappe ; ce péché est à tout moment dans nos fantasmes, nos rêves, dans les images que l'on produit nous-mêmes, que l'on regarde partout au cinéma, à la télé, dans la rue, dans les musées… C'est un thème majeur auquel j'attache depuis plus de vingt années la plus grande attention, nous y reviendrons. Et pour ce qui est "des choses", des objets qui nous entourent au quotidien, que nous désirons posséder, qui nous aliènent, ces trucs de la société de consommation tant décriée, je serais moins critique, car je supporte difficilement qu'une personne, qu'un peuple souffre de manque… Généralement, lorsqu'on prend un live pour le lire, plus encore pour travailler dessus, le minimum M'sieur-dames, est d'en aimer l'auteur. Il y a peu, Illich m'était totalement inconnu. Ce qui a éveillé ma curiosité, c'est la publicité dont il a fait l'objet depuis des décennies, et comme je ne veux pas mourir idiot et désire me confronter avec ces thèmes dont j'ai parlé plus haut, je me trouves contre ma volonté, dans une église, à l'intérieur, dedans, non pour y faire du tourisme promenadique, mais dans la réalité de ce "pouvoir".

 

30

Les phrases que je lis ici me placent face à un homme que je ne veux connaître en aucune façon. Seulement, il me faut prendre mon courage à deux mains, avoir de la persévérance, aller du côté de là où je ne veux mettre les pieds, voir ce qu'il peut en sortir sur le plan littéraire et intellectuel, justement à ce moment où la pensée est mise à mal par la contradiction. Illich se pose la question suivante : quelle différence y a-t-il entre un évangéliste et un humaniste ? Le chrétien est toujours dans "l'étonnante surprise", ça veut dire quoi cet étonnement devant ce qui arrive du fait de sa croyance en Dieu, au Christ ou au diable ? Il casse du sucre sur le pauvre humaniste qui lui, est bien loin de ces hautes sphères spirituelles. Seulement mon p'tit bonhomme, faut savoir que tous les hommes sans exception ont un inconscient fonctionnant à peu près de la même façon, et nous allons tout au long de ce livre te l'expliquer dans les moindres détails. Chapitre 8 : "L'enseignement : une vaine entreprise". Le peuple misérable qui n'a jamais été à l'école croit en elle pour élever ses enfants et les placer du côté de l'usine ou du marché du travail.

 

31

Les années passant, Illich se rend compte que cette institution améliore plutôt le sort de la bourgeoisie, que la réussite scolaire est la clef de toutes les réussites, seulement pour les autres, l'impasse est toujours assurée. L'institution d'une école valable partout, adressée à tous et dans tous les pays du monde est une pure aberration, et celles que nous connaissons aujourd'hui n'ont aucune raison de continuer à exister. Une fois cette vérité formulée, cette prise de conscience que l'enseignement ne sert que certains, toujours les mêmes, que pouvons-nous proposer d'autres dans l'escarcelle de notre volonté à changer le monde pour qu'il aille un peu mieux. L'école est une dictature indétrônable, indécrottable, car affectée du sceau de l'obligation de tous à passer dans ce rouleau compresseur, destructeur, castrant toute velléité à se réaliser autrement, différemment de la masse, de cette cohorte de gosses portant des Nike et des Hollister, donc aux schémas institutionnalisés, adoubé par la fameuse société de consommation. Cette institution coute la peau des fesses aux sociétés de tous les continents, pour au bout du compte rendre responsables/coupables ceux qui n'ont pas réussi.

 

32

Et ceux qui connaissent l'échec, on les enfonce un peu plus en les mettant sur le bas-côté de la route de la communauté des hommes au point de les dégouter de se battre puisque depuis toujours ils ont été considérés comme des nuls. L'école, l'enseignement, n'apparaît, selon Illich, qu'au moment de la croissance de la société industrielle. Elle met en "détention" les gosses indésirables, ainsi la société les met à l'écart de la rue et surtout du monde du travail. Les enseignants ont le pouvoir de complexifier leur enseignement pour tirer les meilleurs, quant aux autres,  ils sont voués à l'esclavage de cette société dont le seul but est d'exploiter autrui. Par ailleurs, en mettant ces enfants à l'école, on se prive d'une main d'œuvre en pleine force de l'âge, et prête à être productive et indépendante. "L'école sélectionne ceux qui sont destinés à réussir et leur accorde un insigne qui témoigne de leur aptitude…" et vite on ne tient plus compte des connaissances acquises en dehors de cette institution. L'Amérique latine dépense les deux cinquièmes de son budget à l'école. Qui envisagerait de remettre en question cette institution se verrait mis au banc des accusés, on le traiterait de fou.

 

33

On ne remet pas en question ces grosses machines, car elles soutiennent l'édifice d'un système encore plus terrifiant, mais difficile à cerner dans ce qu'il a de destructeur pour l'humain. Lorsqu'une nation est pauvre, elle ne devrait pas consacrer tant d'argent à la scolarisation, dix à douze ans d'études, pour quoi ? Hier, j'ai été porter ma voiture chez un garagiste. Le jeune garçon qui s'est occupé du véhicule est stagiaire et a le BAC+ 2 années de formation pour son métier actuel. BAC+2 pour devenir garagiste… Dans un premier temps, je  fus offusqué, me souvenant que "dans mon temps" n'étaient mécanos que les échecs scolaires, on les mettait au CAP, et le tour était joué. Dans un second temps, je me suis dit qu'il était bon que tout homme, quel que soit son métier, ne soit pas exclu de tout ce qui  touche à l'intellect et donc j'étais content d'apprendre ça. Sur un point au moins je suis en plein accord avec Illich : " L'école se charge de convaincre les déclassés qu'il leur faut se soumettre, l'enseignement classe et par là il déclasse ". Ceci n'est pas nouveau pour moi, puisque j'ai écrit " l'école trie les gosses comme du bétail, les bons d'un côté, les autres à l'usine ".

 

34

J'aime sa façon de pointer du doigt là où ça fait mal. Par exemple, lorsqu'il est donné généreusement à ceux qui n'arrivent pas à suivre le cours normal des cours ordinaires, des cours du soir ou de perfectionnement qui ne servent à rien puisque le terrain est miné, mais a l'avantage de prétendre que c'est la faute à ces sales gosses fainéants. J'adore cette formule : " L'enseignement sait consoler les frustrations qu'il provoque  ". Hier comme aujourd'hui, vouloir remettre en question l'école, c'est obligatoirement remettre en question la société dans son ensemble. Là, je ne peux être que d'accord et c'est d'ailleurs ce qui me pousse à faire ce travail d'écriture : essayer de voir comment procéder pour changer cette dite société … lol … Je reste un grand utopiste, certes, mais je crois qu'un homme, une pensée, peuvent à elles seules modifier une part du monde, aussi mince soit-elle. Petit détail qu'il donne et vaut la peine d'être relevé ici : " un diplômé contribue à augmenter le revenu national d'une nation, il rapporte plus qu'un individu en échec ". Donc, l'école contribue à cristalliser une société où une minorité est si productive qu'elle doit former la majorité à une consommation effrénée.

 

35

Nous sommes face à deux groupes : ceux qui produisent et engrangent beaucoup d'argent, et les autres dépensant tout ce qu'ils gagnent et même plus en s'endettant. Ce qu'il écrit révèle de problèmes anciens de plus d'un demi-siècle, mais garde toute son acuité, son actualité aujourd'hui. Sur l'école technique, il a ces mots terrifiants : " ils fournissent une éducation recréant les conditions du travail à l'usine…" Que préconise-t-il ?  Et bien ce qu'il préconise ici me plait beaucoup, cette simple phrase va m'inspirer plus qu'un commentaire, du moins je l'espère : " Au lieu de l'école technique, nous devrions penser à une transformation des exploitations industrielles ". Alors comment entendre cette possibilité maintenant où l'industrie se déplace pour avoir de la main-d'œuvre à moindre coût, où les usines se ferment les unes après les autres sous les sunlights des caméras de TV, qui nous rappellent tous les jours que nous sommes dans un pays démocratique puisque nous avons la CGT qui gueule, le droit de la presse toujours préservée,  totalement libre, la preuve, elle nous montre tous les cinq minutes "ces fous de révoltés", seulement M'sieurs-Dames, la démocratie a ses effets pervers…

 

36

… Et pour le cas qui nous concerne, quoi de plus merveilleux, envoutant pour ceux qui ont le pouvoir de penser au fond d'eux : " Oh, peuple libre, regardez autant que vous voulez ces pneus brûler, ces grandes gueules ouvertes crachant les mots qu'on leur a assénés dans leurs cellules respectives… Rien n'y fait, nous sommes les plus forts, nous gagnons toujours et faisons ce que nous voulons et d'eux et de vous, pauvres imbéciles, on vous crache au visage, que pouvez-vous faire ? Au pire, manifester de la République à la Bastille, la belle affaire, cette publicité nous ravis car elle dit toujours notre puissance à avoir le dernier mot, parfois avec le consentement des gouvernants, quand ce n'est avec leur aide. Un Président de la République a préconisé ces temps-ci " des contrats de génération ", où un ancien viendrait aider un jeune à trouver une place dans ce bordel où tout lui est fermé, parce qu'ils sont jeunes et donc potentiellement dangereux pour l'emploi de celui qui est là dans l'entreprise et ne veut pas se trouver comme beaucoup au chômage, à la rue. Peut-on imaginer des gamins de 13 à 16 ans entrer dans l'entreprise où papa et maman travaillent ? Et pourquoi pas ?

 

37

Pourquoi ne pas considérer que donner un emploi à un jeune, par les temps qui courent, vaut aussi bien que de le voir végéter sur les bancs d'une école pas faite pour lui, traîner dans la rue à faires des conneries, consommer de l'alcool, du tabac, de la drogue, faire du mal à autrui, où en cherchant à se suicider, ce qui est le pire des échecs d'une société se targuant d'être aux yeux du monde exemplaire. Oui, tout lieu de travail peut être potentiellement ouvert aux jeunes, peu importe l'âge, surtout si cette usine, ce bureau, ce commerce sont déjà occupés par un parent proche ou éloigné, c'est là que je me rapproche de cette idée de " contrat de génération ", mais pour moi il n'y a pas de contrat sinon d'harmonie, de bonne entente et de respects mutuels. Mieux encore, nous pourrions accompagner "cette nouvelle main-d'œuvre à moindre coût" à s'éduquer selon leurs possibilités et leurs goûts pour les choses que l'on dit culturelles. Il faut savoir que tout homme veut apprendre, mais ne veux pas être pris pour un con… à bon entendeur, salut ! Et voilà, dans cette lecture que je fais, les lieux de travail devenant des maisons pour des stages pour tout enfant le demandant…

 

38

… Et pendant les heures de fermeture de l'entreprise, dit-il, les enfants sans limitation d'âge, et pas seulement ceux qui sont appelés à devenir un jour les employés de ce patron-ci, offrant ses murs à un tel projet éducatif. Il propose d'inverser ce qui nous paraît à tous une évidence, il voit le gosse travailler d'abord et apprendre ensuite, ou mieux, en même temps. Deux mois par an d'une bonne école suffiraient, mais durant les trente premières années d'une vie. Réaliste, il se pose la question des conséquences politiques nationales, et plus élargies dune telle révolution éducative. En effet, que penseraient les chinois, les hindous et bien d'autres si tout à coup nous mettions, pour leur bien, nos enfants au travail à produire ce dont nous avons besoin pour vivre sans demander rien à personne. Je m'égare, mais pas tant que cela, car se demander aujourd'hui si vivre en autarcie ne serait pas la meilleure solution, au moins pour un certain temps, celui de résorber ce putain de déficit qui nous ronge les os, comme un cancer. L'école endoctrine l'enfant pour qu'il accepte le système politique que les enseignants représentent, bien que l'on proclame l'enseignement apolitique.

 

39

Souvent on se pose la question d'où vient la violence chez l'homme, nous avons ici une probable réponse : "finalement, le culte de l'école conduira à la violence…car il y a espérance déçue du mythe de l'école …" Et là il  tape fort sur cette scolarisation de notes et de diplômes triant les hommes comme du bétail : les bons d'un côté, les autres à la poubelle. Lorsque vous ne faites pas partie de la bonne catégorie, quel choix avez-vous ? Soit baisser la tête et tout accepter, soit vous révolter et cette révolte peut prendre mille formes dont le motif d'origine, l'échec scolaire, est difficilement discernable au fil du temps, des années qui passent. Et nous pourrons observer plusieurs décennies après l'école, éclater de la haine destructrice envers le monde de la part d'un individu ayant accumulé pendant dix, vingt, trente ans, cette douleur sans rien dire. Mais un jour ça sort, il est impossible qu'il en soit autrement. – Faut que ça change, faut que ça change, disait la chanson, mais qui aujourd'hui verra ce changement ? Je vous pose la question, à vous d'y répondre ! Pour conclure son exposé sur l'enseignement, il ose ce mot terrible : CHAOS.

 

40

9 – " L'école ou la vache sacrée. " – Qui aujourd'hui chercherait à comprendre le système scolaire dans ce qu'il porte dans ses tripes de meilleurs et de pire surtout ? Et nous voilà transporté à l'Université de Porto Rico il y a plus d'un demi-siècle, à écouter, assis sur un banc bien sagement, le discours de cet homme d'église se posant des questions sur le mode de fonctionnement de cette société athée… Oui, quoi, que veut dire cette remarque pleine de fiel envers ceux qui croient en Dieu et au Christ accroché tout nu à sa croix ? La première phrase qu'il profère est : " Les instituts scolaires en sont arrivés à une période de crise qui pourrait annoncer la fin de "l'ère scolaire" dans le monde occidental ". Pourrions-nous entendre ça dans nos universités aujourd'hui ? Je ne le crois pas, chacun s'accroche à son bout de gras de peur de voir s'écrouler cet édifice qu'il sait si fragile.  Mais, lui, là ici, va on ne peut plus loin : " Votre génération se doit de détruire ce mythe " (l'école indispensable au bien être des humains). Il brise la glace qu'il produit en mettant les étudiants présents dans la salle devant cette réalité crue : leurs études ont couté beaucoup d'argent à la société portoricaine…

 

41

Il est temps de révolutionner tout ça si l'on veut du bien à tous vos enfants. Et il enfonce le clou en relevant qu'ils représentent 10 % de la jeunesse du pays, les autres n'ont que leurs yeux pour pleurer dans ce monde si injuste à l'égard des défavorisés. Sa violence à l'endroit de ces étudiants ayant réussi leurs études foudroie : " Le diplôme que vous  recevez aujourd'hui atteste et accrédite votre compétence, cette compétence que l'on ne reconnaît pas à celui qui l'aurait acquise en dehors de l'Université, par son propre travail". Sous forme de reproche à peine voilé, il leur fait l'inventaire de leur situation privilégiée présente dans le monde. "Seize années d'études vous ont soumis au rite scolastique, et maintenant personne ne peut douter que vous soyez les plus fidèles des conservateurs : vous ne vous livrerez jamais à la subversion contre l'ordre établi…" Nous apprenons que ce discours est retransmis à la télé portoricaine, que ce peuple a investi beaucoup d'énergie et d'espoir dans l'éducation, au point de la mettre au même niveau que la religion, ce n’est pas peu dire ! "Au reçu du diplôme, le "produit" acquiert une cote sur le marché". Être traités de produits est une révolution ou une insulte ?

 

42

Peut-être trouverons-nous dans quelques pages de quoi critiquer ces grandes vérités. Mais pour l'heure, ne gâchons pas notre plaisir et regardons ces constats qu'il fait et donne le tournis, encore aujourd'hui. " La scolarité garantit l'appartenance à la société de consommation disciplinée de la technocratie, comme naguère les fidèles de l'Église appartenaient à la communauté des saints… L'école vous donne vos lettres de créance, dit-il, au point que les pauvres attribuent leur misère parce qu'ils n'ont pas justement de diplômes". Pourquoi l'école a-t-elle pris une telle importance dans ce pays ? Illich donne cette réponse : un sentiment d'infériorité à l'égard des Etats-Unis. Et il demande à ces pauvres nouveaux diplômés de développer à Porto Rico un processus éducatif différent, car veulent-ils réellement orienter leurs propres enfants à cet objectif unique : aller en Amérique du Nord ? Nous ne pouvons pas lui reprocher d'avoir de bons sentiments, seulement ils sont rarement bénéfiques à l'homme. La réalité est là : ces jeunes diplômés trouveront plus facilement un débouché du côté de New York. De quel droit se permet-il de les mettre sur le banc des accusés ?

 

43

Faut-il vendre son âme pour survivre ailleurs, ou bien faut-il, comme il le dit ici, remettre en cause les fondements du système qui les ont mis au sommet de cette reconnaissance où ils sont maintenant dans cette salle, tous rassemblés à l'écouter comme un Dieu. Faut-il donc quitter son lieu de naissance et s'expatrier dans un pays riche pour trouver de quoi vivre mieux, ou alors rester parmi les siens, et essayer d'apporter sa pierre à l'édifice d'un pays trop pauvre ? Tous les émigrés du monde se sont trouvés devant cette interrogation. Tous savent parfaitement que si ailleurs ils risquent de trouver de quoi se nourrir et aider leur famille restée au pays, ils savent aussi qu'ils seront déracinés, quels que soient l'endroit et leurs conditions d'existence : tout émigré quittant son pays prend ce ticket terrifiant : "ÉTRANGER À VIE". Par moment je me demande s'il n'est pas jaloux du succès de l'école qu'il préfèrerait orienter vers quelque chose d'autre, peut-être l'Église, peut-être pas ? Je ne me suis pas trompé de beaucoup en vous disant cela, quelques lignes plus loin, nous pouvons lire : "l'église est concurrencée par l'école…" Le monsieur est maintenant dévoilé nu, attention où nous mettons les pieds !

 

44

"Le pouvoir que possède l'école de secourir l'habitant du taudis est semblable à celui de l'église de secourir de l'enfer… Seulement voilà, il y a une différence entre ces deux institutions : l'école coute plus cher, dit-il, revenant souvent sur ce facteur essentiel : elle a pour fonction aussi de culpabiliser les gosses des bas quartiers, les soumettre pour en faire de bons ouvriers dociles et avalant les couleuvres des lois pas faites pour eux. Heureusement ou pas, les générations passent et ne se ressemblent guère, certains refusent ce jeu venu d'en haut et deviennent des contrevenants à la loi et à cette société qui a maltraité leurs parents et grands-parents lorsqu'ils travaillaient comme des Romains pour le bien de tous, et tout ça pour un salaire de merde et aucune reconnaissance. Toutes les violences viennent de là, aucun homme politique de droite comme de gauche n'en tient compte, on fait la sourde oreille, tout va très bien madame la marquise. Parfois, j'entends dans son discours celui d'un prêtre donnant son sermon du haut de sa chaire : " N'ayez pas peur, ne craignez pas d'être considérés comme des hérétiques ou des subversifs, soyez-le "

 

45

Et comme nous disait Sartre en son temps : quoi que vous fassiez vous serez récupérés. Pourquoi cette association, je n'en sais rien ! Oui Messieurs les bons penseurs, vos bons mots sont des ordres auquel il ne faut jamais porter une trop grande importance. Bon apôtre, il prédit la fin de cette institution, du moins il la souhaite de tous ses vœux. Il condamne, les enseignants représentent, qu'ils le veuillent ou non, un intérêt économique. À chaque fois qu'il conteste l'école, il trouve son parallèle dans l'église comme un antidote, un fouet pour se battre lui-même. Pourquoi agit-il ainsi, se protège-t-il des reproches qu'on pourrait lui faire ? Peut-être nous verrons cela un peu plus tard, mais dès à présent il n'y a aucun doute qu'il identifie les maux de l'école à ceux dont il a souffert probablement lui-même dans ses églises ? " Il faudrait revenir en arrière pour dresser le constat de l'erreur des générations précédentes…" Est-ce envisageable aujourd'hui ? Je ne le crois pas, j'opterai plutôt pour la proposition de Bernard Defrance, professeur de philo : arrêter pendant deux ans tous les programmes scolaires afin de remettre ce système scolaire qui n'est plus conforme à notre société actuelle.

 

46

Quant à l'égalité de chances, fer de lance de ces hommes fièrement installés dans les hautes sphères du pouvoir, permettez-moi d'en rire un peu, beaucoup, à la folie. Ça veut dire tout le monde a ses chances au départ, mais pas à l'arrivée, car c'est toujours la faute à ce gosse, ce sale gosse qui ne veut pas faire comme on lui demande… Non,  " l'égalité de chances  " est un mensonge coupable, je veux des têtes, des noms pour rester encore un homme sociable à peine fréquentable. Il propose de dépenser plus d'argent pour un gosse qui ne réussit pas, et non l'inverse. Je ne crois pas cette proposition répondre aux réels problèmes que rencontrent les jeunes en difficulté, ce n'est pas une question de monnaie, mais de volonté et de talent de la part des enseignants et de tous ceux qui devraient les assister, je pense principalement aux artistes de tous bords pouvant parfaitement ouvrir les portes avec des angles de vues sur le monde et des propositions beaucoup plus ouverts que ceux de l'état militaire dont nos pauvres enfants sont les cobayes martyrs aujourd'hui. Profitons de cette remarque pour évoquer les subventions impressionnantes affectées aux domaines de l'art.

 

47

Nous devrions maintenir ces aides uniquement lorsque ces artistes et ces institutions (musées, théâtres, cinémas) donnent de leur temps et leurs savoirs aux jeunes de toutes catégories sociales. Permettez-moi de douter de la volonté de l'enseignant à enseigner de telle manière que tous les élèves comprennent. N'y a-t-il pas, inconsciemment, involontairement, une part d'eux-mêmes voulant reproduire ce qu'ils ont connu, et donc sélectionner les meilleurs ? Les artistes venant apporter leur contribution n'auraient pas, à priori, cette difficulté, je dis bien à priori, car qui n'est pas tenté de mettre en avant celui qui nous plait au détriment d'un autre, nous paraissant plus indifférent ? Illich voit l'école disparaître et imagine le cadre familial, professionnel, communautaire, les bibliothèques d'un modèle nouveau, venant supplanter l'institution fauteuse dont il est question ici. " L'éducation véritable doit nous surprendre, un peu comme à l'église… " Tiens, ça revient ! " On devrait créer une situation où la société proposerait à chaque individu de faire l'inventaire de soi-même en profondeur, "en profondeur" c'est moi qui le rajoute, car je sais tout l'intérêt qu'il y a à faire l'inventaire de son moi, de son chez soi.

 

48

10 – Puissance politique et procréation. Dans un premier temps, je voulais passer ce thème de la procréation, trop douloureux, avais-je écrit. Seulement, j'y reviens, cette question est à prendre en compte, on ne peut l'éviter. L'état a-t-il son mot à dire sur le nombre d'enfants que chaque famille décide d'avoir au cours de son existence ? Cette formule, je la trouve insidieuse et pourtant j'en suis l'auteur. Le contrôle de naissance est-il vécu de la même façon par tous, ou est-il repoussé par certains pour des raisons religieuses ou je ne sais quoi d'autre ? Incontestablement il faut des moyens pour élever un enfant, financier, disponibilité et biens d'autres encore, il est donc à priori préférable d'en avoir peu bien dans leur peau que beaucoup voués à l'échec… Ces bons discours ne servent à rien, les raisons profondes poussant certaines familles a en avoir plus que de raison  sont complexes. J'ai imaginé qu'un homme ayant dans la société une position sociale qu'il considère  "inférieure" par rapport à la moyenne, prenne sa revanche en inondant le monde d'autant d'"inférieurs" qu'il peut en donner, c'est la seule "puissance" qu'il puisse s'accorder …  Ces hommes sont-ils le produit de l'échec scolaire ?

 

 

49

… Et d'ailleurs l'échec scolaire a été inventé à l'intention des pauvres afin de les mettre dans des postes de travail ingrat, et c'est là tout le mal que l'école peut produire sur l'humanité : provoquer de la haine s'exprimant par des comportements comme celui-ci, mais ce n'est pas le seul, il n'est qu'un grain de sable d'une plage vouée à perdurer…  

11 – La pauvreté planifiée. Au chapitre précédent j'avais zappé ce texte, pourtant intéressant, sur la contraception, Illich constate : " à court terme, les sommes qu'une naissance en moins permettra d'économiser, seront plus importantes que celles de l'accroissement productif qu'apporterait un enfant scolarisé " et dans celui-ci de chapitre, il donne cette information effrayante : " les quatre cinquièmes les plus misérables de l'humanité se multiplient de façon anarchique, tandis que leurs ressources ne cessent de diminuer ". Avec ces informations, je ne sais comment je vais passer mon dimanche, dehors il fait froid car c'est l'hiver, et dedans, je pourrai aller bien mieux s'il n'y avait ces questions universelles nous gâchant la vie à tous. Évidemment nous ne pourrons pas changer la marche du monde, mais quand même …

 

50

Pour la unième fois la question du bien-fondé de ce travail sur Illich se pose à moi. Me permet-il de dire ce que j'ai dans le cœur en suivant scrupuleusement les chapitres du livre (Œuvres complètes – volume 1) ? Oui et non, vous dirais-je volontiers, car ainsi va le chemin de croix de celui qui veut dire la vérité, ou du moins le prétend. Vanité de vanité…  Heureusement mon objectif n'est pas de ce côté-ci, Dieu m'en préserve, il est de vouloir apporter un autre regard sur les choses de la vie. Alors, qu'aurai-je à dire d'essentiel sur l'école ? J'aimerai faire prendre conscience qu'après l'enseignement obligatoire, il y a la vie normale et aujourd'hui elle peut durer longtemps, puisque nous pouvons vivre jusqu'à 100 ans sans trop de difficulté… Quoi que … Mais bon, laissons cette question pour plus tard. Cette période, allant de la fin des études à la fin de la vie, sera à l'image de ce qui a été vécu à l'école. La psychanalyse nous a convaincus de l'importance de l'enfance sur la vie de l'homme adulte, alors pourquoi la vie scolaire n'aurait-elle pas le même effet sur le comportement humain ? Tout doit être mis en œuvre justement pour préparer l'enfant, l'adolescent à avoir le meilleur de l'existence.

 

51

Mais le meilleur de l'existence c'est quoi ? Et d'abord, et surtout, de ne pas être dégouté de ce que l'école a voulu inculquer à l'enfant, je veux dire la lecture, l'écriture, la culture, ce qu'il y a dans les livres, les revues, les journaux, les musées, les cinémas, les théâtres, et mille autres choses dont je ne vais pas faire l'inventaire ici pour l'instant. L'école ne doit pas faire de dégâts, et en disant cela, je pense aux restaurateurs de tableaux, jadis ils remettaient des couches et des couches sur l'ancien pour faire du neuf, aujourd'hui ils essayent de ne pas abimer ce qui était à l'origine sur la toile, ils y vont avec légèreté et respect… Voilà l'éducation de demain : légèreté et respect. Ces bonnes intentions nous font rêver à un monde meilleur, seulement nous devons être efficaces avant tout. Comment ? Illich fait la critique de l'école de façon virulente, mais que propose-t-il ? Pour l'instant je ne vois pas où il veut en venir sinon remettre en cause les institutions porteuses de pouvoir, ce que je comprends, n'ai-je pas écrit : dès qu'il y a pouvoir, il y abus. L'école est-elle une garderie ? Oui, elle l'est, mais pas seulement pour mettre ces gosses à l'abri des dangers du monde, mais aussi les éloigner du travail de leurs pères…

 

52

Et quoi, que dites-vous, de quoi les pères sont-ils encore coupables ? Ne vous mettez pas en colère, c'est dans la nature des choses, dans l'histoire de l'homme dans ce qu'elle peut avoir de plus archaïque : les pères veulent éloigner leurs progénitures afin de rester seuls près de leurs dulcinées… Freud a inventé le complexe d'Œdipe, le gosse voulant tuer le père pour prendre sa place dans le lit conjugal, là, il s'agit de l'inverse, le père veut mettre son fils hors d'état de nuire dans sa maison, son travail, et pour se faire il le met à l'école le plus longtemps possible… L'école fut inventée pour ça : protéger le père d'un fils désirant se substituer à lui partout, et parfois, soyons diaboliques jusqu'au bout, les pères peuvent mener leurs fils à la guerre … Si ma vision de la filiation vous paraît peu engageante, je ne vous oblige en rien, restez célibataire ! Mais si vous avez déjà donné au mal de la paternité, acceptez cette vérité, elle peut vous être utile pour contrer vos propres pulsions négatives à l'égard de vos enfants. La cellule familiale peut-elle remplir seule cette fonction éducative ? Bien sûr que non, revenir en arrière serait une catastrophe, ne caressons pas dans cette direction notre tendance à tout vouloir changer.

 

53

Qui se permettrait aujourd'hui de remettre en cause " le progrès " se verrait taxé d'anarchiste invétéré. Seulement gardons raison gardée, et posons sur la table les éléments d'un puzzle pour voir plus clair le caca qui nous attend parce qu'on n'a pas su prendre les mesures nécessaires à temps. On nous parle en permanence d'investir dans la "recherche" comme si de là pouvait sortir la réponse à tous nos problèmes. Le progrès est un mieux réel par rapport à ce qui existait hier, si l'on ne prend pas en compte les aspects négatifs de cette machine qui broie l'humain en permanence sans se soucier du mal qu'elle fait, qui nous gouverne tous, je parle de cette machine économique entre autres choses. En lisant cela vous imaginez avoir à faire à un homme rêvant revenir en arrière, tapotant sur sa Remington pour nous dire ce qu'il pense de tout et de rien, et sa télé en noir et blanc pour revoir les "36 chandelles" et Gilbert Bécaud. Non, non et non, je ne veux pas que vous pensiez une telle chose de moi, je suis fou du chocolat Lanvin et de tout ce qui est moderne : TV extra plat, ordinateur iMac et iPad, (pas la voiture pour des raisons que je développerai probablement plus tard) etc.

 

54

Toutes ces choses "modernes" sont d'excellents outils permettant à chacun de se réaliser selon ses intérêts propres. Tout irait donc dans le meilleur des mondes s'il n'y avait en contrepartie la misère, qui ronge le monde comme un cancer, et que l'on ne veut pas regarder en face pour ne pas mourir de honte. Alors que faire ? À l'évidence, continuer comme cela est un suicide collectif, mené par les chefs de nos tribus et dont les peuples ne mesurent pas l'imminence. Bien entendu, il est fait là allusion entre autre aux déficits de nos pays ayant mangé plus que de raison tout ce que nous avons accumulé depuis des siècles, nous sommes à sec et cela n'augure rien de bon… Sauf, sauf si Zorro arrive flambant neuf sur son cheval multicolore pour sauver le monde et ses sbires… Seulement, des Zorro nous en avons connu en des temps pas si éloignés, j'ai le tournis rien que d'y penser. L'une des solutions ne serait-elle pas de considérer qu'il faut impérativement prendre en compte, en premier lieu, dans le cadre d'un projet politique, la misère à abolir, pas en cinq ou dix ans, mais en un ou deux mois, comme l'a si bien avancé l'économiste Philippe Dessertine.

 

55

Ce n'est pas une affaire facile à résoudre, certes, mais à quoi peuvent servir ces hommes si intelligents que nous avons dans notre pays s'ils n'arrivent pas à résoudre ce problème-ci ? Revenons à ce concept de la "recherche". Lorsqu'on en parle c'est toujours pour nous dire qu'il faut plus d'argent, plus investir… Je propose de développer la "recherche" dans l'objectif de trouver comment faire mieux tout en coutant moins cher. C'est là la bonne direction à suivre d'un politique responsable voulant sauver notre pays, nos pays : nous devons avoir de bonnes idées et être économes, accepter des décisions impensables, par exemple, ne plus payer les intérêts de la dette et rembourser le capital en vingt ans. Quelle magnifique énergie donnerait à chacun de nous cet objectif de ne plus avoir personne à mourir sur le trottoir, que ces hommes et ces femmes soient nos proches ou nos lointains, il faut réparer la machine à partir de l'élément humain. Ce sont, me direz-vous, de bons sentiments, mais ils n'arrangent jamais rien, et là vous auriez raison, il est impératif d'être pragmatique, d'avoir les pieds sur terre et décider ce qui peut l'être pour sauver le monde tant qu'il en est encore temps.

 

56

Soyons critique un peu avec notre ami Illich lorsqu'il déclare à son public : " Chaque voiture lancée sur les routes du Brésil prive cinquante personnes à la possibilité de disposer d'un autocar. Chaque réfrigérateur contribue à restreindre les chances que soit construite une chambre froide pour la communauté. " Le pauvre garçon, s'il voyait ce qu'il en est aujourd'hui, plus d'un demi-siècle après cette déclaration, il vomirait toutes ses tripes dehors, heureusement de là où il est maintenant, nous ne risquons pas ce genre de spectacle peu ragoutant. Mais faisons une pose, si vous le permettez.  Illich remet en cause les institutions sociales et, pour l'instant, je n'ai point trouvé de portes alternatives, j'ai lu seulement une critique, celle d’un bon sociologue. A l'école, on se souvient de cette leçon donnée à tout le monde : pour la construction de sa rédaction, nous devons exposer une thèse, puis développer une antithèse et pour finir faire la synthèse de tout ça. Aujourd'hui, bien que je sois loin de cet âge adolescent, cette idée me paraît fondamentale, non seulement pour remplir un devoir, un travail d'écolier, d'étudiant, littéraire, mais pour toute chose, car si l'on veut penser une chose…

 

57

… Il faut aussi l'avoir contestée avec des arguments forts pour avoir ces matériaux nécessaires à se faire une idée juste et la plus proche de sa pensée, la plus personnelle que possible. On se souvient tous de ce bouquin qui a fait scandale : " Le livre noir de la psychanalyse ", sortie en 2005 et remettant en cause l'ensemble des travaux de notre très cher ami Sigmund Freud. Sept ans plus tard, Michel Onfray, célèbre professeur de "l'Université pour tous" et particulièrement des habitants de sa ville de Caen. En fait, de là, de Caen donc, il vide son sac de tout ce qu'il a pu consommer en milliers de livres, en millions de pages, lues je ne sais ni comment, ni à quelle vitesse, mais lui ayant permis de ne pas crever de faim puisqu'il édite en pavés tous les mots sortant de sa bouche, je rajoute : "d'intellectuel de gauche bien pensant", crever de faim, disais-je, comme une grande partie de la population française. Je ne sais pourquoi tout à coup ce machin n'ayant aucun rapport avec le sujet traité vient s'asseoir au bout de ma plume pour me dire combien elle se sent libre d'écrire ce qu'elle veut, même et surtout contre ma volonté parfois.

 

58

Donc, dans " Crépuscule d'une idole ", Onfray met le maître à sac pour ne pas dire à genoux, à ses pieds. Peu importe, Freud est mort et il s'en fout de tout cela, ayant été jadis, en son temps, trahi par son ami Romain Rolland, qui écrit dans ce " Journal de Vézelay, 1938 – 1944 " qui vient de sortir dans nos librairies et où je relève cette lettre de 1939 : " Je ne peux dire ma répulsion contre l'utilisation morbide, maniaque, que font aujourd'hui les psychologues, les historiens, les hommes de science, des explications freudiennes. (Et j'en vois beaucoup parmi mes amis.) À Edouard Monod qui m'a envoyé une étude sur l'écriture de Napoléon, qu'il juge uniquement en fonction du complexe d'Œdipe, j'écris (6 mars 1939) : "Excusez-moi de ne pas croire au fameux complexe et aux symboles freudiens ! Je n'ai jamais pu y voir que des explications pathologiques, qui ne valent que pour des cas restreints de disharmonie ; et rien ne me paraît autoriser à les étendre à toute l'humanité. En ce qui me concerne, je n'ai jamais eu aucune peine à harmoniser en moi le père et la mère. Et ce sont de tout autres combats que l'art et l'action publique m'ont obligé à livrer.

 

59

. – Il est vrai que les freudiens ramènent à père et la mère la terre, le ciel, les éléments, tout ce qui est, le monde entier, qui n'est plus pour eux qu'un réservoir à imagos. Mais il est  facile alors d'avoir raison : pour démontrer, on se contente d'affirmer… - Je crois la vie plus riche et plus complexe. L'hypothèse de Freud me paraît la fausser, en la simplifiant à l'extrême – et, j'ajoute, non pas dans le sens le plus naturel et le plus sain : - car, père et mère, ce sont des morts, et le mouvement vrai du vrai vivant, l'élan de vie, - c'est de s'y arracher. La vie oublie… C'est la condition pour échapper à la fosse – l'espace d'un instant, qui est un monde. " Contester est bon pour la santé mentale, ça libère des endomorphines et permet de dire n'importe quoi sur une tête lourde dans le registre des têtes bien remplies pour inonder le monde de ses moules à bigorneaux tangibles. Qu'importe tout cela, mais je soumettrais bien aux philosophes de tous poils que nous sommes à débattre de tout et de rien, de soumettre ce terrible constat : à supposer que Freud se soit planté (ce qui est le cas, mais je ne vais pas vous donner mon travail ici, vous le trouverez sur internet sans trop de difficulté)…

 

60

… Comment expliquer que ces "fausses réponses" aient fait tant d'émules professionnels ou de clients potentiels à se vider de leur argent pour aller mieux. La psychanalyse a séduit beaucoup de monde, moi-même il y a un demi-siècle je fus réveillé de ma léthargie de mort-vivant en parallèle au théâtre, la psychanalyse aujourd'hui encore me passionne et la mettre en cause ne fait que réactiver tout l'intérêt qu'elle peut avoir pour l'humain, comme moyen idéal pour pénétrer son corps caverneux en profondeur raisonnable. Pendant plus d'un siècle les hommes ont travaillé sur des théories Freudiennes, si elles étaient fausses, nous pourrions avancer que toutes les théories découvertes par les hommes sont fausses également, et leurs utilisations par l'élite ne sont que poudres aux yeux dont le seul objectif est … Est Quoi ? Pour conclure, une chose est certaine : Freud créa un métier permettant à des milliers de psychanalystes de gagner beaucoup d'argent sans trop se fatiguer. Ceci étant dit, je ne cesse de conseiller à tout un chacun d'aller voir un psy, non pour guérir d'une maladie ou d'une souffrance pathologique, mais pour devenir plus intelligent…

 

61

On entend de toute part et particulièrement de la bouche des politiques que la seule solution à la "voyouterie" est l'éducation. Messieurs dames, vous avez tout faux, car l'éducation que vous servez n'est pas faîte pour tous, au contraire, elle crée, secrète elle-même le poison qu'elle dit vouloir combattre. En effet, qui voulez-vous convaincre en enseignant la "bonne culture", celle des lumières, celle de l'ombre qui cache la forêt ? Non, le gosse qui chez lui vit l'inimaginable, la violence de ses parents, la misère, le chômage, et tant d'autres choses donnant envie de vomir rien que d'y penser, ce gosse dis-je, ne peut entrer dans votre danse, il en est incapable, d'autorité exclus, et ça, vous le savez parfaitement, pourtant, pourtant vous continuez à servir la soupe : normal, vous êtes payé pour ça, il ne vous viendrait pas à l'esprit de vous révolter, de manifester de la Bastille à la République pour cette cause-ci enfin, car votre enseignement enfonce certains au point qu'ils n'ont d'autres choix que de vous cracher à la figure, et pour cause : ils ne sont pas respectés quant à leurs possibilités d'intégrer cette école-là. Lorsqu'on a des origines venant d'ailleurs, les cultures ne sont pas les mêmes, elles sont différentes.

 

62

Les renier pour intégrer Napoléon et Molière, c'est, qu'on le veuille ou non, inconsciemment, se renier soi-même, pire c'est renier ses parents, et donc ses origines. La violence vient de là, pas d'ailleurs, ce conflit interne propre à chacun de ces humains n'est pas entendu, alors ils font beaucoup de bruit pour l'être enfin. Cette vérité fait mal, elle me désespère car j'ai peu d'espoir que les hommes de pouvoir puissent changer quoi que ce soit en ce domaine : ils ne veulent en aucune façon s'arrêter pour réfléchir en profondeur et surtout prendre les mesures qui s'imposent. "La seule solution possible au sous-développement est la satisfaction des besoins fondamentaux…", dit Illich page 183 du tome 1 de ses œuvres complètes. Comment, quoi, vous osez comparer notre pays riche aux sous-développés ? En certains endroits la comparaison n'est pas de trop. Tous les jours les journaux, la télé, nous inondent, nous informent de cette réalité, et pourtant rien ne change, c'est la  faute à pas de chance, c'est aussi le meilleur moyen pour soumettre, aliéner le peuple dans son ensemble, et lui dire : fait attention à bien tenir la barre matelot, sinon regarde ce qui t'attend…

 

63

Nous sommes dimanche, il est 9h30, dehors il fait froid, et en moi monte une petite parano qu'il me faut calmer en allant me faire un bon thé bien chaud… Si nous essayons ici de voir clair dans ce ramdam de l'école, pendant ce temps-là, notre ministre de l'éducation se bat pour une question d'heures d'entrer et de sortie des classes et du temps à passer en vacances. Les médias y mettent du leur pour faire monter la sauce, pendant que les problèmes s'amoncellent dans l'escarcelle d'une éducation qui tous les jours détruit des êtres humains, pas seulement des enfants. Ce matin au réveil, je voulais vous parler de ce que les écoliers, les étudiants, après le temps passé dans ces bâtiments de l'Éducation Nationale, en sortent, avec ou sans diplômes, et vont avoir à vivre 60 à 80 années avec sur le paletot, d'une façon permanente, les stigmates de ce qu'ils ont vécu pendant ces années qu'on dit scolaires. Inutile de vous préciser que je pense principalement à tous ceux qui ont vécu l'échec scolaire, avec ces milliers de mauvaises notes à avaler tous les jours comme un poison … Et quand je dis poison, je pense poison qui tue, détruit le vivant de l'être humain intéressé par la vie, la vraie, pas celle des conneries.

 

64

Lorsqu'on parle école, on parle toujours d'enfants, d'adolescents. On oublie que les adultes sont issus de cette chose-là, pour ne pas dire de cet enfer. Pensons-y avant d'élaborer la philosophie d'une nouvelle école. L'objectif serait de faire un minimum de dégâts dans l'avenir de ces futurs adultes. Nous devons tout mettre en oeuvre pour donner envie de lire et d'écrire tout au long de sa vie, être dans l'excitation de ce qui nous entoure, aimer la culture que l'on aura pris le temps de choisir, et qui correspond à notre histoire, aimer notre métier, aimer l'existence jusqu'au dernier jour, et non étudier uniquement dans l'objectif de réussir ses examens, comme si cela avait une quelconque importance, sinon pour être au chômage avec BAC+5 (sic)… Ne désespérons pas, mes frères, battons-nous, battons-nous, sans relâche ! Avoir des idées et les exposer c'est justement le propos de notre ami Illich à la page 184 où il nous fait part d'une liste de choses pouvant apporter un plus, à un peuple en déroute (un peu comme le nôtre aujourd'hui). Qui oserait maintenant avancer une telle proposition : " Approvisionner en eau potable plutôt que de mettre en place des services chirurgicaux trop onéreux "…

 

65

… La tentation est grande d'abonder dans son sens si dans mon cas personnel, ces fameux services chirurgicaux ne m'avaient sauvé la vie et me faire renaître une seconde fois à cinquante ans précisément. Par contre, aujourd'hui où la sécu est au bord de la faillite, il faut entendre ceci : " Favoriser les aides médicaux plutôt que les médecins et les infirmières spécialisées "puis il délire franchement en voulant : " des chambres froides communautaires plutôt que des réfrigérateurs individuels…" nous voilà revenus au temps du communisme, pourtant déclaré mort depuis quelques décades déjà. " Et pourquoi ne pas considérer la marche à pied comme une solution au problème des embouteillages ? …" De la porte d'Orléans à celle de Clignancourt, la journée passerait rien qu'à marcher, le facteur temps risque de mettre à mal cette idée géniale. Par contre j'aime bien : " Pourquoi ne pas obliger chaque citoyen à apprendre à construire un habitat décent ? " Pour les Parisiens, cette proposition ne tiendrait pas la route, car construire votre pavillon sur les Champs-Elysées serait fatale à votre liberté. Comme quoi rien n'est parfait en ce bas monde, même les idées les meilleures.

 

66

Mais revenons à l'éducation puisqu'il nous y invite. Ce qu'il propose est d'étaler dans le temps l'ensemble de cet enseignement. Au lieu de consacrer tout l'argent à des gosses trop jeunes pour apprendre, mettons-les au travail dès que possible et donnons à chacun jusqu'à l'âge de 30 ans un à deux mois d'éducation obligatoire. Il affirme " On peut enseigner à lire et à écrire dix fois plus vite à un adulte et pour dix fois moins cher ", déclaration à vérifier, peu convaincante, je ne vois pas où se caseraient ces économies dont il parle… Plus loin " L'adulte éduqué pourra contribuer à l'éducation de ses enfants et à celle des autres adultes", cela est séduisant, c'est du communisme pur jus, j'aime bien, ça me fait rêver… Il nous parle après de l'argent consacré à la recherche. En fait, cette recherche a presque toujours pour but "d'améliorer et de vendre des produits, des avions plus rapides, des spécialités pharmaceutiques plus redoutables (sic, c'est grandement d'actualité !) et former des médecins capables de prévenir leurs effets souvent mortels" (je ne comprends pas ce qu'il veut dire ici) " pour mettre au point la gestion d'entreprises gigantesques". Alors que faire devant le pouvoir, quel qu'il soit ?

 

67

À la recherche, Illich oppose une contre-recherche : " Trouver des solutions de rechange face à l'automobile, l'hôpital, l'école et tout ce qui nous paraît indispensable à la vie moderne ". Je n'imagine aucun de nos politiques ou penseurs actuels, proférer de telles idées. Sont-elles pour autant sans intérêts aujourd'hui ? Je veux les accepter : elles me permettront peut-être dans quelques jours, quelques années, de voir plus clair sur ce qui est à proposer aux hommes de bonne volonté pour changer le monde ... Je m'aperçois en lisant attentivement chacune de ces lignes combien ses idées sont proches des miennes, déjà exposées ailleurs sans connaître ce bonhomme puisque ce n'est que maintenant que je prends connaissance de ses écrits. En effet, comme lui, je pense qu'il faut s'arrêter un temps pour penser ces institutions, ce qui ne veut pas dire, pour moi du moins, les mettre tous dans la moulinette du père Ubu, non, mais prendre le temps nécessaire d'imaginer d'autres voies, toutes aussi révolutionnaires qu'elles puissent paraître. N'ai-je pas évoqué à plusieurs reprises mon idée de mettre à la porte les députés et sénateurs de tous poils encombrants nos assemblées et coutant la peau des fesses…

 

68

Il faut donc remplacer ces politique-là, et peut-être bien d'autres, par des hommes et femmes intelligents, je pense aux étudiants, aux chômeurs, aux retraités, etc., de tous niveaux sociaux, et débattant justement de ces questions de société. Ils feront échos, dans ces hémicycles, de leurs expériences de la vie réelle et non comme ces hommes et femmes bien payés ne pensant qu'à garder leurs avantages en jouant au jeu de polémiqueurs professionnels et dont la parole n'entraine aucune conséquence. Cela est démagogue, j'en suis conscient, mais j'avoue ne pas porter en mon cœur ces gens de gauche et de droite s'envoyant la balle comme au théâtre les acteurs les répliques. Sur la pauvreté : le manque de capitaux dans le tiers-monde lui semble être la priorité. Lorsqu'un peuple réussit une politique donnée, cela ne veut pas dire qu'elle est celle qu'il faut suivre partout, dans tous les pays. Chacun doit étudier la meilleure façon de gouverner dans sa propre demeure, non en rapport à ce qu'il se fait ailleurs, histoire de mimer comme un singe devant, mais plutôt par rapport aux données structurelles de son pays…

 

69

Gouverner donc en fonction des us et coutumes, de la culture, des moyens économiques et sociaux mis à sa disposition … et de la nature de son peuple bien évidemment. C'est pourquoi la mondialisation est une catastrophe, tout le monde veut une voiture, là se joue la perte du monde, et donc des hommes. Comment continuer à vivre pauvre lorsque partout, à chaque pas fait dans la rue, dans chacune des images vues de la TV, les journaux, la richesse s'expose outrageusement avec ses produits tentants, qu'il faut avoir, qu'il faut porter. Qu'ils vous feraient voleur pour les obtenir. Voilà les vraies questions que je veux voir poser par nos assemblées et nos bancs d'écoliers. Cette contre-recherche est la source d'un réel changement, pas celui dont se glosent les prétendants à la Présidence de la République. 12 – Une constitution pour la révolution culturelle. Développement, sous-développement, pauvres, riches, partout traîne sur la terre, l'impossibilité à trouver le bonheur collectif, menant chaque homme à aimer l'autre comme lui-même, d'autant que s'aimer comme ça n'est pas donné à tout le monde, t'as qu'à voir quand les gens se regardent dans la glace, la tronche qu'ils font.

 

70

Ce qu'il faudrait, dit-il : " Au cours des dix années à venir, il faudra apprendre un langage qui ne parle pas de développement et de sous-développement, mais des idées vraies et fausses sur la nature humaine, ses besoins et ses possibilités ". Profitons de cette invitation à réfléchir autre chose, pour évoquer notre actualité à nous. On nous rebat les oreilles en permanence avec cette idée indiscutable et indiscutée qu'il faut de la croissance pour continuer à exister, au risque de mourir, et pour qu'elle soit cette satanée croissance, il faut construire des voitures, faut en vendre des millions et si les ventes baissent par rapport à l'année précédente, vite fait, on profite de l'occasion pour mettre  des gens à la porte, de préférence des ouvriers, pas les patrons, on en a trop besoin, alors ces rejetés brûlent des pneus tout neufs devant les caméras des TV du monde entier pour dire leur ras-le-bol, dire "on existe" et les autres répondent : " Brûler autant que vous voudrez, devant qui vous voulez, ça ne change rien à nos décisions, on vous fout à la porte, et basta, c'est nous qu'avons le pouvoir ! ". La télé, les journaux sont faits pour cela, dire au peuple " le pouvoir est de ce côté-là quoi que vous fassiez ".

 

71

Alors si vous voulez avoir la paix, faut acheter des voitures. Seulement acheter une voiture implique de prendre du crédit, et comme le marché de la voiture est en panne, les emplois deviennent de plus en plus rares et précaires, si par chance vous en avez un. Tout cela vous le savez parfaitement et il serait inutile de vous le rappeler ici, si… si… je n'étais convaincu que cette règle de toujours plus de croissance ne peut continuer indéfiniment. Ce système, s'il a connu une certaine logique raisonnable après la guerre, aujourd'hui rien ne le justifie puisqu'il nous a mis la tête dans le mur, avec principalement un déficit de près de deux mille milliards d'euros impossible à rembourser et dont les intérêts nous ruinent tous les jours un peu plus. Et nous voyons ces économistes, ces prof. d'économie, proférant partout leurs litanies, et plus gravement à l'intention de nos politiques, impuissants à trouver eux-mêmes la route à suivre, préférant se fier à cette philosophie implacable puisqu'elle est suivie partout, sans jamais être remise en cause, réévaluer son efficacité. Il faut donc la remplacer, mais par quoi ? Illich nous parle de la nature humaine, de ses besoins et ses possibilités.

 

72

Un grand projet politique ne doit plus se soucier de ces théories d'un autre âge, d'aucune valeur aujourd'hui, je dis bien aucune valeur aujourd'hui. Le premier souci serait d'abord et avant tout de faire en sorte que tout homme soit considéré en humain et lui redonner de la dignité en lui attribuant, lorsqu'il n'a pas de travail, un revenu à minima pour ne pas entrer dans la misère (600 € par mois) et un logement de 15 m2. Depuis plus de quinze années, je me bats pour cette idée et ici je ne peux faire autrement que de rappeler cette vérité : la misère est insupportable. Faut-il continuer à produire des voitures pour justifier je ne sais quoi, continuer comme avant ? Ma réponse est sans appel : Non, nous devons reprendre les rênes de notre grand et beau bateau (il n'y a pas de rênes dans un bateau ? peu importe), l'état doit définir les grandes lignes de ce qui serait bon pour son peuple, pas pour l'économie avec un grand É, mais pour les hommes, les femmes, les petits enfants, les jeunes de tous poils, les personnes agées… sans se soucier ni du marché, ni des règles de la Communauté européenne ou mondiale, car avant tout, nous devons sauver notre pays, et  par voie de conséquence le monde.

 

73

Quelles propositions pouvons-nous faire si la production des voitures n'est plus le fil d'Ariane de notre politique ? Reprenons l'idée d'un revenu+logement à minima attribué à tous chômeurs, tous exclus. Dans cette situation, l'individu concerné sera considéré non pas comme chômeur ou exclus, mais comme fonctionnaire attaché à l'état et pouvant bénévolement participer au bon fonctionnement de la société en ayant une action sur elle en donnant un peu (ou plus) de temps aux taches qu'il pourra assurer. Par ce moyen-là, nous pourrons considérer qu'il n'y a plus de chômeurs, plus d'exclus dans notre pays (nous tiendrons compte que certaines personnes ne peuvent envisager de travailler, nous devons l'accepter) puisque tout individu bénéficiant de cette situation sera considéré comme affecté au service de l'état. Deuxième point, les services de nos administrations employant beaucoup de monde actuellement pourront, petit à petit, ne pas remplacer ceux qui partent à la retraite et mettre à leur place cette population moins couteuse. Alors j'entends déjà des cris d'orfraie me reprochant par ce système réduire les emploies "normaux", je leur réponds : nous n'avons pas d'autres choix…

 

74

Nous devons réduire les dépenses d'une façon draconienne. Que ces hommes et femmes soient considérés fonctionnaires dans notre "système" n'empêche pas de faire du bénévolat ailleurs dans le secteur privé. À noter qu'il y a actuellement en France près de douze millions de bénévoles s'activant dans des associations, cela est la preuve que travailler pour rien n'est pas une idée folle, au contraire, faire quelque chose qui plait donne du sens à sa vie. Donc de la main-d'œuvre à bas cout (sic), même si ces individus ne travaillent qu'à mi-temps ou à quart de temps. Mais comment payez-vous tout ce monde ? En faisant des économies sur les dépenses inutiles d'aujourd'hui attachées à ces millions d’hommes et de femmes vivant l'horreur de la misère, des économies sur tout, et nous allons prendre notre temps pour les débusquer, faites-moi confiance ! Ceci est un grand changement, radical probablement, mais que pouvons-nous faire d'autre ? Alors, avançons maintenant. La question de vendre à tout prix toujours plus de voitures est à reconsidérer puisque la voiture pollue, et la pollution un truc qu'il faut enrayer si j'ai bien suivi les débats sur l'environnement. Comment réduire le besoin de voiture ?

 

75

Tout faire pour réduire les déplacements professionnels. Faisons en sorte pour rapprocher le travail au logement, ou le logement au travail. Je sais la chose pas facile, mais dans beaucoup de cas nous pouvons l'envisager. Vous avez tous remarqué que certaines villes utilisent la bicyclette pour réduire les voitures, alors pourquoi nous fait-on c… avec cette question des ventes qui baissent chez Renault, Peugeot et Citroën ? Toute l'économie est basée sur la consommation : plus les gens consomment, plus il y a du travail, plus c'est super, seulement posons-nous la question de là où nous a mené cette philosophie ? À pas mal de choses positives, mais aujourd'hui, faut que ça change, puisque nous sommes au bord du gouffre, pour ne pas dire en faillite. Vendre moins de voitures c'est mettre des hommes au chômage. OK, ça on le sait, on regarde la TV tous les jours, merci, ce qu'on ne sait pas c'est qu'ils peuvent être employés aux réels besoins de la population, par exemple, et cela est de la plus grande urgence : construire et rénover des bâtiments appartenant à l'état, pour aménager des espaces de 15, 30, 45 m2 etc. selon l'importance des familles à loger. Ça, c'est la première des choses à faire. Loger tout le monde.

 

76

Par ailleurs ces populations ayant souffert pendant des années de trop de pauvreté, ont obligatoirement des séquelles qu'il faut essayer de soigner le mieux possible. Il faudra donc des services hospitaliers forts pour assurer cette réparation d'un système n'ayant pas toujours fonctionné comme il aurait fallu. Loger et nourrir tout le monde, même sans-travail, est une idée révolutionnaire, j'en suis conscient, ce ne sera pas facile à faire avaler à beaucoup, seulement je rappelle que cette solution permettra à tous de ne plus avoir peur de se trouver sans travail, sans revenus, et parfois à la rue. Cette peur est ressentie par 50 % de la population, c'est effrayant ! C'est la preuve que l'insécurité est ancrée en chacun de nous, nous qui vivons dans un pays dit riche. Avec ces mesures, il n'y aurait plus cette peur, nous vivrons "en famille", et pas dans le "tout pour moi, rien pour les autres". Les bonnes intentions que vous lisez ici ne sont pas garantes de leurs efficacités dans le réel, j'en suis conscient. Un penseur n'a pas les manettes de la bombe atomique ! Un penseur doit aller au bout de son idée, de ses idées, son travail est un matériau pouvant aider les hommes de pouvoir à s'en inspirer… ou pas !

 

77

La solidarité sera effective et ce label : "Liberté, égalité, fraternité" retrouvera du sens et de la dignité humaine. Sortez les trompettes du Quatorze Juillet et les fleurs tricolores pour accompagner mes rêves d'un monde meilleur… Mais revenons à nos moutons, à nos autos chéries. Si les usines ont moins de voitures à construire, pourquoi ne pourraient-elles pas réparer les anciennes pour leur donner une nouvelle vie ? Pourquoi ne pourraient-elles pas construire autre chose dont nous avons réellement besoin et que nous faisons venir d'ailleurs, par exemple, les nouvelles technologies, les matériaux préfabriqués du bâtiment, etc. Il y a en France des milliers de personnes dont les idées magnifiques nous sauveraient des pires catastrophes. Qui leur donnera la parole ? Personne, pourtant il nous faut des solutions pour répondre aux besoins (primaires ou secondaires) de chacun. À la longue, cette politique aura pour conséquence de créer deux grands groupes sociaux, ceux vivant dans le système avec des moyens "normaux", et les autres, à la marge, autrement, avec moins de ressources, mais ne crevant pas de faim, ni mourir à la rue, ce qui est l'objectif premier de ce dispositif.

 

78

Vous devinez tous qu'il s'agit là d'une révolution, mais pour moi la révolution n'est jamais liée à la violence, elle doit entrer dans le mental de ceux qui vous écoutent, et petit à petit, les choses prennent leur place, obligatoirement. Je ne fais là que lancer un pavé dans la marre, n'étant pas autre chose qu'un artiste. Et que peut un artiste, un penseur ? Pas défiler dans les manifestations,  pas prendre la parole dans les médias à tout bout de champ, non, son temps est trop précieux à chercher, à faire avancer sa pensée qui est si lente à accoucher de nouvelles idées, surtout lorsque son corps malade réclame de l'attention pour ne pas crever, pour continuer à vivre comme un Dieu. Chez moi, ces combats ne sont pas nouveaux, ils sont ce que je suis, ils sont là pour dire ce que ne peuvent formuler ceux qui vivent en bas de l'échelle sociale, car ne maitrisant ni la langue ni les concepts, eux n'ont pour seul bagage que leur colère, la fameuse violence dont il va être question ici. Lorsque vous êtes dans la misère, quelles réactions pouvez-vous avoir dans ce monde de consommation ? Monde que je préfère, et de loin, au manque de tout ce qui fait qu'on est un être humain vivant dans cette société-ci.

 

79

Jadis, nos parents et grands-parents, face aux difficultés du monde du travail, vivaient dans la résignation, ils étaient les esclaves travaillant pour l'élite et pour un salaire de misère, et tout cela paraissait à tous normal, entrant dans la norme du temps, de tous les temps. Mon père, par exemple, n'était rien d'autre : un travailleur manuel au service de grands couturiers parisiens dont les noms giclent partout sur les podiums des génies de la mode. Ceux-là mêmes qui aujourd'hui font don de leurs richesses à moult associations caritatives, hier payaient mon père au tire lancette, une honte quand j'y pense. À ces patrons-là, je leur crache au visage. Les multimilliardaires, de quoi se sont-ils enrichis et s'enrichissent encore, sinon de l'exploitation de ceux qui travaillent pour eux ? Et aujourd'hui, de toute part on les  craint, ils ont le pouvoir de foutre tout le monde au chômage, ils nous provoquent et demandent toujours plus, quelques soient les politiques en place, ils sont les maîtres… Faut qu'ça change, Faut qu'ça change ! chantait Boris Vian. Tous les syndicats servent le patronat qui préfère avoir affaire à des contrôleurs de tensions, plutôt qu'à la tension directe de ces hommes en colère.

 

80

Les syndicats sont là pour canaliser cette colère, la refouler, faire beaucoup de bruit, mais ne nous voilons pas la face, ce bruit est celui des militaires, des bottes de cuir sur le pavé : ceux des dominants. Je ne suis pas un militant et pourtant ici je prends la parole comme à la tribune d'une foule cherchant son chemin. Pas innocent pour un sou, encore moins naïf devant l'humain en général, mais faut pas pousser mémé dans les orties, la misère ras-le-bol, faut la résoudre, et c'est possible en trois mois. Et ne me parlez pas des moyens que cela couterait, nous dépensons trois fois plus pour un résultat quasi nul. Quel rapport y a-t-il entre le thème d'Illich sur l'enseignement et celui-ci de la résolution de la misère, en dehors qu'ils sont deux combats auquel je suis attaché depuis presque toujours ? à la vérité, les deux se tiennent la main comme deux frères. Lorsqu'on est passé à côté de la "bonne éducation", de la culture à l'école, la réussite sociale paraît difficile à se construire, bien que certains profitent de leurs échecs pour se trouver ailleurs, heureusement, et réussissent dans divers secteurs d'activités dans le privé, mais jamais dans le secteur intellectuel, puisque ceux-ci sont réservés aux diplômés.

 

81

Vous sentez, je l'espère, toute l'animosité, le fiel s'écoulant en moi, lorsque je parle de ces questions, elles me tiennent trop à cœur, car trop injustes, trop insupportables, et concernent des millions d'individus méritant mieux qu'une mauvaise note, mille fois répétée entre cinq et seize ans. Volontairement, je veux faire ressentir aux enseignants, aux profs de tous bords se prenant pour des saints qu'ils ne sont pas, combien leurs évaluations sont dévastatrices, non seulement pour les gosses dont ils ont la charge pendant un temps, mais des conséquences désastreuses sur ces adultes, de leurs agissements irresponsables. Noter un autre que soi est la pire des choses : personne ne devrait user de ce droit… Mon père donc, a subi l'autorité négative de ses patrons, mais obligé qu'il était de travailler pour nourrir sa famille, il avala des couleuvres comme tout le monde, mais pas longtemps, cherchant toujours des parades à  toutes les difficultés de la vie. Je vais vous raconter un peu le bonhomme. Rapidement, il fit le choix de travailler à domicile, ne supportant plus la promiscuité du monde du travail collectif, dans son métier de couturier dans le cuir, cela était possible ; je vous laisse imaginer la situation.

 

82

Nous vivions dans trente mètres carrés à six personnes, plus la machine à coudre et la table de travail de mon papa. Jamais nous n'avons souffert de solitude, il y avait toujours du monde chez nous, même des gens étrangers à notre famille, c'était la maison du Bon Dieu, la porte toujours ouverte. Seulement, cet homme n'ayant pu s'intégrer à la société de la réussite, entretint toute sa vie une haine profonde à l'égard de son prochain, haine refoulée, haine compensée par le jeu : il était champion de bridge.  Je me souviens de sa violence lorsqu'il voulait trouver une bonne raison pour sortir le soir sans l'assentiment de son épouse, ma maman. Pourquoi je vous raconte ça ? Quel intérêt ont ces confidences pour vous dire la violence des hommes ? Essayons tout de même d'aller plus loin. À ces clubs où il allait, il rencontrait ses propres patrons et des hommes, des femmes riches, alors qu'il était, lui, pauvre comme Job. Parfois, il revenait à la maison après avoir perdu le salaire d'une semaine de travail, parfois il avait gagné de l'argent ou des lots de verres en cristal de Baccara, c'est marrant de boire de l'eau du robinet dans une verre comme ça lorsqu'on est pauvre, une guitare électrique pour son fils ainé, moi.

 

83

Était-il plus violent qu'un autre homme ? Je ne le crois pas, et ne comprends toujours pas pourquoi je fais malgré cela cette association entre la violence lié aux ouvriers mécontents de leur sort, et mon père ayant écrit à sa manière l'essentiel de son existence, qui fut un pur échec, mais qu'est-ce qu'un échec ou une réussite, sinon la même chose ? Et puisque nous réveillons ici sa mémoire, alors permettez-moi d'aller chercher les quelques lignes que je lui ai consacrées il y a quelques années. " En 1954, il avait trouvé son premier emploi dans une cordonnerie orthopédique située dans cette rue. Je me souviens qu’il se plaignait d’avoir été exploité au maximum par ses patrons et du peu d’argent dont il disposait pour se nourrir. Il avait pris l'habitude d'apporter, pour manger le midi, du pain et du chocolat, alors que ses collègues ouvraient de grandes gamelles qu’ils réchauffaient dans un coin de l’atelier. Il éprouvait de la haine lorsqu’on se moquait de lui et de sa maigre pitance. Soit dit en passant, je le soupçonne bien aujourd'hui d’avoir pris son pied de cette situation où il faisait jouer aux autres le rôle de “riches”  et à lui celui de “pauvre”…

 

84

Comme nous habitions près des Halles de Baltard, nous récupérions à la fin des marchés certaines marchandises jetées sur le pavé en attente du service de nettoyage. Des tomates, des pommes de terre, des poires, des bananes, par cagettes entières étaient abandonnées comme mis à notre disposition, exprès, et nous, mon père et moi, nous les rapportions à la maison. Il n’y avait rien de pathétique là-dedans, nous le faisions, car d’autres le faisaient autour de nous, nous  n’avions pas honte, il fallait nourrir la famille et il était seul à travailler avec un salaire de misère. En 1958, à la sortie du métro Saint Paul, mon père tentait sa chance à la grande roue, (aujourd'hui encore ce genre de tombola existe toujours en plus des lotos et grattages en tout genre) on y gagnait des kilos de sucre et il arrivait parfois qu’il vînt à la maison avec cinq paquets que ma mère mettait derrière la gazinière où nous avions une réserve pour y déposer l’huile, la farine, les boîtes de haricots verts et de petits pois. Après, le sucre fut remplacé par des bons donnants droit à du chocolat, des paquets de bonbons et d'autres gâteries, puis à de vilains nounours, de quoi vous dégoûter de jouer à la loterie le reste de votre vie.

 

85

Mais enfin, soyons indulgents envers nos semblables et surtout à l'égard d'un homme ayant bossé toute la journée et voulant un instant se détendre le soir avant de rentrer chez lui. Avec le temps, il était arrivé à se faire des copains et ils s’amusaient tous à un jeu que je peux dévoiler sans remords, puisqu'il y a prescription... Lorsqu’une jeune femme entrait dans la boutique, que le patron y était absent, et voulait s’acheter une paire de chaussures sur mesure, il fallait qu’elle donnât ses empreintes pour préparer le modèle qui allait ensuite servir à la fabrication du soulier. La jolie personne de sexe féminin, l'idiote, devait se mettre debout sur un socle, une glace sans tain, appareil semblable à un pèse-personne en plus grand. Pendant ce temps-là, qui durait, durait, durait, les loustics descendaient à tour de rôle au sous-sol et regardaient les dessous de la jeune femme à travers cette glace piège. Conclusion : les hommes sont tous les mêmes ! Nonobstant cet avantage, il préféra travailler à domicile, car il supportait difficilement les autres. Je me souviens, un jour, j’avais acheté un magnifique coupon de tissu anglais pour qu’il me fît une veste à la mode.

 

86

Mon père s’arrangea auprès d’un de ses employeurs, Pierre Balmain, pour obtenir un modèle papier à ma taille, il coupa la pièce, l’assembla et me la fit essayé. Malheur à moi, j’avais trouvé à redire sur son travail. Alors, de rage il prit la veste et la mit en mille morceaux avec une paire de ciseaux toute neuve. Mais comme ce n’était pas un mauvais bougre, quelques mois plus tard, pour se faire pardonner, il me fit une superbe veste en cuir que j’ai longtemps portée. Merci Papa. À l’origine, il était cordonnier puis il s’est converti dans la fabrication des vêtements de peaux, il a travaillé pour Pierre Balmain et Jean Claude J3. Mon père, le travail, il le faisait, mais juste ce qu'il fallait pour vivre et jouer au bridge, ce n’était pas le genre à mettre de l'argent de côté où à se constituer un patrimoine immobilier. Maman et moi, nous allions livrer les pièces que monsieur fabriquait rue Saint Fiacre, je ne me souviens pas si nous prenions un taxi ou si nous y allions en bus ou en métro. Ses amis et lui passaient au moins trois soirées par semaine à jouer dans ces clubs de bridge. Ce qui m'a toujours étonné, c'est que mon père, étant pauvre, avait des amis très riches. Il a toujours aimé ça… Être pauvre était sa jouissance.

 

87

A quoi tout cela correspondait dans sa tête de champion de cartes? Et bien ce soir, avec votre permission, j'en resterai là, mais tout de même il faudra qu'un jour, j'essaye de comprendre. Il tenait une boutique de vêtements de peaux rue du Docteur Goujon dans le 12e. Tout au long de sa vie, il improvisa son existence comme il a pu, un jour, comme tous les hommes, à l'occasion de sa deuxième puberté, trompa ma mère avec son ouvrière travaillant avec lui durant huit heures d’affilée par jour et souvent six jours par semaine, jamais il n'aima autant le travail, puis il décida de partir avec elle en Italie, probablement à Venise, car Venise est faite pour ça et il nous laissa, nous, toute la famille, avec la boutique sur les bras. Maman prit les rênes et moi la machine à coudre pour confectionner, c'est con d'avoir des souvenirs aussi dégradants, mais enfin c'est la réalité toute crue de la vie, alors n'ayons aucune gêne, écrivons comme ça vient, pour la première fois de ma vie, je cousais avec sa machine, Lacan tait-toi, laisse-moi continuer sinon je vais craquer. Je cousais des morceaux de cuir en patchworks pour faire des housses de coussins que l'on mettait en devanture pour les vendre quatre sous.

 

88

Heureusement, Venise n'a duré qu'un temps et il revint, comme c'est souvent le cas avec les hommes en général, et reprit ses affaires, son travail, mais pas pour très longtemps. Il décida de jeter sa femme de la maison et la remplaça par la nouvelle, histoire d'occuper son temps et attendre tranquillement le jugement dernier qui n’arriva pas tout de suite, mais arriva quand même. C'était à l'Hôpital de la Salpêtrière, j'avais bien voulu y aller, mais j'étais resté dans le couloir à jacter avec mon frère, car les morts à vrai dire ce n'est pas mon fort, mais pas mon fort du tout ". Sur ça et pleins d'autres choses, il y a beaucoup à dire encore, mais laissons cela à plus tard et reprenons notre lecture de l'œuvre d'Ivan Illich. Il oppose les mots "développement" et "sous-développement" à des idées fausses concernant la nature humaine, considérant les premiers responsables de la violence, la répression et la rébellion. Ce qui me surprend dans son discours, c'est qu'il dégage de toute responsabilité les systèmes capitalistes et communistes. Toutefois  il voit des effets secondaires à ces organisations : elles détruisent ce qu'il y a d'humain dans l'homme… Alors, il propose un programme de rechange.

 

89

Enfin voilà du neuf, je tends l'oreille, ouvre grands les yeux, j'ai trop soif de propositions concrètes me donnant envie de croquer la vie à pleines dents comme un adolescent que je suis mentalement, mais mentalement seulement, puisque hier c'était mon soixante-sixième anniversaire. À la vérité, je suis tenté de mettre de côté cette lecture pour vous faire part de ma grande déception concernant deux livres sortis récemment sur la "Décroissance".  N'ayant pas de mémoire, j'oublie très facilement mes lectures passées, celles de tout à l'heure ou d'il y a dix ans, pathologie qui a quelques avantages, mais là, je me suis souvenu, au bout d'un moment de lecture, avoir déjà connu une déception sur ce mot-choc, et le revoilà remis au gout du jour puisque la "croissance" se délite gravement actuellement. Gourmand, je me suis jeté sur ces deux produits de la maison d'édition "Utopia", et tristement je n'ai trouvé aucune proposition concrète pouvant satisfaire mon appétit. Par contre, les critiques de notre société n'ont pas manqués, c'est d'ailleurs le corps central de ces livres nous prenant pour des imbéciles. Aujourd'hui, j'attends quoi d'une pensée nouvelle sur le sujet ?

 

90

La "décroissance" est un mot pris en otage par certains, maitrisant parfaitement l'art de dire fort ce qu'ils croient être entendu, par ces auditoires avalant tout ce qui est dit ici, puisque provenant d'hommes criant leur aversion pour cette société. J'attends des hommes ayant une expérience de la vie, et une grande honnêteté, un esprit philosophe, peut-être même poétique, avec les pieds sur terre et la tête à sa place. Philippe Dessertine a trouvé ma préférence. J'ai alors acquis rapidement plusieurs de ses livres, et au lieu de m'y plonger pendant des heures, j'en ai fait un  tas posé dans un coin de ma bibliothèque. Cette façon d'agir n'est pas nouvelle chez moi, je consacre mon temps à parcourir, puis ranger les livres, les revues, les journaux peu intéressants, avant de me consacrer aux choses essentielles, ainsi je perds mon temps à éliminer… Bizarre, bizarre, pourquoi est-ce ainsi ? Il est possible que, si je me plongeais dans les livres de Dessertine afin d'obtenir de bonnes pistes pour alimenter ma curiosité, mon intelligence, cela m'angoisserait, me fasse peur… Étrange comportement que le mien ! Mais bon, pour l'heure il m'est difficile d'analyser ça plus précisément.

 

91

Il dit "Le révolutionnaire de la culture mise sur le futur". Peut-on penser un futur meilleur pour nous ou nos enfants ? Meilleur, je ne sais pas, car meilleur veut dire demain sera mieux qu'aujourd'hui, alors que l'on se trouve dans une situation des plus précaire pour l'avenir. Lorsqu'on sait l'état de ce monde, le chaos n'est pas loin. Illich soulève aussi la question des possibilités des minorités à réussir dans le milieu scolaire, tout le monde sait ce qu'il en est, mais tout le monde se tait. Paradoxe de paradoxe, notre gouvernement vient de repousser les premiers stages à 15 ans alors qu'ils étaient à 14 ans depuis quelques années. Je pense qu'il faut cesser de se voiler la face,  certains enfants, beaucoup peut-être, ne sont pas faits pour cette école-là, il faut trouver d'autres moyens, d'autres lieux plus appropriés à leurs situations psycho-économiques-sociales et familiaux, lieux leurs permettant de se réaliser vraiment plutôt que de les laisser végéter, histoire d'avoir bonne conscience et les laisser loin du marché du travail, trop encombré déjà sans eux. Ces jeunes sont confrontés à des échecs scolaires à répétition et cela depuis le premier jour de leur présence au sein de ces établissements…

 

92

… C'est là la principale raison de mon désir de remettre en cause "L'école de la République" dans son ensemble… comme lui l'a fait, en son temps, pas si lointain. Ivan Illich nous parle des sommes de plus en plus importantes consacrées par les pays pauvres à l'éducation, mais cette question doit-elle être posée dans nos sociétés riches, pas si riches, si l'on considère le déficit exorbitant qui ruine gravement les fondements mêmes de nos pays dits développés. Pour détendre l'atmosphère, je vous propose cette image qu'il donne de l'école : "L'école est comme un habile escroc qui aurait vendu un billet pour un strapontin d'autobus, mais qui n'irait nulle part…", autre image : "Tel pays fait songer à une personne qui serait au bord du suicide parce qu'elle aurait abusé de tranquillisants", c'est d'une actualité donnant le frisson... Dans son film "Les enfants", Marguerite Duras fait dire à son écolier qui ne veut plus mettre les pieds à l'école : "Je ne veux plus y aller car là-bas on veut m'apprendre des choses que je ne connais pas". Lors d'une interview, elle insiste beaucoup sur cette phrase et dit qu'il faut la penser sérieusement. Que veut-elle exprimer par là ? Je ne sais pas vraiment, mais pour moi …

 

93

… Ces mots disent que les gosses aimeraient qu'on leur apprenne des choses les concernant et non ce charabia qui n'a aucun rapport avec leurs vies réelles. Elle propose implicitement une école pragmatique, plus proche des problèmes que ces enfants rencontrent à chaque instant, tous les jours, où ils ne trouvent nulle part de solution, de porte de sortie pour comprendre l'incompréhensible comportement des hommes qui les environnent. Visionnant le documentaire sur son film "Détruire, dit-elle", tout à coup je prends conscience de l'intérêt qu'il y a à se servir des vidéos pour écrire, découvrir comme un gosse ses jouets, les multiples possibilités qu'offre cette technique, et entre autre, nous approprier une œuvre, en créer une autre à partir d'elle, cela est valable pour n'importe quoi, un documentaire, un film, une pièce de théâtre… l'essentiel étant de sortir de soi ce qui est à l'intérieur, évacuer notre intelligence, et notre bêtise aussi. Duras dit : "Je suis pour que l'on ferme toutes les facultés, toutes les universités, toutes les écoles… profondément, on recommence tout…". En proférant ces mots son visage s'illumine, son sourire devient d'une générosité quasi maternelle...

 

94

Marguerite dit ça pour le bien des humains, sans aucun doute ces mots sont les siens muris depuis longtemps. "Détruire, dit-elle" c'est ça, c'est mon livre, le départ à zéro, je suis pour qu'on oublie l'histoire, l'histoire de France, l'histoire du monde, complètement, qu'il n'y ait plus aucune mémoire de ce qui a été vécu, c'est à dire de l'intolérable, sur tous les fronts, sur tous les points, tout casser. Dans "Détruire" j'essaye de situer le changement de l'homme, le stade révolutionnaire au niveau de la vie intérieure. Je crois que si l'on ne fait pas ce pas intérieur, si l'homme ne change pas dans sa solitude, rien n'est possible, toutes les révolutions seront truquées, ça, je le crois profondément…" Je suis ravi de trouver, maintenant, au bon moment, le témoignage de cette femme que j'aime beaucoup, remise en cause permanente, comme ce travail sur l'école vu par Ivan Illich, vu par moi aussi modestement que possible. J'éprouve du plaisir à entendre sa voix dire cela, j'ai l'impression qu'elle a lu cet Illich dont je ne savais rien il y a encore trois mois, et dont je ne sais si à la longue je l'accepterai pour modèle, ou bien le rejetterai-je pour des défauts que je ne supporterai d'aucune façon.

 

95

Passer de Marguerite Duras à Fidel Castro, via Illich, n'est pas un hasard fortuit. Castro " propose : "Une politique de déscolarisation pour devenir un laboratoire de recherches de meilleures solutions éducatives". Pour les Cubains le travail au service de la communauté peut être une voie pour ces enfants. Également, je relève cette phrase que nous devrions nous poser aujourd'hui, parce que trop de choses paraissent aller de soi ou presque : "Une illusion consiste à croire que le savoir est le résultat unique de l'enseignement." Si nous pensons cela, nous sommes d'horribles dictateurs et complètement à côté de la plaque. "La plupart des êtres apprennent leurs conceptions personnelles, leur savoir, leur compétence à l'extérieur de l'école." Arrêtons-nous ici : que peuvent les institutions devant cette vérité ? Nous savons tous comment fonctionne la psychanalyse. Elle est basée sur l'écoute de la parole de l'autre, afin de lui permettre d'aller plus loin, d'avancer dans un cheminement personnel. Pourquoi l'école ne pourrait-elle pas agir sur ces mêmes bases, plutôt que de rester, inconsciemment, sur un schéma plus proche de l'exercice militaire que d'une séance psy.

 

96

Et qui dit écoute, dit laisser dire, même ce qu'il ne faut pas, sans jamais porter de jugement, encore moins une évaluation ou pire, une note. Vous avez tous lu mes textes " Pour l'abolition des notes à l'école ", il n'est donc pas nécessaire d'en rajouter ici, puisque je me suis promis d'éviter les mots d'hier pour en trouver d'autres dans le cadre de ce travail. La scolarisation est-elle un mythe ? Pour être clair, Illich est contre l'école obligatoire, il veut laisser chacun choisir selon son cœur, et il met à la poubelle, sans le savoir, notre fameux "socle commun de connaissances et de compétences", ouvrant grand la porte de la caverne d'Ali Baba, à défaut celle de l'ANPE, car avec ça aujourd'hui tu as quoi ? Faite en sorte que les diplômes ne l'emportent pas toujours sur la compétence. Pourquoi ne pas envisager un plan des métiers dont nous allons avoir besoin dans dix, vingt, trente ans ? Et préparer les jeunes à leur avenir dès que possible sans faire de grimaces dès qu'il s'agit du "travail", mot trop négatif dans la mémoire collective insouciante. Les enfants doivent obligatoirement acquérir le "socle" sinon le château de cartes s'écroule et nous serons alors dans de beaux draps.

 

97

Il est drôle de lire cette proposition : " Consentir des avantages aux entreprises qui formeraient ces jeunes…" lorsqu'on sait à ce jour les pièges des stages, des CDD plus ou moins non rémunérés, et permettant une exploitation à peine voilée.

 

LA SOCIETE SANS ÉCOLE.

En 1970, Internet n'existait pas encore, mais lui, Illich, imagine :" De véritables "réseaux de communication" à dessein éducatifs par lesquels seront accrues les chances de chacun de faire de chaque moment de son existence une occasion de s'instruire, de partager, de s'entraider… " Les idées prémonitoires existent, la preuve ! Pour l'avenir, ce qui importe à l'école, si elle doit continuer à survivre, n'est pas d'apporter des connaissances, du savoir, mais d'apprendre à gérer les masses d'information à notre disposition partout où la culture a sa noble place (Internet, théâtre, cinéma, livres…)

1 – Pourquoi il faut en finir avec l'institution scolaire. Soyons sérieux un instant. Peut-on imaginer ne pas envoyer nos enfants à l'école, à l'hôpital s'ils sont gravement malades ?

 

98

Dans le cas où ces gosses sans écoles ne trouveraient pas leur place dans la société, nous nous sentirions insupportablement coupables, et plus encore, si leur santé s'aggravait à cause de ces concepts révolutionnaires acquis dans ce livre d'Ivan Illich. C'est là où l'on prend conscience de la différence qu'il y a entre la théorie et la pratique… Mais que cela ne nous empêche pas d'avancer, encore et encore, car il ne s'agit pas ici de savoir, d'acquérir des connaissances, mais d'entrer dans le vif du sujet, au cœur de la culture comme mode de vie, ancrée en nous et non de rester à la surface de notre potentialité à nous mentir à nous-mêmes. Hier n'est jamais mieux qu'aujourd'hui, mettez-vous bien cela dans la tête, sinon nous risquons de pédaler dans le yaourt vous et moi longtemps. Lui, rappelle les temps heureux où les pauvres n'avaient de la naissance à leur mort qu'une seule maison et au moment fatal qu'un seul recours : l'Église. Alors que maintenant ces mêmes gens passent de leur maison natale aux HLM déshumanisés (c'est moi qui rajoute…) et se font enterrer à l'hôpital après mille soins sans succès. De tout temps on a parlé de pauvreté comme si elle était liée à l'existence même du vivant…

 

99

Il est préférable d'être pauvre ici plutôt qu'ailleurs... Curieusement, partout les pauvres se taisent et ne sont jamais représentés ni par des syndicats, ni par des manifestations monstres à l'image de l'horreur qu'elle représente. Dans nos sociétés "riches", le pourcentage de cette catégorie sociale est relativement faible, et il ne serait pas compliqué de résoudre cette injustice si seulement les gouvernements le voulaient. Mais pour résoudre cette équation, les décisions à prendre font peur : elles risqueraient d'encourager un désir "d'assistanat" de la part de ceux qui aujourd'hui sont, tant bien que mal, dans le système. Alors que devons-nous repenser ? Est-ce au niveau de nos valeurs qu'il faudrait aller voir ? Illich relève qu'aux Etats-Unis, dans les villes, la pauvreté coute cher et suscite la colère, il propose une révolution des institutions. Hi, hi, hi, et moi qui propose de mettre à la porte tous les députés et sénateurs coutant des sommes faramineuses afin de les remplacer par des bénévoles, de tous âges… Mais peut-être en ai-je déjà parlé ici et vous vous dites, il radote ce bonhomme ! Un bon pédagogue doit se répéter inlassablement pour se faire entendre, dit-on.

 

100

Nonobstant, il constate que l'assistance de toute nature que les institutions américaines assurent aux exclus ne fait que conforter les pauvres dans leur statut d'assistés, ils n'en sortent pas de peur de ne plus recevoir "ces bénéfices secondaires" de leur sale situation. Bruno Bettelheim a parlé de ça au sujet de ses malades trouvant des "avantages" à ne pas être comme tout le monde. C'est en acceptant cette réaction toute naturelle que l'on peut, petit à petit, aider l'autre à retrouver son chemin dans ce monde, et non dans un univers "imaginaire" trop destructeur. Autant ce fameux imaginaire, cet esprit de création est bien venu, car il fait partie de l'inconscient et nous n'avons pas d'autres choix que de l'accepter positivement, autant dans certains cas, certaines situations, il détruit, ravage tout sur son passage. C'est là dedans que les pauvres, les malades, les exclus baignent tristement. Parfois je suis surpris par les idées étranges proférées par Illich : "… c'est seulement en cessant d'allouer des crédits aux institutions de santé, d'éducation et d'aide sociale que l'on peut mettre un terme à l'appauvrissant résultat de leurs effets secondaires destructeurs"…

 

101

À quoi pense-t-il en avançant une telle proposition, que voit-il dans cette nouvelle situation où les pauvres n'auraient rien de la part de la société qui les a tout de même mis dans cet enfer ? Les voit-il rebondir pour survivre ? Rebondir, oui, mais non pour survivre, mais pour mourir ! Pourquoi ne pas changer de position l'objectif de nos caméras malades, incapables de penser autrement ? Pourquoi ne pas imaginer que de "ces pauvres" nous avons tout à gagner ? Il dit : " Les écoles assurent la garde des enfants, leur "endoctrinement", elles sélectionnent les rôles que leurs élèves tiendront dans la société…" J'aime bien cet "endoctrinement", ce mot j'aimerai le lire de la plume d'un de nos intellectuels actuels, ne cherchez pas, vous ne trouverez personne. C'est là qu'on s'aperçoit de la liberté d'écriture de cet homme ayant pourtant mal commencé dans la vie, puisqu'il a fréquenté au plus haut niveau la sphère de l'Église... Que celui qui n'a jamais fauté me lance la première pierre. Serait-il douteux de se poser la question : - l'école pour tous, est-elle encore d'actualité ? Je la pose sans toutefois en chercher de réponse, de peur de ramasser la foudre de la majorité de mes lecteurs...

 

102

Malgré tout, il ne me sera pas interdit d'avancer que cette école, ces écoles, ne sont pas bonnes pour tout le monde, et qu'il est urgent de mettre chacun au bon endroit, car partout la colère gronde et ne demande qu'à exploser. Quoi, quoi, quoi, l'école serait le pourvoyeur de la violence de ce monde ? Comme vous y allez, le monde est ainsi fait, imparfait depuis toujours et rien ne le changera, rien, pas même nos bonnes intentions. Nous l'avons tous constaté ici, vous et moi, je me fais l'avocat des pauvres, des malchanceux, des nuls de "l'école faite pour l'élite", laissant de côté une majorité de nos enfants, fonctionnant pas trop mal dans cet enseignement-là, et dont certains, suivez mon regard, veulent voir disparaître…(sic). C'est qu'en fait l'institution est toute à leur disposition, malgré le "gauchisme" des enseignants, ce qui est étrangement paradoxal quand on y pense… Jadis, l'école apportait des connaissances aux gosses, elle était faite pour ça. Aujourd'hui, ces savoirs nous les avons à portée de nos mains, de nos claviers, de nos écrans, et les besoins ne sont plus les mêmes. Mais qui pense à changer le "fond de commerce" de ses certitudes ?

 

103

L'argent consacré à l'éducation pourrait l'être pour les parents et leurs enfants, car les désastres que connaissent les petits du fait de l'incapacité de certains adultes à vivre, tout bêtement, dans le milieu social qui est le leur. Mille fois je me suis demandé comment font ces enfants partagés, entre ce qu'ils vivent chez eux, no man's land infernal, et ce qu'ils doivent composer avec le milieu scolaire, leurs camarades, dehors. Toutefois, je n'irai pas, comme certains, dire que l'école depuis qu'elle existe n'a pas servi les pauvres. En proférant ces mots, je pense à mon parcours personnel, puisque mes parents étaient pauvres, et donc implacablement manuels professionnellement. Ce ne fut pas mon cas, mais le dois-je à l'école ou à la chance d'avoir croisé dans mon parcours et l'art et des gens m'ayant sauvé, tout simplement. Une question : - Et si le cout de l'éducation et des soins médicaux étaient trop élevés par rapport aux moyens de nos sociétés actuels ? Dans ce cas, quels choix serions-nous amenés à faire, quelles économies envisager ? Seulement il est trop tard, nous ne sommes plus, depuis longtemps, dans la posture à étudier cette direction-là.

 

104

Nous devons urgemment trouver les nouvelles bases d'une organisation sociale plus proche de la radicalité que du sparadrap pour survivre. Peut-être, inconsciemment, je ne fais que cela en écrivant, mais les artistes ne sont pas des politiques, ils disent souvent l'essentiel avant tout le monde, ils plantent des oignons espérant voir un jour des fleurs jaillir dans la terre des hommes. Revenons, si vous le voulez bien, au cout de cette éducation, coupable ici de tous les mots. N'empêche-t-il pas de mieux s'occuper à sortir le peuple de la misère, origine des échecs de toute nature ? À ces mots, mettant en avant, leur légitimité, tous les fonctionnaires, toutes catégories confondues, se lèvent en cœur, comme un seul homme, pour me jeter dans la trappe à merdre du père Ubu. Maintenant, reconnaissons à l'école le grand avantage de ne pas nous faire tomber dès le plus jeune âge dans les filets du travail du pater tout puissant… En effet, cette institution protège de l'exploitation, sous toutes ses formes, d'êtres sans défense. Je trouve, dans ces écrits datés de plus d'un demi-siècle, cette faille des universités : les grandes écoles sont fermées aux non-diplômés…

 

105

En fermant la porte à tous les nuls, ces lieux d'enseignement supérieur se protègent de ceux qui pourraient avoir une vengeance à prendre envers ces profs les ayant mis sur le banc des irrécupérables. Ils leur retirent la possibilité de trouver une planche de salut, de dignité, d'intelligence et pourquoi pas un emploi meilleur. Aujourd'hui cela est moins d'actualité quant au fond, certes les portes de la Sorbonne sont fermées, pour raison de sécurité dit-on, mais nous avons mille autres moyens de nous élever grâce aux livres, journaux, revues, musées, bibliothèques, théâtres, cinémas et surtout, surtout l'Internet de tous les possibles, grosse Mama généreuse, pleine d'avenir, et presque entièrement gratuite. Aujourd'hui, l'école devrait être, doit être un lieu d'apprentissage où il serait possible de tout essayer, de faire des erreurs (n'est-ce dans l'erreur que les grandes découvertes se sont révélées ?), sans jugement aucun, sans notes, sans évaluations, mais qui vous écoute, qui prend conscience de cette implacable vérité ? Bien entendu nous ne proposons pas le chaos, nous savons parfaitement que pour assurer tel ou tel métier de la vie courante, il faut en avoir la capacité…

 

106

… D'où l'obligation d'établir des règles précises afin de jauger la compétence des postulants, mais l'un n'empêche pas l'autre, je vous donne cette devise que je fais mienne ce matin : "Seul compte l'amour de son prochain", mots dits par un autre que moi dont j'ai oublié le nom... Tout le monde connaît l'existence de castes en Inde, curieusement, ils ne sont pas l'exception, ils sont le reflet de ce que l'on peut voir partout. De tout temps les sociétés se sont organisées pour former des groupes d'hommes et de femmes bien définis, repérables, des catégories, des stéréotypes même, dont la raison d'être, la fonction est de voir au premier coup d'œil à qui on a à faire. Je me souviens, dans les années soixante, de la révolution qu'à consisté la création du "Club Méditerranée". La nouveauté de cette vaste affaire qui allait devenir mondiale était le fait d'avoir mélangé les gens, les catégories sociales, professionnelles, mis dans le même sac ces vacanciers près à tout, et même au bonheur, parole de Gentil Membre, et lorsque vous étiez dactylo ou ouvrier chez Renault, vous aviez la possibilité de vous frotter aux millionnaires de l'époque.

 

107

Au Club'Med, vous buviez tous dans le même verre et mangiez dans la même gamelle, à la même table, dans une communion enfin retrouvée, originelle, parfaite, où l'amour devenait possible, entre personnes à poil, mais attention, uniquement dans ce cadre-là, ce temps des vacances, ce temps des cerises sous les cocotiers de Bamako. "Beaucoup continuent à croire, à tord, que l'école mérite la confiance publique, qu'elle remplit ce rôle, alors même qu'elle n'est plus que la détentrice d'un monopole et que, loin d'égaliser les chances, elle en assure la répartition." Illich, va très loin dans sa réflexion puisqu'il demande l'interdiction pure et simple des signalements du passé scolaire de chacun, de l'appartenance politique, religieuse, des origines familiales et des habitudes sexuelles. Tous programmes d'enseignement part d'un principe abject, ridicule, qu'un gosse, lorsqu'il arrive à l'école, ne sait rien et a donc tout à apprendre, tout absolument tout. Comment cette croyance, d'une naïveté, d'un manque de respect pour l'histoire personnelle de chaque être humain, du manque de connaissance de la psychologie de l'enfant, peut-elle encore trôner sur l'estrade de nos classes du vingt et unième siècle ?

 

108

Comment des adultes ayant fait de longues études n'ont-ils pas cette liberté à minima de dire "non-je-ne-marche-pas-dans-cette-combine". Comment ne comprennent-ils pas qu'ils ont devant eux des êtres aussi différents les uns des autres que le tracé des empreintes d'une main ? C'est qu'en fait, il ne leur est pas permis de mettre en cause quoi que ce soit de ce qui leur a été enseigné, au risque de perdre le fil conducteur de leur maigre illusion de pouvoir, et plus encore, de perdre leur emploi, et ce risque, qui veut le prendre lorsqu'on a consacré toutes ses études et sa jeunesse à ça ? Comme toute chose à ses effets pervers, dans ces établissements, on prépare des hommes à la vie, mais d'une façon abstraite, souvent obscure, et tout cela afin de compliquer ce qui pourrait être simple, compliquer toujours compliquer, mettre des barrières partout, voilà le but de l'école : sélectionner le bétail, mettre des notes, trier, trier, trier. Ah ! que la liberté a du mal a trouver sa place, ici comme ailleurs… Grrrr comme tout cela est compliqué. Pour écrire la pensée d'Illich et la mienne par la même occasion, je suis installé, aujourd'hui dimanche, dans un endroit fort plaisant…

 

109

 

C'est un peu plus qu'un bistrot, un peu moins qu'un restaurant, une brasserie, c'est EXKI.

Cette chaîne de restauration rapide offre de très bons produits, leurs plats et leurs boissons sont variés, bons, bio pour la plupart, tartes aux gouts savoureux, comme me l'a confié un habitué se faisant bécoter par sa copine devant moi, ce qui ne gâche rien, et les prix forts modiques dans l'ensemble.  Là, je peux m'y rendre sans craindre de me rendre malade, ma santé étant de plus en plus fragile surtout au niveau de la digestion. Cet endroit est situé à deux pas des cinémas MK2 qui maintenant a retourné sa veste en nous proposant 80 % de films américains, de la BNF, où je ne vais plus, trop fatigant pour quelqu'un qui a du mal à marcher. Sur le banc de cette cantine, sont installés des gens comme moi, à écrire avec un Bic, une plume, ou bien à frapper sur leurs iPad, iPhone, ordis, utilisant ce WiFi ayant révolutionnée nos vies, plus encore que cette putain d'école qui ne sert plus à rien ni à personne. La police, par la porte grande ouverte, se dirige vers moi, me regarde les yeux dans les yeux, je comprends, c'est la Stasi à l'action voulant tout bonnement remettre de l'ordre dans cette liberté de parole que j'utilise impunément.

 

110

Et le mot "Motivé" fut lancé. Si l'on est motivé l'apprentissage se fait sans effort. Poussé par la curiosité, nous entrons dans le meilleur des mondes, celui du nirvana. Alors, pourquoi l'enseignement ne serait-il pas basé sur cette réalité ? Pourquoi ne faudrait-il pas en permanence chercher ce qui va motiver, intéresser, aider chacun dans ce travail ? Alors, cette démarche deviendrait à la longue une philosophie, un mode d'emploi pour vivre, même si cela est plus difficile qu'il n'y paraît. Trouver le bon livre ouvrant la porte à la lecture liée au plaisir, et non à des obligations bêtement scolaires… "Il faut douze années d'école pour être employé au service d'hygiène de la ville" dit-il. Je voudrais ici réagir à cette déclaration. Nous pouvons très bien concevoir une société où nous aurions des connaissances, des compétences, et avec cela, occuper un poste, un travail basique, pour gagner sa vie. Pourquoi ne pas croiser, et c'est heureusement parfois le cas, une caissière de super marché avec qui on a envie de partager autre chose que de la monnaie, un boulanger intellectuellement intéressant, un marchand de fruits et légumes vous parlant des pays d'origine des produits qu'il vend…

 

111

… Croiser un garçon de café passionné de philosophie, un enseignant aimant les livres. Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil, il ne reste plus qu'à remettre tout au bon endroit. Lorsqu'on a connu l'échec scolaire, les bonnes résolutions préconisées par Monsieur Illich étaient peut-être valables en son temps, là-bas en Amérique latine, mais ici, aujourd'hui, la seule règle faisant loi est : la "démerde", sinon quel autre choix ont ces rejetés quand tout se ferme autour d'eux, sans occupation ni argent, sans reconnaissance ni amour, quel autre choix que la malveillance sous toutes ses formes, et on peut les voir contrevenir aux règles sociales du "vivre ensemble" pour avoir été mis sur le bas-côté de la route, là où ils auraient pu jouer un rôle honorable, s'il n'y avait à l'origine et l'école et la famille dévastant le terreau de ces personnalités n'entrant pas toujours dans la norme. Je sais, je sais, parler, écrire est aisée, au quotidien le réel est tout autre, je vous l'accorde, mais penser le monde du haut de sa tour d'ivoire, loin de tous, est un moyen comme un autre d'accéder aux zones obscures de nos imperfections intestines, et mes objectifs, entre autres, sont aussi de vous distraire un peu.

 

112

À quoi sert l'école, quelle est sa fonction dans le cadre des règles de telle ou telle société ? Il nous est difficile d'imaginer un monde sans, nous y sommes attachés qu'on le veuille ou non,  car sans école, ce serait la fin de nos institutions, pensons-nous. Pourtant, ne faudrait-il pas mettre cette question au centre de nos réflexions, pour inventer, retrouver d'autres moyens d'aide à voir grandir nos enfants dans les meilleures conditions, et se réveiller de l'apathie générale, sortir de notre schizophrénie, ne pas mourir dans le désert des Tartares. Deux conceptions totalement opposées pourraient être discutées. La première serait de dire que la responsabilité des gosses est à la charge de leurs parents et puis basta, qu'il leur revient de les éduquer et les former selon leurs moyens, leurs cultures et leurs professions. Nous retrouvons là le schéma des castes dont nous avons déjà parlé. La seconde conception serait de mettre les enfants dès le plus jeune âge dans des cages à lapin, oh ! pardon, ma langue a fourchée, dans des institutions que vous nommerez comme vous voudrez et où ils évolueraient quasiment sans voir leurs parents, où si peu, et tout ça afin de ne pas être perturbé par ces adultes.

 

113

Ainsi enfermés, ces enfants ne seront nullement perturbés dans le bon déroulement du processus éducatif défini par les instances supérieures de l'état tout puissant. Voyez comme les idées peuvent paraître ridicules lorsqu'on cherche le meilleur pour l'élévation des hommes… Mais ne baissons pas la garde, ces graines seront un jour le fruit de notre futur, que j’espère pas trop catastrophique, quand on voit la tournure que prennent certaines choses que je préfère lire dans mon journal, plutôt que d'en parler avec vous, ne voulant pas détruire en nous ce lien d'amitié qui nous lie. Faut-il envisager l'école comme un centre vous préparant à l'avenir, avec en toile de fond un engagement dans un métier bien précis ? Ou bien, est-ce tout sauf ça ? Personnellement, si vous me demandez mon avis, tout serait basé sur "ce qui donne du plaisir". Hédoniste je suis, hédoniste je reste. Alors, je connais la chanson, on me rétorquera : - Et si leur plaisir est de ne rien faire du tout ou les imbéciles, que fait-on, monsieur art-psy ? S'ils sont dans cet état d'esprit là, c'est qu'ils s'ennuient dans votre classe. Ma réponse vous va-t-elle ? Je vous taquine, j'aime vous taquiner, mais je n'ai aucun doute sur un point 

 

114

Ce qui se passe entre les quatre murs d'une classe peut être passionnant, car les moyens mis à la disposition de tous aujourd'hui est d'une telle richesse que chacun est en mesure de trouver matière à se passionner pour une chose. Seulement, l'enseignement est par trop d'endroits une dictature impitoyable. À mes contradicteurs, je leur demanderais de m'expliquez la violence au sein des établissements scolaires,  sinon qu'elle est la seule réaction possible qu'il est donné à ces jeunes face aux rejets, aux évaluations désastreuses, aux mauvaises notes, qu'ils portent sur le dos depuis toujours comme les stigmates d'un crime qu'ils n'ont pas commis ? Plus grave encore, cette violence peut se poursuivre longtemps après le temps de l'école… car lorsqu'on y a goutté précocement, il est difficile de s'en passer, cela devient une drogue, et plus le prix à payer d'une mauvaise action sera chère, plus elle sera excitante… L'interdit, mes frères, n'est-il pas notre pain quotidien ? Et l'on voit des milliers de prisonniers se demander comment ils en sont arrivés à ce point de déchéance humaine. Que disent les statistiques ? Je n'en sais rien, mais …

 

115

Sans en être conscient, pour la majorité des prévenus, coupables ou non, l'échec scolaire de leur jeunesse remonte à la surface de leur vie, se transforme, comme un virus qui va se développer à la suite d'un choc, d'un état de faiblesse, en bulldozer que rien ne peut plus arrêter, l'homme se venge de lui-même. La violence vient de là, ne cherchez pas ailleurs, je vous l'affirme les yeux dans les yeux. Illich dit : "L'enseignement pour l'enseignement est une doctrine, et donc l'enfant est en résidence surveillée…" Il évoque en permanence que l'apprentissage d'un métier doit être associé à une activité créatrice. En effet, tous deux forment un couple idéal, complémentaire. Le premier implique la simulation des conditions du travail qu'on aura choisi d'exercer, le second sera le contre poids des contingences matérielles contraignantes de tout boulot. Que conseille-t-il face à la rigidité des "programmes scolaires", tant ce rituel est destructeur sur la créativité ? Il préconise l'équivalent des forums et réseaux sociaux actuels largement divulgués sur Internet, qui n'existait pourtant pas encore à l'époque : se retrouver en groupe pour parler de ce qui nous intéresse, nous concerne au présent et à l'avenir.

 

116

Pour avoir des idées révolutionnaires, il en regorge, j'en relève quelques-unes : créer des groupes de rencontre sur un thème donné, organisés dans des restaurants, des  grands magasins, les trains de banlieue… Il appelle cela des rencontres éducatives… Quel bonheur d'avoir dans un livre un homme osant l'excitation de la pensée à ce point. Prenons-en de la graine et avançons dans notre lecture. Vous êtes installé à la terrasse d'un café et à côté de vous se trouve une autre personne, avec ou sans livre sur sa table, il ne vous est pas interdit de le considérer en lui adressant la parole, et ainsi, commence un dialogue le temps de l'absorption de votre café et du sien, rien de plus, rien de moins. Cela est tout simple, pourtant nous ne le faisons que très exceptionnellement, au motif que cela passerait pour une invite à je ne sais quoi de pas convenable, sur un plan moral, quoique je ne vois pas ce que vient faire la morale ici lorsqu'il s'agit de sexualité. Quand cela m'est arrivé, je garde encore en mémoire ces rencontres, ces souvenirs fugaces, ces histoires évoquées, comme des images d'une vie condensée, en quelques minutes, en quelques mots, agréables à vivre, du moins pour moi, aujourd'hui.

 

117

Ainsi va la vie des hommes, chacun en son coin, son univers semblable à la nuit, au doux enfer de ses solitudes, et le temps passe comme les gesticulations du monde, impossible à éviter puisqu'elles sont le fondement même de ce qui constitue l'homo sapiens. Toutes les actions humaines ont pour objectif de réparer les maux d'hier, de trouver un mieux  au demain, à l'après demain, d'améliorer la marche du monde. Le temps passe et nous cherchons, les uns, les autres, à toucher le point d'achoppement de nos difficultés. Mais revenons à nos moutons, et lisons notre ami Illich. À partir du moment où il y a des gens avec diplômes, il y a obligatoirement les autres, les sans diplômes. Voilà la grande injustice d'un système nullement prêt à mettre la clef sous le paillasson. Et pour conclure ce paragraphe, je vous donne cette phrase fatale : "la lumière s'est éteinte depuis longtemps dans les écoles".

2 – Phénoménologie de l'école. "Voilà quelques fonctions de l'école : elle est gardienne des enfants, elle a la charge de la sélection, de l'endoctrinement, de l'instruction." Ne le voit-on pas ici aborder cette question de ce qui existait avant l'école ?

 

118

… De ce qui existait du temps de ma grand-mère, je veux dire depuis Adam et Eve. Vois un peu comme il faut procéder si tu veux un jour pondre quelque chose d'intéressant pour l'humanité. Alors voilà Illich parti à déblatérer sur l'école, plus encore que je ne le ferais moi-même, il fait valoir que la notion "d'enfant" n'existait pas jadis, et encore maintenant dans certaines contrées du monde loin de tout. Que pensent de cela les chercheurs travaillant sur le cerveau aujourd'hui ? Cette question tombe à pic, j'ai reçu ce matin le dernier numéro de "Sciences Humaines" traitant de cette chose. Mais de là où je suis, je ne peux vous en faire le compte rendu que vous attendez tous… Je le ferais une fois rentré chez moi. Tout d'abord on nous explique que le cerveau dès le plus jeune âge entre dans un processus statisticien, c’est-à-dire qu'il va observer ce qui se passe dans mille circonstances pour mieux anticiper ensuite ses actions au pif, au feeling. "Penser, c'est prédire" et ça, bien avant l'école maternelle. D'autres étudient l'esprit humain forgeant des catégories mentales, les classent, les imaginent, inventent et interprètent les situations nouvelles par analogies. Penser, c'est comparer, dit l'article.

 

119

Naturellement, nous apprenons loin de l'apprentissage scolaire, car nous sommes tous nourris à la même soupe de la vie au quotidien, depuis la nuit des  temps et de toute part dans le monde, partout. Mais ces chercheurs sont-ils vraiment fiables, ou bien plutôt friables ? Cela reste une question en suspens, je n'oserai pas trancher dans le vif l'intelligence de ces hommes bienveillants peuplant la planète. "Où avons-nous appris la plus grande part de ce que nous savons ? En dehors de l'école… C'est sorti de là, que tout le monde apprend à vivre, apprend à parler, à penser, à aimer, à sentir, à jouer, à jurer, à se débrouiller, à travailler." Je ne sais pas pour vous, mais pour moi cela est clair, à dix-sept ans et demi, j'ai laissé mon cartable d'écolier au fond d'un placard et dehors, je me suis mis à chercher ma voie, avec un certificat d'études primaires en poche, puisque le CAP m'a été refusé pour une demi-faute d'orthographe de trop, pour devenir enfin le magnifique intellectuel que je suis aujourd'hui à soixante-six ans. Nonobstant tout ce que je dis, plus je lis son rejet de l'école, plus j'ai du mal à le rejoindre pleinement. En moi persiste l'idée…

 

120

… Que l'école est bénéfique malgré tout, même si je suis tout aussi critique que lui.

J'ai toujours trouvé insupportable que des hommes et des femmes, respectables qui plus est, puissent se permettre de juger le travail d'autrui en le notant. L'évaluation relève d'un acte de violence insoutenable. Pour cette seule raison, je suis prêt à balancer cette institution à la gorge des loups pour la remplacer par des lieux bienveillants d'activités, où le culturel, dans toute sa diversité, trouverait sa place dans le bonheur de ses enfants et non l'obtention de diplômes. Ne connaissant rien à l'histoire personnelle d'Ivan Illich, sauf qu'il a été longtemps dans les hautes sphères de l'Église, je me demande où en était-il au moment de ces écrits critiques sur nos institutions ? Je n'en sais rien et ne m'en porte pas plus mal, mais il est rassurant de l'entendre écrire : "Les enseignants comme les prêtres sont les seuls hommes de métier qui se sentent investis du droit de pénétrer les secrets de la vie privée de leurs ouailles…" L'homme a-t-il retrouvé sa liberté originelle ? Toujours est-il qu'il insiste sur l'impressionnant pouvoir de l'enseignant, remplaçant   tous les pouvoirs, se substituant aux confesseurs…

 

121

… Aux Psys toutes catégories, et enfin, aux parents. Seulement cette critique bon teint, où nous mène-t-elle ? Quelles seraient les limites, les réelles fonctions de la fonction ? Ne va-t-il pas trop loin en proférant : "Du fait que les élèves sont mineurs, les voilà écartés des garanties consenties aux adultes dans ces lieux d'asile modernes que sont les établissements psychiatriques, les monastères ou les pénitenciers." Il évoque le sentiment de culpabilité ressenti par les élèves… Comment ne pas être dans cette situation dégradante en permanence puisque la perfection n'est pas de ce monde, dans un lieu la voulant à cor et à cri, à n'importe quel prix, au lieu d'être au contraire l'endroit idéal pour l'essai, le droit à l'erreur, à l'émerveillement permanent. Certains chercheurs ont démontré l'inexistence du sentiment de peur chez les enfants, et cela jusqu'à un âge avancé, jusqu'à la puberté je crois, ils fonctionnent sans penser aux conséquences, et on les voit targuer leurs parents avec des actes contraires au sens commun, cela est dû, d'après les scientifiques, qu'un endroit du cerveau de l'enfant ne répond pas de la même manière à certains stimulus que chez l'adulte, il lui manque un truc …

 

122

Je sors d'une séance de cinéma et m'apprête à continuer à écrire sur l'école. Seulement peut-être faudrait-il parler un peu ici du film que je viens de voir : " Hannah Arendt ". Tout le monde connaît cette philosophe, soit pour l'avoir sérieusement lu, soit pour en avoir entendu parlé. Je fais partie de la deuxième catégorie, ce qui ne m'a pas empêché de me rendre le premier jour de la sortie de ce film. Arendt fut l'élève et la maîtresse de Heidegger dans sa jeunesse, mais après la guerre, est allé s'installer avec son mari, un philosophe allemand, Günther Stern, à New York City. En Israël, à Jérusalem, on envisage le procès d'Adolf Eichmann. Elle décide d'y aller et d'en donner son point de vue. Pourquoi je vous parle de ça ici, notre thème n'est-il pas l'école ? Accrochez-vous et attendez-vous au pire. Je vous passe la description de ce film franco-allemand… car vous allez y aller et donc ne perdons pas notre temps, voyons seulement le fond. L'idée d'Arendt fut de dire que ces horreurs commises par ce nazi, n'étaient pas ceux d'un tueur terrifiant, mais ceux d'un homme médiocre, comme n'importe qui d'entres nous, ayant tout simplement suivi les ordres de son supérieur hiérarchique : Adolf Hitler.

 

123

À Eichmann fut posée la question suivante : si son maître lui avait donné l'ordre de tuer son propre père, l'aurait-il fait ? Si Hitler m'avait donné des preuves que mon père était un traître, oui, je l'aurai fait. Hannah Arendt met le doigt sur les activités désastreuses commises par son propre peuple et qui ressortent effectivement lors du procès : des juifs ont aidé le travail des Allemands, et, dit-elle provocatrice, si cela n'avait pas été, il n'y aurait pas eu six millions de juifs exterminés. Elle quitte Jérusalem et revient à New York pour rédiger son livre qui sera diffusé en cinq épisodes dans un des journaux les plus importants du pays. Dès la première parution, ses positions révoltent le monde. Pourquoi ? Il va m'être difficile d'explorer plus avant cette question, mais je sais que c'est justement là où résident les raisons de mon rejet à l'égard de cette femme, de sa philosophie. Peut-on tout dire, tout exprimer, tout exposer ? Certains écrivains déclarent : souvent, on écrit pour ne pas dire l'essentiel… Peut-être, mais cette affirmation peut-elle s'appliquer aux philosophes, aux créateurs, aux artistes cherchant une certaine vérité, aux analystes voulant explorer les zones d'ombres de la nature humaine ?

 

124

Enfin, Arendt ne se pose pas la question, elle tranche d'une plume acerbe ce qu'elle ressent à l'audition d'Eichmann. L'argument du nazi était celui revendiqué par tous les criminels nazis : ILS ONT SUIVI LES ORDRES. Alors sa motivation est de nous faire prendre conscience qu'il y a des moments où écouter les ordres est criminel. J'ai déjà entendu un discours similaire de la bouche d'un vieux philosophe israélien, Yeshayahou Leibowitz, qui allait encore plus loin en dénonçant les actes des juifs, ses frères, envers les Palestiniens, les qualifiant d'actes fascistes, puisque personne ne met en cause les décisions, et donc les ordres de ces politiques fous. Il fut surnommé "le Prophète de la colère". Bon, bon, bon, voyez-vous où je veux en venir ? Rapidement, en deux mots : vous êtes enseignants et vous suivez à la lettre les ordres de vos supérieurs sans vous poser la question si ce que vous faites est bien ou mal… Voilà, c'est dit, je me tais. Je me tais, facile à dire, à peine je pose mes yeux à la page 249 du bouquin sur lequel je travaille depuis quatre mois, que cette phrase m'apparaît, titillant mes entrailles à découvert …

 

125

"L'école ne saurait créer une telle enclave, où les règles de la vie ordinaire n'ont plus cours, si elle n'avait pas le pouvoir d'incarcérer les jeunes plusieurs années de suite sur son territoire sacré…" Incarcérer... Tout de même !

3 – Le rite du progrès. Au risque de me répéter, il n'est pas sûr de voir aujourd'hui un penseur avancer, avec autant de force, de perspicacité une critique d'un système conférant à l'école un tel état de droit envers sa société et ses concitoyens. Certes, la critique est aisée, c'est construire qu'il nous faut, et à le lire dénonçant les coûts exorbitants des études tant aux Etats-Unis que dans le reste du monde, et l'entendre comparer ce coût aux salaires des ouvriers fait froid dans le dos, la démesure des chiffres paraît énorme, et tout cela dans l'acceptation aveugle, générale de tous, sous prétexte qu'on agit pour la bonne cause, la sacro-sainte éducation, l'avenir de nos chers enfants, de notre pays. Je n'entrerai pas aujourd'hui dans cette polémique de savoir si je suis d'accord avec cette position, par contre, je ne m'interdirai pas de rappeler que nos gouvernants ont la gestion des fonds versés par le peuple pour le bien de tous…

 

126

…Et donc il leur revient d'être comptables des décisions prises en toute équité, du moins l'espérons-nous. Dans une précédente vie, j'avais cette formule radicale : "Qui a le pouvoir, en abuse obligatoirement", l'abus de pouvoir étant toujours la règle. Nonobstant cette vérité, que cela ne nous empêche pas d'aller voir de plus près comment cela se passe. Lorsqu'une nouvelle équipe politique investit les murs sacrés décisionnels, après avoir été élus en remplacement à la précédente formation, tout nouveau, tout beau, elle va vouloir procéder à des changements, parce qu'elle les a promis lors des passages successifs à la télé, principalement sur la deux, en ce qui nous concerne, nous la France. Notre Président de la République, François Hollande, faisait cette remarque à des journalistes lui rappelant ses convictions d'homme de gauche, que lorsqu'on arrive au poste que j'occupe aujourd'hui, on a à faire au monde, qui lui, n'est pas toujours, tant s’en faut, de notre bord, et c'est pourtant avec ce monde-là qu'il va falloir travailler au mieux pour nos intérêts à tous. Résumons : je suis un homme de gauche, mais au pouvoir, cette notion est remplacée par l'obligation de compromis.

 

127

Les piles de dossiers s'amoncellent sur ses bureaux et partout ailleurs, des milliers de problèmes attendent une réponse adéquate, l'énormité de ce qui est à faire est telle, qu'elle vous paralyse, et vous oblige à ne rien changer… On sait ce qu'on a, on ne sait pas ce qu'on aura. Alors, agir autrement qu'avant ne paraît plus évident, si vous voulez mettre plus d'argent ici, il faudra en mettre moins ailleurs, mais où, sans risquer de voir défiler ces mécontents, de la République à la Bastille, bannières à la main, tout comme ceux que vous avez brandis jadis lorsque vous étiez de l'autre côté de la barrière. Que serait l'idéal, le meilleur choix dans le domaine de l'éducation, sinon de voir l'ensemble des hommes et femmes, s'intéresser par un élément de la culture et cela tout au long de sa vie. Mais que dis-je, n'est-ce pas déjà le cas ? souffle mon âme du fond de son cauchemar. Vois ta propre maman, n'est-elle pas passionnée par tous ces feuilletons américains que tu débectes, et dont elle connaît dans les moindres détails chacun des épisodes, au point de me dire parfois, que cela équivaut bien à tous les Racine, les Molière, les Shakespeare de nos amours, que l'on considère tellement plus intéressant..

 

128

La tête haute, maman peut disserter aussi honorablement que n'importe lequel de ces Universitaires, qu'elle n'est pas, je vous rassure. Voilà la vraie révolution, aider la pensée à s'articuler autrement, librement. Nous aurons tout le loisir de parler plus tard de notre société de consommation, mais je lis au paragraphe des Universités, les nombreuses critiques négatives d'Illich, les accusant de former, d'éduquer ses futurs cadres à devenir principalement les clients de premier plan du capitalisme. Je ne souffre pas de cette chose-là mais de son contraire : que des gens ne puissent pas consommer, à minima du moins, c'est ça le problème. Et puisque nous sommes sur ce thème, voyez le choix de vie d’Albert Cossery, dont je commence la lecture d'un livre lui étant consacré : "Monsieur Albert Cossery, une vie" récit de Frédéric Andrau. Lui, a fait le choix de la pauvreté en allant s'installer dans une petite chambre d'hôtel à Saint-Germain-des-Prés pour y vivre pendant 56 années. Puisqu'elle relève de notre sujet, l'école, je relève cette charmante phrase à la page 26 : "Vous n'y aviez pas été un élève très assidu. Vous ne cherchiez pas à l'être d'ailleurs. Vous y alliez "à votre guise…"

 

129

Vous pensiez qu'une fois qu'on savait lire et écrire, l'école ne servait plus à rien." Voilà de saines lectures… Aujourd'hui, pas envie de me poses ces questions : si les Universités n'existaient pas, les hommes seraient-ils moins intelligents ? À quoi et à qui servent les diplômes ? Est-ce pour entretenir le système dans lequel nous sommes, ou bien est-ce pour alimenter notre pensée, sans même nous en rendre compte ? Je crains que ces Universités ne soient que des bulles de savon enfermées dans leurs chaos respectifs de spécialistes. À l'évidence, l'intelligence du commun des mortels n'est pas à chercher de ce côté-là. Critique de mes propres critiques, je mettrais un bémol là-dessus, n'ayant pas fréquenté ces lieux saints, mes affirmations sont donc à prendre avec des pincettes. Revenons à Illich, il dit : "Nous ne pouvons entreprendre une réforme de l'éducation, à moins d'avoir compris que le rite de la scolarité ne sert, ni l'acquisition individuelle des connaissances, ni l'égalité sociale". Qui est prêt à signer ce manifeste ? Il faudra utiliser mille stratagèmes, ce n'est pas gagné d'avance, pour entrer dans la danse du monde intellectuel si par malheur vous n'avez pas suivi le cursus règlementaire.

 

130

Nous ne cesserons jamais notre engagement à encourager chacun à trouver la bonne porte des jouissances infinies que procure la culture, tous médias confondus sans en oublier aucun. L'école enseigne que sans diplômes vous n'êtes rien, et en effet, sans les méthodes enseignées par cette institution, la répétition des exercices à l'infini au point de vous rendre idiot, vous ne pourrez assurer la pérennité d'un emploi de fonctionnaire. Sans ces difficultés, ces épreuves à vous démembrer, physique et mental, où irions-nous, ce serait la bérézina ! Les choses se bousculent dans ma tête, mes mots sont contradictoires comme dans la vase à canards du bois de Vincennes où le zoo est encore fermé pour restauration obligatoire vu la vétusté des lieux accumulés le long des ans. Qu'est-ce qu'apprendre ? Apprendre, voilà un concept erroné, fait pour engluer l'ensemble de cette population, avide de soumission, au complexe d'infériorité si naturel à la condition humaine. Complexe d'infériorité vécue dès le plus jeune âge, car jamais, vous m'entendez, jamais vous n'en saurez autant que vos aînés, vos putains de professeurs assermentés.

 

131

Apprendre n'est pas "engranger des connaissances" car nous ne sommes pas des canards que l'on gave pour en avoir le foie, le foie bien gras, bien malade, représentant symboliquement l'élite de nos sociétés structurés comme un langage, voir Lacan, Jacques pour les intimes. Pourquoi je fais cette association, je ne sais pas, peu importe. Je replonge mon nez sur mon bouquin et lis "manipulation de l'élève", il me l'a arraché de la bouche, je l'en remercie. Apprendre c'est chercher, inlassablement tout au long de son existence, des réponses à des questions que l'on se pose, qui ne peuvent en aucune façon être les mêmes pour tous, puisque chacun a une expérience de la vie tellement différente, regardez au sein d'une même famille, les divergences qu'il peut y avoir entre ses membres. C'est là justement le terreau d'une richesse infinie, dans la conjugaison de ces variations formant in fine un ensemble diablement cohérent. Trouver l'unité dans le chaos, voilà de quoi vous assurer quelques heures de réflexion intéressante. "Il suffit qu'un homme ou une femme reconnaisse la nécessité de l'école pour devenir la proie des autres institutions…", dit-il.

 

132

Et je suis assis à la table de travail de la bibliothèque municipale située près de chez moi, où des étudiants fort sérieux, concentrés sur leurs papiers, leurs ordinateurs, leurs mathématiques, c'est fou ce qu'ils sont mathématiques dans le secteur, il doit y avoir une école de droit pas loin, une école de futurs ingénieurs, de futurs chômeurs… Pardon, franchement, je ne l'espère pas. Mais eux, que pensent-ils des idées révolutionnaires d'Illich ? Ce qui importe, c'est que dans le fond je sois avec eux, de leur côté, je sais la société trop dure, trop insupportable parfois, toujours avec les plus forts, ceux qui sortent du rang. "Ils ont désappris à faire, à être eux-mêmes…" ressasse-t-il. Me voilà encore dans mes contradictions, mais ne comptez pas sur moi pour les éviter, tricher ne m'aidera en rien. Il nous donne ici une idée pour expliquer l'échec scolaire : "Un élève sain d'esprit a souvent tendance à offrir une résistance plus grande à l'enseignement quand il prend conscience de cette manipulation à laquelle il est constamment soumis." Prenez-en de la graine, Messieurs 'dames du pouvoir, sauvons ce qui peut l'être encore, à moins qu'il ne soit trop tard ?

 

133

Où le bât blesse-t-il ? Où sont les causes de nos malheurs ? "À la conception fondamentale, commune à toutes les écoles, selon laquelle le jugement d'un seul homme doit déterminer ce que d'autres doivent apprendre et à quel moment." Et je regarde autour de moi, les livres par milliers jonchent les étagères de cette bibliothèque ouverte à tous. Curieusement, si vous faîtes le tour de l'ensemble des salles de ce lieu, vous seriez surpris d'y voir des "marginaux", des "SDF" installés ici ou là, un journal à la main, un journal pas un livre… Que nous enseigne leur présence dans cette maison si peu faite pour eux à priori, n'avons-nous pas pour habitude de les croiser dans la rue sans les regarder par honte, ou à les voir à la télé de nos bonnes consciences. Il serait instructif d'analyser ce qu'ils peuvent trouver ici qu'ils n'ont pas ailleurs, en dehors d'une protection du monde extérieur, du chaud, du froid. Chaque jour, j'aimerai écrire ces mots simples : la culture est l'ultime solution, personne ne doit en être exclu. Je me suis demandé, plus haut, quelles étaient les motivations d'Illich à remettre en cause les institutions. Je lis : " … L'école se veut négation de la mort et fait écho à l'humeur contemporaine…

 

134

…Ses prétentions humanistes, son esprit critique superficiel la font passer pour pluraliste, voire antireligieuse". Voilà où je voulais en venir : avoir la preuve qu'il travaillait pour sa chapelle de base, l'Église. Mais cela ne nous empêchera pas d'avancer, même si nos objectifs ne sont pas semblables. Alors me demanderez-vous, et vous aurez raison, quelles sont les miennes ? Comme je l'ai dit tout à l'heure, la culture appartient réellement à tous, et pour y accéder, en avoir tout le suc, la lecture et l'écriture, entre autres choses, peuvent aider plus facilement à nous sortir de nos maux quotidiens, petits et gros, qui à la longue nous minent profondément, alors qu'en les mettant de côté, nous élargissons notre vision du monde par l'expérience des autres, par la lecture, le cinéma, le théâtre, les musées... nous pourrons plus facilement affronter nos problèmes, nos difficultés, et heureusement nos plaisirs aussi… Voir des gens repousser ces objets de culture, le fait de lire, celui d'écrire, m'attriste plus que tout, rien n'est plus dommage, et n'allez pas croire que je sacralise quoi que ce soit, mais enfin, la vie est longue et belle, donnons-nous les moyens de la digérer agréablement, à défaut, pas trop mal.

 

135

Et puisqu'il a été question d'Hannah Arendt il y a quelques jours, je ne veux pas me priver d'un "folio-essais" sur "la crise de la culture", dans lequel j'ai trouvé : "La crise de l'éducation". Allons voir de quoi il est question dans ce travail d'une trentaine de pages. Première phrase faisant tilt dans ma pauvre tête d'autodidacte s'essayant à cor et à cri de comprendre quelque chose à cet univers me dépassant trop souvent : "L'éducation ne peut jouer aucun rôle en politique, car en politique c'est toujours à ceux qui sont déjà éduqués que l'on a affaire." Je pose mon stylo et essaye de voir à quoi cela peut me faire penser, à quoi je pourrai m'accrocher pour vous tartiner quelques bons mots excitant votre intelligence. Ainsi va le monde, nous nous passons le bâton, relais pour avancer, mais cela est trop souvent superficiel, nos différences de personnalités sont telles que le contraire serait inquiétant. Pour arriver à un résultat à peu près satisfaisant en ce domaine de l'éducation, ce qu'il faudrait se serait de jeter les vieux, les bannir de l'état nouveau que nous voulons construire. Me suis-je déjà appesanti ici sur cette question des vieux gouvernant tous les pouvoirs ?

 

136

Me suis-je appesanti sur tous "ces vieux" préparant les jeunes aux examens, aux diplômes ? Si je n’en ai pas encore parlé, réparation est faite, la messe dite, merci de votre écoute bienveillante. Le renouveau ne peut advenir que de la part des "jeunes", mais ce sont toujours les anciens qui tiennent les bâtons de la loi, doigts pointés autoritairement sur le chemin à suivre, que l'on connaît, pas celui du nouveau, celui du hasard. Écrivant ces mots, je ne peux cacher mes cheveux gris et mes jambes flageolantes, plus que la moyenne des hommes en général à cet âge-là, je n'ai plus la force du corps, mais curieusement, persiste en moi une tranquille jeunesse nourrissant chacun de mes instants de vie. "Éduquons les enfants et profitons-en pour éduquer leurs parents", voilà quel était l'objectif de l'Amérique plurielle, ouverte à tous, puisqu'un Nouveau Monde s'édifiait. "Bien entendu, la situation réelle n'est pas du tout celle-là…" dit-elle, ouf, j'ai eu peur! De si bonnes intentions de la part des hommes m'intriquent, m'inquiètent. "Ce qui distingue chaque être humain des autres est qu'il n'est pas un étranger dans le monde, mais "quelque chose" qui n'a jamais existé auparavant".

 

137

Peut-on imaginer l'enfant, ce nouvel arrivant parmi les vivants, comme quelque chose qui n'a jamais existé ? Cette formule est bien sympathique, mais n'est-elle pas issue de la culture Judéo-Chrétienne, de l'idée positive que l'on se fait de l'autre, c’est-à-dire de Dieu ? J'ai trop peur qu'en orientant l'objectif de notre attention de ce côté-ci, nous ne perdions notre temps et surtout évacuions l'essentiel qui est que l'enfant a besoin d'être écouté, entendu et respecté. Installé à la terrasse du Rostand, café situé face au jardin du Luxembourg, j'essaie de lire, de saisir les idées d'Hannah Arendt. À gauche et à droite de moi, les gens parlent, draguent, ce qui est tout à fait légal en pareil endroit, alors je fais un effort pour soutenir mon attention, j'y arrive, mais ne comprends pas grand-chose aux mots défilant devant mes yeux grands ouverts. Cela n'est pas important, si une phrase me convoque, je saurais y répondre, sinon, demain je reprendrais paisiblement mon ami fidèle Ivan Illich sur lequel je travaille maintenant depuis plus de quatre mois. "Le monde est fait par des mortels, il s'use et parce que ses habitants changent continuellement, il court le risque de devenir mortel comme eux"…

 

138

Je ne suis certainement pas fait pour comprendre les Américains, et cette Américaine en particulier, j'en veux pour preuve cette simple phrase : "… pour préserver ce qui est neuf et révolutionnaire dans chaque enfant, l'éducation doit être conservatrice, elle doit protéger cette nouveauté et l'introduire comme un ferment nouveau dans un monde déjà vieux…". Que voulez-vous, je n'y peux rien, pour moi ce genre de littérature c'est de l'hébreu. Je ne sais pas si cela est spécifique aux philosophes, mais il m'est apparu parfois, au cours de mes lectures, de croiser des phrases comprenant une idée et de son contraire. C'est probablement une technique de penseurs avertis ; pour ma pomme, c'est du foutage de gueule, et ça madame, ça m'emmerde pas mal, car je perds mon temps toujours à essayer de trouver une cohérence à l'idée exprimée… Si j'avais suivi le "cursus normal" des études normales, je n'en serais pas là aujourd'hui. Mais, où en serais-je ? Fin d'Hannah Arendt. Hier j'ai visionné à la télé : "Waste Land" ou "de la poubelle au musée", travail de création contemporaine dans la plus grande décharge du monde, au Brésil, par l'artiste Vik Muniz et les poubelliers... Bravo Vik ! Quand l'art sert à sortir de la merde !

 

139

Revenons à "Une société sans école". À regarder ces mots mis entre parenthèses, mes poils se hérissent : comment peut-on envisager un tel retour en arrière lorsqu'on voit ces sociétés où les gosses sont livrés à eux-mêmes et se trouvent dès le plus jeune âge à devoir travailler, souvent pour nourrir leurs familles. De toute urgence, ce qu'il faudrait pour l'ensemble de notre vaste monde, c'est abolir la misère… Vaste programme ! Illich insiste beaucoup sur le fait que l'école nous prépare à devenir de bons consommateurs, alors qu'elle est sensée former le jugement critique. Il préconise, face à cette force provenant de la vie familiale, de l'armée, des services de santé, des médias… d'en sortir par soi-même. Curieusement, pour ma part, je n'abonderai pas dans ce sens, car cette société de consommation ne me révolte que parce que beaucoup trop d'hommes et de femmes en sont exclus, mais ça, je vous l'ai déjà dit. Mais lui ne décroche pas d'un iota : "Il faut comprendre que si l'on veut s'affranchir de la consommation envahissante, on doit d'abord se libérer de l'école obligatoire. Nous sommes tous prisonniers du système scolaire et notre effort pour nous libérer de l'école fera apparaître des résistances …

 

140

… Des résistances à renoncer à la consommation". Notons ce parallèle qu'il fait obsessionnellement : école/consommation. J'ai du mal à comprendre là où il veut en venir en jetant en bloc cette institution, mais plus j'avance dans cette lecture, plus je m'oblige à penser ce qu'il me propose, même si je ne suis pas toujours d'accord avec lui. L'école, n'est-ce pas ce lieu effrayant où tant d'échecs scolaires ont entrainés, depuis des décennies, tant de catastrophes, accouchant un monde d'hommes frustrés de n'avoir pas été reconnus lorsqu'ils étaient encore enfants, encouragés à aimer la vie, aidés à comprendre le monde en marche, à faire la part de ce qu'ils vivaient à l'intérieur comme à l'extérieur de l'établissement. Inlassablement nous devons penser, chercher, chercher, et peut-être trouver ? Pour ma part, j'ai longtemps proposé de ne jamais noter un devoir, ne jamais juger un autre que soi, ne jamais évaluer quiconque, et de toujours s'intéresser à la production d'un enfant, et à l'aider à voir le bon côté des choses, à avancer un peu. N'est-ce pas cela la fonction première de toutes œuvres, livresques ou de tous autres médiums : nous rendre plus intelligent, et pourquoi pas plus heureux ?

 

141

Quelle légitimité ai-je de vous parler d'école ? Sinon d'avoir été concerné par elle, comme la plupart d'entre nous, à un moment où je n'avais aucune ressource pour me débattre dans les problèmes qu'elle soulève depuis toujours. Est-ce une vengeance que je prends là ? Je ne crois pas, j'ai d'autres motivations : je ne veux pas que l'école abime les adultes en devenir, qu'elle cause des dégâts irréparables. Les enfants sont sous le joug de leurs parents, de leurs institutions, ils  réagissent chacun à leur manière, selon leur caractère et les résultats de leur travail ; pas que de cela bien sûr, mais de cela aussi. Selon que les notes évaluent l'élève dans un sens ou dans un autre, il connaîtra le vivre heureux parmi les siens, sinon il y a risque de le voir dans un flue incessant de violence contre les autres ou contre lui-même. Quelle légitimité ai-je donc, n'ayant aucune expérience en la matière ? Ni enseignant, ni parent d'élèves, ni diplômé de je ne sais qu'elle université, rien, je ne suis rien, comme beaucoup d'entre vous d'ailleurs... Ce matin en me levant, une pensée m'a traversé l'esprit : "Je suis un rescapé de l'échec scolaire". En effet, après l'avoir quitté, j'ai aimé tant de choses …

 

142

Heureusement, à cette école-désastre, il y a des survivants mais combien Messieurs les statisticiens de l'Éducation nationale ? Cette école obligatoire m'a permis, comme je l'ai écrit un jour, d'avoir été gardé entre ces murs-là plutôt qu'à la rue, tout bêtement d'avoir grandi. Une fois sorti de cet endroit sans intérêt pour moi, j'allais dire de cet enfer, j'ai connu d'autres univers, tournant autour des choses de la culture : le théâtre, le cinéma, le livre (difficilement), la peinture, les musées… tous, plus excitants les uns que les autres, me donnant encore aujourd'hui à soixante-six ans, une force m'ayant souvent sauvé d'un découragement fatal, dû à des problèmes de santé physique. Je veux dire par là qu'il est capital d'éviter que l'école soit responsable, ce qui est le cas maintenant, des pires catastrophes survenant après son passage obligé. Mille fois j'ai été confronté à des personnes de cette catégorie sociale : "échec scolaire", refusant catégoriquement de prendre un livre, de regarder un tableau, d'aller au théâtre, au musée, sous prétexte que ce n'était pas fait pour eux. Et pourquoi ? Parce qu'ils en ont été rejetés dès le plus jeune âge par ces mauvaises notes à répétition, par cette institution représentant "la culture"…

 

143

Du sceau fatal des autorités supérieures, cette école les a estampillées, jugées "nuls" à tout jamais. Alors, quels recours ont-ils pour ne pas sombrer dans la dépression et survivre malgré tout ? Leur vengeance prendra mille formes, je vous laisse le soin d'en deviner certains. La majorité d'entre eux va rejeter, au long de son existence, ce qui fait penser à l'école : les cahiers, les livres, la lecture, l'écriture. Ces recalés de nos sociétés vous les retrouverez plus facilement dans les hôpitaux, les prisons, au chômage, qu'au théâtre, à la bibliothèque ou à un poste de travail valorisant, car l'école des mauvaises notes dévalorise en profondeur l'âme de ces enfants, ces hommes en devenir. Je sais , je sais, je sais, je me répète, mais on est pédagogue ou on ne l'est pas ! Tous, ne tombent pas dans ce cas de figure, certains s'en sortent, mais toujours, toujours avec des séquelles sur le dos. Le plus surprenant dans ce combat, pour l'abolition des notes à l'école, mené depuis près de vingt années, est de voir le peu d'entrain des enseignants à comprendre cette démarche, comme si cette simple formalité, ne pas noter, remettait en cause leur métier, leur raison d'être, alors qu'elle élèverait leur statut d'accompagnant.

 

144

Et, année après année, c'est toujours la même histoire : les fascicules pour la révision du BAC tendent leurs bras à mes récurrentes frustrations anciennes de n'avoir pas fait d'études, et donc de n'avoir pas eu ce diplôme. Tous les arguments, faux ou vrais, me poussent à m'en approprier quelques-uns pour me faire une idée de quoi il en retourne aujourd'hui des questions posées à ces postulants à ce baccalauréat. Les six hors séries proposées par Le Monde ont un avantage, aucune pub ne perturbera notre concentration de lecture, d'étude. Prenons "Français". Dès les premières pages, mon attention s'évade, sa fixation est difficile, presque impossible, plus précisément, tout effort chez moi provoque une grosse fatigue, plus encore, une souffrance. Dans le domaine intellectuel comme dans bien d'autres, je n'ai pas d'autres choix que de m'attacher à ce qui donne du plaisir, pas à ce qui n'en donne pas. Dix à quinze minutes d'effort et mes yeux se ferment, je perds conscience un léger instant, je dors quelques secondes. Ce genre de réactivité arrive-t-il à certains de nos gosses sur les bancs de nos écoles ? Si oui, comment réagissent les enseignants à de tels comportements ?

 

145

J'ai du mal à imaginer qu'ils n'engueulent pas leurs endormis et ne les poussent pas à la porte de leurs cours pour prendre l'air et retrouver leurs esprits. Peu importe qu'il s'agisse là, de ma part, ou de mes hypothétiques jumeaux, de pathologie ou non, toujours est-il que rien n'est parfait en ce bas monde, et qu'il est temps de tout remettre à plat, je ne sais encore comment ! Tout le monde connaît cette formule de Socrate : "La seule chose que je sais, c'est que je ne sais rien"… ou pas grand-chose. Chaque année ces revues de fin d'année scolaire me mettent le nez devant cette réalité-là, Socrate avait raison, du moins pour ce qui me concerne, c'est clair. Alors, pourquoi "ceux qui savent" infligent-ils leurs savoirs à leurs petits enfants, et oublient cette vérité absolue ? Comment peuvent-ils imposer, d'une poigne de fer de militaires récalcitrants, ce qu'on a, cinquante ans avant, mis dans leurs caboches d'élèves bien éduqués ? La complaisance des pouvoirs politiques n'est pas prête à virer de bord, seulement peut-être pour quelques modifications d'horaires de cours, et tout cela suscitant les remous que l'on sait dans les hémicycles de nos institutions, dont des exclus sont exclus, je le précise.

 

146

On a vu passer dans les journaux il y a quelques jours la statistique suivante : les enfants des enseignants réussissent mieux leurs études que toute autre catégorie sociale. Évidemment, comment voulez-vous qu'il en soit autrement, puisque ce sont eux qui enseignent à leurs propres enfants, et une fois à la retraite, ce sont toujours les mêmes qui donnent ces fameux sujets pour réussir au BAC.  Ne faisons pas de fixation, chacun a sa vie, avec ses bons et mauvais côtés, comme dit Madame Rimbaud, ma voisine malade de la tête actuellement. Donc, si vous êtes enseignants et avez des enfants, l'école est à eux, puisque c'est vous qui la faites. Poussons le raisonnement jusqu'à l'absurde, et affirmons que cette institution est construite pour ces enfants-là, et que les autres n'ont rien à faire là-dedans puisqu'ils n'ont pas les parents adéquats : ils sont à regarder comme "des étrangers". À partir du moment où nous ne sommes pas à la bonne place, que faisons-nous dans cet "enfer" qui ne nous concerne pas ? Avec ce postulat limite, nous pourrions avancer que cette école pour enfants d'enseignants ne devrait ne concerner que ces familles-là, et pas les autres, tous les autres.

 

147

Si les enseignants ont leur école pour leurs enfants, pourquoi les autres n'en auraient-ils pas une à leur image ? C'est pourquoi, peut-être, y a-t-il des écoles privées, pour des gens qui se privent de l'école officielle de l'Éducation Nationale ? Mais ne nous égarons pas, restons dans notre monde de fous. Est-il pensable d'avoir une école organisée par des banquiers pour leurs chers petits bambins, une pour ceux des bouchers, des boulangers, des docteurs, des pharmaciens, des comptables, des acteurs, des chômeurs, des SDF… La liste est infinie, je limite mes efforts pour ne pas trop vous fatiguer. Ainsi, chacun aura dans sa chapelle de quoi perpétrer sa messe et offrir à sa progéniture l'assurance d'un bon enseignement, celui de la famille des banquiers, des bouchers, des boulangers, des docteurs… Chacun dans sa bulle, en quelque sorte. Expérimentalement, nous pourrions rassembler toutes ces écoles spécifiques dans un établissement fédérateur, et où le nom serait à trouver, un nom pas trop rébarbatif, s'il vous plait, merci ! À moins que tout cela ne soit considéré par les instances supérieures comme inutile, contre-productif et que l'on revienne à quelque chose de plus basique…

 

148

Chaque corporation s'occupant de ses propres enfants, ainsi de substantielles économies seraient enfin possibles dans un monde où tout coute si cher… n'est-ce pas ma pauvre dame ! Et là, sans le vouloir, nous nous approchons du thème si cher à Illich : "Une société sans école". Tout le monde devine les limites de telles dispositions : le boucher n'enfantant que de petits bouchers, à l'image de ce qui se passe actuellement avec les enseignants produisant de futurs docteurs. .. trouvez l'erreur. Nous avons beau remuer ces hypothèses dans tous les sens, rien n'est pleinement satisfaisant, les inconvénients toujours se révèlent et nous devons en bons élèves trouver la parade au risque de passer pour un amateur de la pensée révolutionnaire. Là où on bloque, c'est lorsque les parents n'ont aucune profession spécifique entrant dans la liste des métiers offrant un revenu et une occupation journalière reconnus valable et acceptable par l'ensemble d'une population hautement responsable. Que faire de ces gosses vivant chez eux n'importe quoi, n'importe comment, et dans des conditions que je préfère ne pas détailler pour l'instant. Dans tous les cas, ils seront considérés exclus, «exclus pour toujours».

 

149

Mais ne perdons pas notre temps sur cette minorité comptant pour du beurre dans les statistiques officielles sur lesquelles nous allons compter pour notre analyse hasardeuse. Même si cette démonstration est loufoque, nous devons chercher où la vérité se cache dans ce cauchemar. À y regarder de près, chaque enfant vit au moins deux vies, celle de l'école où il est étranger comme nous l'avons démontré tout à l'heure (sauf s'il est enfant d'enseignant bien entendu), et celle de la famille, où il est un peu plus chez lui, plutôt bien, plutôt mal. Là, il voit vivre ses parents avec leurs métiers, leur mode de fonctionnement tellement différents, tellement opposés à ceux de l'institution "Éducation Nationale". Ces deux univers antagonistes provoquent obligatoirement une confusion dans l'esprit de l'enfant, parfois des conflits douloureux se mettent en place insidieusement, entrainant des crises de la part des enfants ; pire, de celle de leurs parents qui en arrivent même dans des situations extrêmes, à se séparer à cause des gosses. Pour la paix des familles, l'école n'est pas ce qu'il y a de mieux ! Mais gardons le moral, et reprenons nos révisions, sinon nous n'aurons pas le BAC cette année.

 

150

Que nous dit cette bible du journal "Le Monde" sur ce qu'il faut savoir pour obtenir cet examen fatal. Avant tout, et afin de vous faire une idée du travail des écrivains en général, voilà un encart vous donnant une définition auquel je ne comprends pas grand chose : "La caractérisation du personnage se fait par l'intermédiaire de plusieurs "techniques". La description est, bien sûr, l'outil privilégié du romancier qui veut "donner à voir" son personnage. Les images (comparaisons et métaphores) sont également essentielles pour concrétiser un trait de caractère, par exemple. Quant à la focalisation, elle permet des variations dans la présentation et la découverte du héros, engageant parfois le sens de l'œuvre tout entière. Il en existe trois types : la focalisation "zéro" où le narrateur est omniscient, la focalisation interne qui fait entrer le lecteur dans la conscience d'un personnage ou, au contraire, la focalisation externe qui le place en situation d'observateur." Cessons ces bavardages barbares et venons à l'essentiel : relevons les références béton, récoltées dans les dix premières pages, d'une culture que j'avoue avoir mis plus d'un demi-siècle pour m'en faire une source de plaisir.

 

151

Voilà ce qu'il faut avoir lu, des titres fondateurs de la littérature des Dieux.

- Le roman pastoral, d’Honorée d'Urfé ou Madeleine de Scudéry

- La Princesse de Clèves, de Mme de La Fayette

- Pantagruel, Gargantua, trois autres Livres, de Rabelais

- Voyages au bout de la nuit, de Céline

- L'espoir, La condition humaine, d'André Malraux

- La Peste, Le Mythe de Sisyphe, d'Albert Camus

- Les Lettres persanes, de Montesquieu

- La Nouvelle Héloïse, de Jean Jacques Rousseau

- Les Liaisons dangereuses, de Choderlos de Laclos

- La Comédie humaine, Les Chouans, d'Honoré de Balzac

- Quatre-Vingt-treize, Les Misérables, Notre-Dame de Paris,  de Victor Hugo

- L'Éducation sentimentale, Bel-Ami, de Guy de Maupassant

- Madame Bovary, de Gustave Flaubert

 

152

- Les Rougon-Macquart (Nana, Germinal, L'œuvre, La Bête humaine…), d'Émile Zola

- De la terre à la Lune, Vingt mille lieues sous les mers, Le Château des Carpathes, de

   Jules Vernes

- Le Complot contre l'Amérique de Philippe Roth

- La Part de l'autre, d'Éric-Emmanuel Schmitt

- Le Rouge et le Noir, La Chartreuse de Parme, de Stendhal

- Les Trois Mousquetaires, La Reine Margot, d'Alexandre Dumas

- Le Comte de Monte-Cristo, de Dumas Père

- Le Feu, d'Henri Barbusse

- Les Croix de bois, de Roland Dorgelès

- Le Grand Voyage, L'Écriture ou la Vie, de Jorge Semprun

- Les Bouts de bois de Dieu, de Sembène Ousmane

- Thérèse Desqueyroux, de François Mauriac

- Les Choses, de Georges Pérec

 

153

- L'écume des jours, de Boris Vian

- Nourritures terrestres, d'André Gide

- La Nausée, de Jean Paul Sartre

- Les Gommes, d'Alain Robbe-Grillet

- La Modification, de Michel Butor

- Une vie, de Jeanne Le Perthuis des Vauds

- La Promesse de l'aube, de Romain Gary

- La Petite Fille de Monsieur Linh, de Philippe Claudel

- Carmen, Les âmes du purgatoire, de Mérimée

- Atala, de François-René de Chateaubriand

- Zadig, Candide, de Voltaire

... À ces hors d’oeuvres s'ajoutent, aux pages dix et onze, les deux premiers "Articles du Monde", où l'on est entre gens sérieux qui savent de quoi qu'on cause dans certaines sphères de l'intelligentsia, loin des préoccupations du peuple qui souffre …

 

154

"Le Zola bâtisseur d'Henri Mitterand" et "Émile Zola, solitaire et solidaire", deux articles de 2001 et 2002, où Michel Contat, grand intellectuel critique et ex-secrétaire de notre ami Sartre, nous fait part du bonheur qu'il y a à prendre en se plongeant dans les travaux de ce Monsieur Henri Mitterand, surtout si l'on veut comprendre l'œuvre colossale de Zola, Les Rougon-Macquart. Je relève ce détail : "Zola, bâtisseur qui compose en vingt-cinq années de travail acharné vingt romans… " Il lui aura fallu ce temps-là, vingt-cinq ans, pour créer cette œuvre que les jeunes doivent, eux, se farcir en quelques mois, vingt-cinq ans/quelques mois, en plus des dizaines autres auteurs et œuvres inscrites au programme. Je sais bien que ces bouquins ils les ont lus, pour certains, au cours des dix années d'études qu'ils ont sur les gencives d'écoliers. Nonobstant, je me demande quelle organisation mentale permet d'absorber l'essence de ces millions d'informations que regorgent ces livres, issues de ces têtes d'auteurs pas toujours fréquentables, je ne vous dis que cela, car pour certains, à les croiser dans la rue, je ne sais quels seraient mes réactions de lecteurs apeurés ?

 

155

Abordons maintenant les dix pages suivantes, de la 16 à la 25. Lisons, calmement, sans à priori. Pages 16 et 17, article du Monde de Robert Solé de 2009, sur notre très chère Nancy Huston, pour son roman "Lignes de faille". Vous avez tous lu, j'en suis certain, ma version "remastérisée" de son "Adoration". J'ai relevé quelques mots, picorés de-ci, de-là, les voici : " À six ans, on n'est pas encore entré dans le monde de l'école qui va formater, jusqu'à un certain point, nos opinions et notre intelligence". "Tous les enfants sont hypersensibles. Ils reçoivent les mots adultes comme des coups ou des caresses – en pleine figure". "Pendant ces six mois d'écriture, je me sentais toute petite. Le nez dans l'entrejambe du monde adulte, entourée de géants effrayants, imprévisibles, violents … L'enfance est toutes sortes de choses – heureuse, malheureuse, tragique, terrible, joyeuse – elle peut même être amusante, mais elle n'est pas drôle." Deuxième article, celui de Patrick Kechichian sur Bernard Pingaud et son roman "Bartoldi le comédien". "Ce roman, imaginaire si on peut oser le dire, est censé raconter la vie d'Auguste Constant, alias Bartoldi, comédien célèbre, qui un jour de printemps de 1970…

 

156

… Il se suicide avec un révolver à l'issue d'une représentation de "La Mouette" qui marquait, après une longue absence, son retour à la scène. Rappelons que cette pièce de Tchekhov se termine par le suicide de Constantin, le personnage miné par la mélancolie qu'incarne précisément Bartoldi…" Les deux pages suivantes vont traiter du suicide, particularité de certains "personnages romantiques" et, comme par hasard, de certains jeunes d'hier et d'aujourd'hui. Je vous dirais tout à l'heure comment les choses m'apparaissent dans le fond et les raisons me poussant à faire ce travail, mais là, découvrons ensemble ces pages dans lesquelles nous nous sommes engagées pour le pire comme pour le meilleur. Chaque page porte en elle de multitudes images éveillent en moi des souvenirs de lecture, mais pas uniquement, de films, pièces de théâtre, expositions… Tout cela entraine notre mémoire à tous dans des espaces plutôt agréables, liés au plaisir, au centre de notre être profond. La culture c'est ça, cette masse d'éléments enfouit qui ne demande qu'à sortir au moindre signe, et ici, je ne parle pas de connaissance et encore moins de celle que "l'institution" veut nous imposer.

 

157

Si j'ai exprimé du bonheur devant les bonnes choses intellectuelles, il n'en reste pas moins qu'elles ne s'adressent malheureusement pas à tous, et nous devons nous arrêter un moment pour explorer la légitimité de cette culture. Si nous  admettons qu'elle le soit, reconnaissons qu'elle l'est pour certains et pas pour d'autres. Volontairement, nous n'entrerons pas dans l'univers obscur des statistiques, puisque nous sommes entre gens bien et de bonne foi. L'école est obligatoire et ce jusqu'à 16 ans, après, allez à l'école que vous voudrez, chacun faisant alors le choix d'adhérer ou non à cette aventure en toute conscience. Mais tant qu'elle est obligatoire, elle se doit d'être pour tous. Incontestablement, peut-être depuis toujours, peut-être partout dans ce monde composé d'hommes et d'enfants, les premiers imposent aux second, qui n'ont pas d'autres choix, d'avaler la soupe qu'on leur sert au risque de se trouver jetés dans la gueule du travail en usines à bas cout, dans la rue, la prostitution, la violence, la drogue, et dans le meilleur des cas, dans "l'échec scolaire", et dans le meilleur des meilleurs cas, dans la soumission : l'objectif inavoué de cette école-là.

 

158

L'école serait-elle responsable de toutes les catastrophes universelles ? Certes non, elles sont multiples, à commencer par celles provenant des éléments se déchainant on ne sait pourquoi, par la faute de qui, de quoi, de l'homme ou de Dieux incertains et mélancoliques, la faute à pas de chance… Trêve de littérature, nous sommes tous assis à cette table afin de faire des propositions, alors, essayons. L'enseignement pratiqué dans cette école peut être le point de départ d'une nouvelle réflexion, mais jamais la référence ultime. La seule culture à reconnaître est celle portée en chacun des enfants, par ces millions de choses qu'ils ont vécues, toutes mises au placard et ne demandant qu'à sortir, les moyens ne manquent pas aujourd'hui pour les aider à vider cet enfer dont Nancy Huston parle. Mais qui sont donc ces gosses auxquels on s'adresse dans ce gavage de connaissance ? Et puis, toutes ces questions universelles qu'on engrange, ne sont-elles pas justement éphémères, ne sont-elles pas des hypothèses, des  possibilités de réponses, variant selon qui les profère, et comme nous sommes des millions d'individus à nous intéresser de près ou de loin à ces questions…

 

159

… Tu vois un peu dans quelle situation métaphysique nous sommes. Nonobstant ce petit détail, à la pages 20, on se fiche de la gueule du peuple en proposant un exercice, à faire frémir Germaine dans sa salle de bains, et certainement fort amusant pour des profs en retraite en mal d'occupation, s'ennuyant grave toute la journée devant leur bibliothèque pleine de livres amassés depuis leur tendre jeunesse. Mais là, on ne rigole plus, c'est un acte d'une violence insoutenable, car il s'adresse aussi et entre autres, à tous ces jeunes qui savent à peine lire et écrire. De quoi s'agit-il ? Il faut rédiger une lettre à quatre auteurs : Balzac, Flaubert, Maupassant et Huysmans, pour leur reprocher la vision très pessimiste de leurs romans. Dans un premier temps et pour certains parmi nous, cela apparaît amusant et pour ceux-là, je n'ai rien à dire. Par contre, pour l'ensemble des gosses, cet exercice est impossible, car pour l'envisager il faudrait un minimum de connaissance de l'œuvre de l'écrivain et pas uniquement avoir lu un compte rendu sur Wikipédia. J'en veux pour preuve les deux copies données en exemples à suivre, rédigés par des profs égoïstes ne pensant qu'aux difficultés infligées à ces sales gosses.

 

160

Pour eux, l'école devient inutile, ils n'en sont pas dignes, la preuve : ils sont incapables de rédiger ce qu'on leur demande. Je ne lance pas la pierre au journal le Monde, ils font leur travail, mais je la lance à ces instances cachées au fond de leurs tanières, anonymes pour l'essentiel, se protégeant comme ils le peuvent… Les traitres ! Il est surprenant de ne voir personne réagir à ce scandale. Que fait-on des connaissances des sciences humaines acquises depuis plus d'un siècle, je pense à la psychanalyse, la philosophie, la médecine, la littérature... Rien, ça n'existe pas, nous sommes à l'âge de pierre et non des lumières. Grrrrr ! Je vais boire un café. A l'évidence, l'école est faite pour ceux qui travaillent et ont les moyens. Nous pourrions donc la garder telle quelle pour ces enfants-là. Pour les autres, tout est à reconsidérer en oubliant le fonctionnement ancien, et créer une autre école d'une tout autre nature. Là, mille possibilités sont mises sur la table, l'objectif n'étant plus de voir les enfants ingurgiter ces matières, mais de faire en sorte que chacun, inlassablement, cherche et trouve en lui ce qui le motive, l'intéresse intensément, et tout mettre en œuvre pour l'aider à se réaliser dans cette direction.

 

161

Évidemment, les erreurs sont permises, mais les jugements, les évaluation et les notes interdites. Les moyens merveilleux actuels permettent cette approche sans pour autant dépenser plus d'argent, au contraire, une politique d'économie doit s'inscrire dans le comportement de ces enfants, afin de solliciter plutôt leur inventivité que la satisfaction immédiate de leur désir. Est-il possible de faire de tous ces gosses des passionnés ? Oui, cela est possible, et cerise sur le gâteau, la passion de chacun, exposée en classe, formera le corps de cet enseignement fait par les élèves pour leur classe… Humm, c'est chouette ! Écrire permet d'avoir de bons sentiments à moindres frais, me dira-t-on et on aura raison, mais que voulez-vous que je fasse de plus, sinon penser un autre monde ? Voilà maintenant les références relevées dans ces dix pages, de 16 à 25.

- Les Variation Goldberg, L'empreinte de l'ange, Prodige, Lignes de faille, de Nancy Huston

- La Mouette de Tchekhov

- Bartoldi le comédien, de Robert Pingaud

- Belle du Seigneur, d'Albert Cohen

 

162

- Le Grand Meaulnes, d'Alain Fournier

- Aurélia, de Gérard de Nerval

- Au Château d'Argol, de Julien Gracq

- La Recherche du temps perdu, de Marcel Proust

- La Dame aux camélias, de Dumas fils

- Pierre et Jean, Une vie, Boule de suif, de Guy de Maupassant

- Système des Beaux-Arts, d'Alain

- Essai sur le roman, La Nuit de la Saint-Jean, Défense des Lettres, de Georges Duhamel

- L'Homme révolté, d'Albert Camus

- Courrier Sud, Vol de nuit, Terre des hommes, Le Petit Prince, de Saint-Exupéry

- Le Voyage de monsieur Perrichon, d'Eugène Labiche

- La vie de Henry Brulard, de Stendhal

- Cahiers d'André Walter, d'André Gide

- Manifeste du surréalisme, d'André Breton

 

163

- J'abats mon jeu, de Louis Aragon

- Papiers collés, de Georges Perros

- Les Arbres et les jours, de Jacques de Bourbon Busset

- Défense de Narcisse, de Philippe Vilain

- Les Fleurs de Tarbes, de Jean Paulhan

- Souvenirs obscurs d'un juif polonais né en France, de Pierre Goldman

- Je sors ce soir, Génie divin, de Guillaume Dustan

- Rapport sur moi, de Grégoire Bouillier

- Charité, de Frédéric-Yves Jeannet

- Amer eldorado, de Raymond Federma

- La vie sexuelle, de Catherine Millet

- W ou le souvenir d'enfance, je me souviens, de Georges Perec

- Pas un jour, d'Anne Garréta

- Journal du dehors, d'Annie Ernaux

 

164

- L'inceste, de Christine Angot

- L'Enfant éternel, de Philippe Forest

- Philippe, de Camille Laurens

- Chrétiens, Zone, de Jean Rolin

- Sortie d'usine, Daewoo, de François Bon

- La Maladie de Sachs, de Martin Winckler

- Les Particules élémentaires, Plateforme, de Michel Houellebecq

- Promenade, Univers-univers, de Régis Jauffret

- Le Post-exotisme en dix leçons, Dondog, de Volodine

- Ingrid Caven, de Jean-Jacques Schuhl

- Madman Bovary, de Claro

- L'Adversaire, d'Emmanuel Carrère

- Doggy bag, de Philippe Djian

- We are l'Europe, de Jean-Charles Masséra

 

165

Ajoutez à cela : Blanchot, Derrida, Debord, Modiano, Guyotat, Echenoz, Quignard, Michon, N'Diaye, Barthes, Foucault, Marc Lévy,  Breton, Duras, Lacan, Aristote, Valéry, Chloé Delaume, Renaud Camus, Valère Novarina, Dominique Fourcade, Jacques Roubaud, Jude Stéfan,  Philippe Beck, Olivier Cadiot, Tarkos, Nathalie Quintane, Bernard Heidsieck, Charles Pennequin.

Le Texte théâtral et sa représentation, du XVIIe siècle à nos jours.

Avant de me mettre à lire ce paragraphe, je veux vous dire combien le théâtre a compté pour moi dès mes premières années d'adolescence, alors qu'à l'école aucune satisfaction intellectuelle, aucun plaisir particulier, n'avaient traversé mon être vivant de chair de poule et d'os bien fragiles. Depuis un demi-siècle j'ai vu des milliers de spectacles et j'ai même connu les planches, histoire de voir de quoi j'étais fait, seulement pour des raisons que j'ai déjà expliquées ailleurs, le théâtre n'était pas fait pour moi, mais j'en ai gardé le meilleur souvenir pour y avoir vécu les jeux subtils de la création à l'action, en perpétuel mouvement, et là, c'est pas pareil que dans mon fauteuil de spectateur.

 

166

Je fais donc une différence entre "faire du théâtre" sur un plateau avec de vrais professionnels, des amateurs répétant une pièce au sous-sol d'une maison de la culture, à l'école lorsque cela est possible, ou bien encore entre amis passionnés voulant monter un projet, aller à Avignon par exemple, et le simple fait de voir un spectacle de deux heures sans avoir assisté à ces longs mois de répétitions nécessaires à la construction d'une pièce. Cette remarque est valable pour  toute création. La différence est cruciale entre l'acte de créer et celle de regarder (film, pièce, tableau, livre, etc.), elle n'est pas assez mise en avant par les artistes eux-mêmes en général. C'est donc à l'aune de cette expérience que mon regard viendra prendre la main dans le sac ceux qui ici voudraient nous faire le coup de papa la nostalgie  Voici quelques mots relevés dans les pages 26 à 38. "Le théâtre est lié au sacré". "Dans la salle, on retrouve la ségrégation sociale dans la séparation entre le public populaire, qui se tient debout au parterre, et les spectateurs aisés, bourgeois et aristocrates, qui occupent les sièges des galeries et des loges". "La représentation des vices et des vertus peut éclairer les hommes"...

 

167

"Le théâtre pré-révolutionnaire". " Théâtre engagé"… La pauvreté de ces références révèle mon manque d'intérêt pour ces articles peu réjouissants. - L'école n'est pas là pour donner du plaisir, me rétorquera-t-on. Que voulez-vous répondre à ça ? Vient ensuite un sujet pas à pas, un mode  d'emploi en quelque sorte à suivre si l'on est un bon élève évidemment. Caligula d'Albert Camus. Personne ne pourra proposer un exercice aussi brillant, sur Camus et Caligula, que celui qui nous est proposé là. Comme il n'est pas signé, je ne sais à qui envoyer mes fleurs, cela est bien regrettable. Seulement cette personne sans nom est "spécialiste mondiale sur la question", elle connaît l'intégralité de l'œuvre de Camus, elle s'est consacrée à Caligula toute sa vie, je pense qu'elle doit avoir près de quatre-vingts ans. Pourquoi je vous dis ça ? Je suis révolté par ce travail de "comment on traite un sujet" sur une pièce qu'on ne peut pas connaitre à dix-huit ans, sauf superficiellement et à quelques exceptions près. C'est un peu comme si l'on montrait à un handicapé ne pouvant pas marcher comment l'on met un pied devant l'autre pour avancer. Cette remarque n'est pas gratuite, j'ai vécu de semblables choses…

 

 

 

 

168

… Quelques kinés bien intentionnés m'ont fait la morale là-dessus, mais heureusement pas tous, puisque je suis "un peu" handicapé. Le fait de donner un tel exemple à suivre pour la préparation au BAC en dit long sur l'objectif de l'enseignement : vous en foutre plein les yeux, vous démontrer que vous n'arriverez jamais à la cheville de cet exemple, jamais, nuls, vous n’êtes tous que des nuls. L'école est là pour décourager l'ensemble de sa population, sélectionner, noter, trier, et ne garder que les meilleurs, le reste, au boulot sur les chantiers ou, si c'est au chômage, on s'en fout, pas notre problème, nous, on a fait ce qu'on a pu… Je suis conscient de la dureté de mes propos, mais comment expliquez-vous la violence de vos établissements sinon qu'elle a une origine ? La voilà, devant vos yeux, à vous de juger. Et pour finir, je vous dis ce qu'il ne faut pas faire, c'est marqué dessus : "Ce qu'il ne faut pas faire c'est choisir cet exercice si vous ne connaissez pas le thème de la pièce ni sa place dans l'œuvre de Camus ! " À bon entendeur, salut. Maintenant attaquons-nous à un article de Brigitte Salino, de septembre 2011, sur Roméo et Juliette de Shakespeare monté par Olivier Py.

 

169

Olivier Py, 48 ans, a fait l'école nationale supérieure des arts et techniques du théâtre, le conservatoire national supérieur d'art dramatique, il a étudié la philosophie et la théologie, si je m'en tiens aux données de Wikipédia notre bible à tous. Il a publié vingt livres, a joué dans une dizaine de pièces, mis en scène près de soixante-dix spectacles entre 1988 et 2013. C'est donc à partir de son travail, de son expérience béton, théâtrale et personnelle, que nous arrive encore l'exemple à suivre. La critique, Brigitte Salino, incontestable spécialiste des planches, nous donne un papier sur ses impressions toutes personnelles du Roméo et Juliette de Py. Combien d'élèves sont allés plus de dix fois au théâtre dans leur vie ? Que voulez-vous que ce brillant article leur dise sinon que ce couple shakespearien, statufié dans le marbre depuis des siècles, a été maltraité, à tort ou à raison, par cet artiste contemporain. Nous sommes dans l'anecdote, le débat est impossible, il ne peut avoir lieu par manque d'expérience et de préparation. Ce point de vue, je le mets sur la table de discussion, car peut-être, sur ce coup, ai-je tords ? Tout à coup, j'ai un doute ! Donnez-moi votre avis, merci.  

 

170

Références données dans cette rubrique "théâtre", de la page 26 à 38.

- Le Cid, Horace, Polyeucte, Don Sanche d'Aragon, Andromède, La conquête de la toison d'or, Psyché, Médée, L'Illusion comique, de Corneille

- Andromaque, Britannicus, Bérénice, Bajazet, Phèdre, Athalie, de Jean Racine

- Tartuffe, Le Misanthrope, Dom Juan, George Dandin, Les Fourberies de Scapin, Les Précieuses ridicules, Le Bourgeois Gentilhomme, de Molière

- La double inconstance, de Marivaux

- Le Barbier de Séville, Le Mariage de Figaro, de Beaumarchais

- Henry III et sa cour, d'Alexandre Dumas père

- Hernani, Ruy Blas, de Victor Hugo

- Ubu roi, d'Alfred Jarry

- Les Mains sales, de Jean-Paul Sartre

- Les Justes, Caligula, d'Albert Camus

- La Nuit vénitienne, Lorenzaccio, Spectacle dans un fauteuil, André del Sarto, Les Caprices de Marianne, On ne badine pas avec l'amour, d'Alfred de Musset

 

171

- Le Gendre de Monsieur Poirier, Les Lionnes pauvres, d'Émile Augier

- La Dame aux camélias, La Question d'argent, Le Fils naturel, d'Alexandre Dumas fils

- Le Voyage de Monsieur Perrichon, La Cagnotte, d'Eugène Labiche

- La vie des douze Césars, de Suétone

- La Machine infernale, de Jean Cocteau

- Œdipe roi, de Sophocle

- La guerre de Troie n'aura pas lieu, de Jean Giraudoux

- Euridyce, de Jean Anouilh

- La Reine morte, de Henry de Montherlant

- Hamlet, Le Conte d'hiver, Songe d'une nuit d'été,  de Shakespeare

- La vie est un songe, de Calderon

- La nuit de Valognes, Variations énigmatiques, Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran, La Tectonique des sentiments, Kiki van Beethoven, d'Éric-Emmanuel Schmitt

- Art, Le Dieu du carnage, de Yasmina Reza

 

172

- Théâtre sans animaux, Musée haut, musée bas, René l'énervé, de Jean-Michel Ribes

- La Nuit juste avant les forêts, Combat de nègres et de chiens, Quai Ouest, Solitude des champs de coton, Le Retour au désert, Roberto Zucco, de Bernard-Marie Koltès

- Incendies, de Wajdi Mouawad

- Il y avait foule au manoir, La Comédie du langage, de Jean Tardieu

- Le Rhinocéros, d'Eugène Ionesco

- Oh les beaux jours, de Samuel Beckett

- Des journées entières dans les arbres, de Marguerite Duras

- Les Bains, de Maïakovski

- Mère Courage, La Vie de Galilée, de Bertolt Brecht

- Le Soulier de satin, de Paul Claudel

- Le Sens de la marche, Paolo Paoli, d'Arthur Adamov

- Par-dessus bord, Le Compte rendu d'Avignon, de Michel Vinaver

- Le Dernier Caravansérail, Les Éphémères, d'Ariane Mnouchkine

 

173

-  Anthologie du théâtre français, de Philippe Tesson

- et les auteurs suivants : Diderot, Alfred de Vigny, Georges Feydeau, Eugène Labiche, Jean-Louis Barrault, Patrice Chéreau, Stanislas Nordey, La commedia dell'arte, Roger Planchon, Jean-Claude Grumberg.

Écriture poétique et quête du sens, du moyen âge à nos jours.

Quelques mots soulignés au crayon. "Un poète est un écrivain qui compose de la poésie. Au-delà de cette définition standard, le terme de "poète" évoque une manière de voir la vie et de la vivre, une façon d'appréhender le monde qui se marque par une distance avec le "commun des mortels". "Être désigné, il se distingue du reste des humains par ce "don" qui lui est fait, mais reste un "homme", avec des faiblesses. " "Avant tout un créateur, celui qui fait œuvre… le poète est une partie liée au sacré, à une manière enchantée, spirituelle de voir le monde. Le langage, à la fois outil banal de communication et forme la plus haute de la spécificité humaine. " Le poète, aujourd'hui, est celui qui saura lire les mots ordinaires venant de la bouche de n'importe qui, et révéler où se cache la poésie là-dedans. 

 

174

"L'artiste est un homme inutile, mais nécessaire, son œuvre parle au cœur et aux sens… Le poète prend en charge l'histoire d'un peuple". Ah ! J'aimerai que cela soit ! Mais aujourd'hui, peut-on encore parler de poésie ? "Il cherche par son lyrisme à exprimer les sentiments et émotions qui l'étreignent" - "Sensibilité exacerbée, fonction éclairante…" Ceci est valable pour tout artiste, mais quel poète joue ce rôle maintenant, je veux des noms ! Je remplacerai volontiers le mot poète par celui d'artiste. "Enfin le poète est celui qui, par les mots, essaie d'entrevoir le monde autrement, celui qui guide ses lecteurs vers des idées ou un engagement. La poésie a alors une fonction politique" – "La poésie est une insurrection" … Ah bon ? Nous en sommes loin, diable ! Voyons maintenant l'article du Monde : La flamme du slam… Où comment la perversion s'immisce dans les bons sentiments. Les rédacteurs de cette revue n'ont pas oublié qu'ils s'adressaient aussi à la base00, et qu'il fallait lui donner un os à ronger, et l'impression qu'elle compte, principalement par ses champions, et en l'occurrence par Grand Corps Malade, l'un de nos plus grands poètes vivants.

 

175

Seulement, la démagogie de mette ça entre ces pages de l'intelligentsia a ses limites : les voilà mises à plat dans ces deux pages que je vais m'empresser de lire attentivement... Démobilisation totale. Je viens de consacrer un certain temps à parcourir ce thème de la poésie et me sens vidé de tout désir de mettre des mots sur ce que je ressens. Ce désespoir, léger certes, doit passer comme le temps gris recouvrant actuellement le ciel de notre belle banlieue et le cœur de ses concitoyens. Passons vite à autre chose ! 

Références données dans cette rubrique "poésie", de la page 40 à 58.

- Les Métamorphoses, d'Ovide

- Le Bestiaire ou cortège d'Orphée, Calligrammes, d'Apollinaire

- Orphée, Le testament d'Orphée, de Jean Cocteau

- Orfeu Negro, de Marcel Camus

- La Nouvelle Eurydice, de Marguerite Yourcenar

- Eurydice, de Jean Anouilh

- Sonnets pour Hélène, de Ronsard

 

176

- L'Habitude, Capitale de la douleur, Poésie et vérité, Sept poèmes d'amour en guerre, L'Amour de la poésie, de Paul Éluard

- Ultima verba, les Châtiments, Les Contemplations, Les Djinns, Les orientales, de Victor Hugo

- J'avoue que j'ai vécu, de Pablo Neruda

- Une saison en enfer, Les Illuminations, d'Arthur Rimbaud

- L'Après-midi d'un Faune, Un coup de dés jamais n'abolira le hasard, Poésies, de Mallarmé

- Contes cruels, de Villiers de L’Isle-Adam

- Les Complaintes, de Jules Laforgue

- Tête d'or, de Paul Claudel

- Cœur double, de Marcel Schwob

- Pélléas et Mélisande, de Maurice Maeterlinck

- Les Tragiques, d'Agrippa d'Aubigné

 

177

- De l'angélus de l'aube à l'angélus du soi, de Francis Jammes

- Le parti-pris des choses, Les Hirondelles, La Rage de l'expression, de Francis Ponge

- Émaux et camées, de Théophile Gautier

- Les Trophées, de José Maria de Heredia

- Les méditations poétiques, d'Alphonse de Lamartine

- Les Regrets, de Joachim du Bellay

- Lettres à un jeune poète, de Rainer Maria Rilke

- La France de profil, de Claude Roy

- La Diane française, d'Aragon

- Le spleen de Paris, Les Fleurs du Mal, Les petits poèmes en prose, de Baudelaire

- L'accent grave et l'accent aigu, de Jean Tardieu

- Midi 20 (album CD), de Fabien Marsaud, alias Grand Corps Malade

- Fables, de La Fontaine

- Quatre poèmes d'amour à Hélène, de René-Guy Cadou

 

178

- Gaspard de la nuit, de Aloysius Bertrand

- Les Chants de Maldoror, d'Isidore Ducasse

- Les Illuminations, de Paul Verlaine

- Manifeste du symbolisme, de Jean Moréas

- Le Roman inachevé, d'Elsa Triolet

- L'Union libre, Clair de terre, d'André Breton

- L'Inachevable, La Beauté des le premier jour, Le Siècle ou la parole a été victime, Raturer outre, d'Yves Bonnefoy

- et les auteurs suivants : Saint John Perse, Eugène Guillevic, Marc Smith, Max Jacob, Pierre Reverdy, Hélène Laurent, Louis-René des Forêts, André du Bouchet, Henri Cartier-Bresson, Montaigne, Malherbe, Pascal, Stendhal, Lautréamont, Voltaire, Philippe Sollers.

 

179

" Ces 900 000 jeunes inactifs découragés de tout " est le titre d'un article du "Monde" du 2 juin 2013. Le chiffre est impressionnant, plus encore que 3 300 000 chômeurs en France, par exemple. On se figure cette masse humaine défilant de la porte d'Orléans à la porte de Clignancourt, traversant Paris et criant leur situation au peuple ayant pu se faire une place au soleil, à défaut à l'ombre, dans ce monde de merde que j'essaye à la force du poignet de réparer le mieux que je peux, espérant toujours qu'un journaliste me plagiât sans mon consentement, puisque mes écrits et mes idées appartiennent à tous mes lecteurs sans restriction. 900 000 individus comme vous et moi, vivant quelque chose qu'on ne voudrait pas vivre, même si aller au bureau tous les matins n'est pas idéal pour le moral. L'essentiel est d'avoir des repères, et de repères, eux aussi, comme nous tous, en ont, mais sommes-nous à même d'en imaginer la teneur ? Nous avons tous vu des films, des documentaires, lu, mille articles dans les journaux, et des livres par centaines, ils nous expliquent tout ça très bien, seulement quelle est la réalité lorsqu'on n'a rien, lorsqu'on n’est rien, dans une société où à chaque pas fait n'importe où…

 

180

… Des commerçants vous sourient pour vous vendre leurs marchandises. Quels recours ont-ils pour survivre ? Ces "jeunes" ont entre 15 et 29 ans, c'est notre jeunesse, ce sont nos enfants, ils ont tous été à l'école obligatoire. Quelques mots pris au hasard de cet article : "L'école l'a jeté sans s'inquiéter de son devenir". "Pour les jeunes des cités, il n'y a que du travail de chien… on va pas ramasser la merde des gens comme nos parents"; "On est bien chez nos parents, et entre nous, on discute, on rigole, on est solidaire, sinon on pèterait un câble". "Ils sont passés dans la moulinette de l'éducation nationale…". En écho à cette réalité, je voudrais relever quelques mots du livre de Ruwen OGIEN : La guerre des pauvres commence à l'école. "Les décrocheurs ont pris la mesure de la situation économique générale qui prive des millions de personnes à l'accès à un emploi satisfaisant et correctement rémunéré…Pourquoi continuer à jouer à ce jeu-là ?". "Pour eux, l'école est une humiliation permanente". "Si vous êtes pauvre, chômeur de longue durée, malade ou sans-abri, c'est de votre faute, alors…

 

181

dans cette logique, il n'est pas immoral d'abandonner à leur sort les laissés-pour-compte du marché du travail, puisqu'ils sont responsables de ce qui leur arrive". Incontestablement, l'école actuelle est adaptée pour un petit nombre d'entre nous, pour le reste, la majorité, elle n'est pas à la hauteur de l'espérance d'un être humain. Alors que je vous dis ces vérités implacables, un article dans Télérama sort cette semaine (19/5/2013) "Une autre école est possible"; Ah ! Enfin une lueur d'espoir… Je souligne quelques mots en rouge, assis que je suis dans ce restau rapide Exki, dont j'ai déjà parlé ici et où je m'y sens bien pou vous écrire. "On l'ignore souvent, l'école n'est pas obligatoire, c'est l'instruction qui l'est". " Tous les neurologistes vous le diront: le cerveau se développe là où on l'utilise avec de l'enthousiasme, véritable engrais neurologique. Tout ce qui s'apprend dans un acte d'enthousiasme s'inscrit en nous à jamais. À contrario,  l'enseignement tel qu'il est pratiqué aujourd'hui dans les écoles va à contre-courant du fonctionnement optimal du cerveau, dit André Stern".

 

182

" L'école, structurellement, ne peut se réformer, elle finira par disparaitre. Sa fonction principale est de garder les enfants pendant que les parents travaillent". "La prochaine révolution viendra des élèves eux-mêmes, de leurs compétences des nouvelles technologies, et de ce que vont nous révéler les neurosciences… Le métier d'enseignant va en être complètement changé, il va lui falloir faire un pas de côté, pour devenir moins un éducateur qu'un accompagnateur". Je me souviens de l'Abbé Pierre criant aux politiques de l'époque un truc comme ça : "et que ferez-vous donc lorsque des millions de pauvres viendront sur votre sol sans vous demander votre avis ?". Sacré Abbé, vous aviez déjà, avant tout le monde, le sens de la communication. Aujourd'hui, ces gens-là, on les refoule à la frontière, ou mieux, on les laisse crever dans leur misère, piochant ici ou là dans nos poubelles bien garnies, nos restes périmés. Suis-je en train de dévier le propos qui est le notre ? Peut-être, peut-être pas ! La misère secrétée par l'éducation est aussi celle provenant de la maison de nos propres familles, parfois, souvent…

 

183

Ces pauvres viennent bien entendu, d'ailleurs : du monde de la misère … C'est là notre travail de penseurs, de notre responsabilité, d'apporter des réponses envisageables, réalisables par ces politiques qui à peine arrivés au pouvoir se trouvent castrés de toutes initiatives intéressantes. Depuis un an, nous sommes dans un gouvernement de gauche et rien des choses promises, importantes, ne sont évoquées, leurs réponses à la pauvreté n'a d'égal que leur médiocrité. Savent-ils seulement qu'il y a 900 000 exclus rejetés "par leur faute" entre la rue et l'enfer ? Et lorsque ce chiffre n'évoque qu'une partie de l'Iceberg, ne serait-il pas temps d'être dans ce fameux changement dont se glosaient ceux qui ne voulaient que le pouvoir ? Après cet intermède, revenons maintenant à notre cahier de Français afin d'obtenir le Bac à coup sûr.  

La question de l'homme dans les genres de l'argumentation, du XVIe siècle à nos jours. Le candidat au Bac doit savoir ce qu'est un débat, alors vite fait bien fait, le Monde nous sert un exemple parmi des milliers de comment c'est la démocratie lorsqu'elle réuni deux ou plusieurs individus n'ayant pas le même avis sur une question donnée.

 

184

Donc bon, je lis le dialogue de sourds entre deux philosophes : Sylviane Agacinski et Ruwen Ogien, dont j'ai déjà parlé ici. Il est convenu, cela va de soi, tout débat doit s'organiser impérativement dans un esprit contradictoire, pour ne pas dire conflictuel, guerrier. Nous pourrions, si vous voulez mon avis, tout aussi bien envisager des débats se déroulant autrement. Un premier groupe ou individu venant exposer son histoire, ensuite l'autre partie, faire la même chose avec une opinion contraire. Dans ce cas, la synthèse serait à faire par le lecteur ou l'auditeur. À voir tous ces arguments défiler devant les yeux, je m'endors, et abandonne ma lecture à la septième répartie de ces personnes franchement inutiles à mon intelligence. Références données dans ces pages 60 à 74. - Essaies, de Montaigne

- Les Pensées, Les Trois Discours sur la condition des Grands, de Pascal

- Les salons, Le Neveu de Rameau, Voyage autour du monde, Supplément au Voyage de Bougainville, de Diderot.

 

185

- L'Iliade et L'Odyssée, d'Homère

- L'île des esclaves, de Marivaux

- 1984, d'Orwell

- Matin brun, de Frank Pavloff

- Le Manifeste du surréalisme, d'André Breton

- Le Petit Chaperon rouge, de Perrault

- Les  L'année terrible, Choses Vues, de Victor Hugo

- Indignez-vous, de Stéphane Hessel

- La Carte et le Territoire, de Michel Houellebecq

- Alias Caracalla, de Daniel Cordier

- Le Monde d'hier, de Stephan Zweig 

- De l'esprit des lois, Les Lettres persanes, de Montesquieu

- Les Confessions, de Jean-Jacques Rousseau

- Les Maximes, de La Rochefoucauld

 

186

- Les Caractères, de La Bruyère

- L'Être et le Néant, L'Existentialisme est-il un humanisme ? de Sartre

- Les Liaisons dangereuses, de Choderlos de Laclos

- Tristes Tropiques, de Lévi-Strauss

- La nouvelle poésie nègre et  malgache, de Senghor

-  Les Lettres philosophiques, de Voltaire

- Contre Sainte-Beuve, de Proust

- Variété, de Paul Valéry

- Essais Critiques, de Roland Barthes

- Art poétique, de Boileau

- Lettres sur quelques écrits du temps, de Fréron

- Fabrique de romans : maison Alexandre Dumas et compagnie, de Mirecourt

- Corps en miettes, de Sylviane Agacinski

- La Vie, la Mort, l'État, de Ruwen Ogien

 

187

et … Sade, Thomas d'Aquin, Thomas More, Jules Verne, Charles Fourier, Valladolid, Jean-Claude Carrière, Ronsard, Villon, Bruzen de La Martinière, Axel Kahn, Roselyne Bachelot, Michèle André, Nadine Morano, Elisabeth Badinter, Eric Zemmour, Philippe Tesson, Thierry Ardisson, Bernard Murat, Général de Gaulle, Serge Moati, Laurent Ruquier, François Jost, Nicolas Beytout, Etienne Mougeotte, Stéphane Guillon, Lady Gaga, Christophe Willem, Eric Naulleau, Pierre Bédier, Isabelle Balkany.

Voilà M'sieurs-Dames de quoi occuper votre retraite agréablement.

Croire en l'école vous aliène, j'en veux pour preuve ce texte de La Boétie (Discours de la servitude volontaire) que je vous transmets tel que. "Celui qui vous maîtrise tant n'a que deux yeux, n'a que deux mains, n'a qu'un corps et n'a autre chose que ce qu'a le moindre homme du grand nombre infini de vos villes ; sinon qu'il a plus que vous tous, c'est l'avantage que vous lui faites, pour vous détruire. D'où il a pris tant d'yeux, dont il vous épie, si vous ne les lui baillez ?

 

188

Comment a-t-il tant de mains pour vous frapper, s'il ne les prend de vous ? Les pieds dont il foule vos cités, d'où les a-t-il, s'ils ne sont les vôtres ? Vous vous affaiblissez, afin de le faire plus fort et plus roide, à vous tenir plus court la bride ; et de tant d'indignités, que les bêtes mêmes ou ne sentiraient point, ou n'endureraient point, vous pouvez vous en délivrer, si vous essayez, non pas de vous en délivrer, mais seulement de le vouloir faire. Soyez résolus de ne servir plus, et vous voilà libres. » Vous préparez le Bac et devez faire un devoir sur Rabelais. Qu'à cela tienne, un article vous donne la voie à suivre et on demande au plus grand spécialiste de la question, ayant consacré sa vie à cette œuvre-là, de nous montrer comment procéder. Lorsqu'on écrit un papier et avons des années étudié les productions d'un écrivain, d'un artiste, alors avec le temps on en a une idée personnelle de qualité, car seul le passage du temps donne les cheveux gris de la maturité. Comment peut-on mettre ainsi côte à côte des poussins encore tout verts et des coqs à la crête rouge vif à aux dents longues ? C'est de la grande stupidité, ou mieux un manque d'esprit critique, un aveuglement dû aux bons sentiments incontestables des protagonistes.

 

189

D'où nous pouvons avancer à l'intention de tous les jeunes : méfiez-vous de ces vieux, ils sont méchants ! Rabelais donc. Rabelais n'est pas une lecture pour moi,  désolé, je ne ferais donc aucun effort pour le lire ou le comprendre, je n'y peux rien, c'est ainsi ! "Le chêne et le Roseau" de La Fontaine, réécrit par Jean Anouilh. Franchement, je veux impérativement vous poser cette question qui me taraude : qui connaît Jean Anouilh parmi les jeunes d'aujourd'hui ? Cet exercice est vieux comme mon grand-père, ça sent le renfermé, ça pu, on devrait les laisser tous deux en paix au fond de leurs tombes respectives… Un article de Dominique Noguez du 27 juin 2007 rappelle intelligemment ce qu'est pour lui la littérature, profitant d'un conflit entre un auteur ayant pris "Les misérables" de Hugo en otage pour en faire à son tour deux énormes pavés. Seulement, les héritiers de Victor ont mis cela entre les mains de la justice, réclamant le retrait de ces livres et des dommages et intérêts de 4,5 millions de francs, c'était avant l'arrivée de l'euro. On peut tout en écrivant, et Noguez de signaler ce qu'on peut faire plus précisément : "Suite, réponse, reprise, adaptation, pastiches, parodies, allusion…

 

190

… Mise en abyme, traduction, mise en vers, la littérature s'est toujours nourrie de littérature (et la peinture de peinture, la musique de musique, etc.)" Perso, j'ai remastérisé 47 textes de 47 auteurs, les revisitant avec mes mots, pas avec les leurs (sic). Et un jour où j'en parlais à une libraire, elle me fit : "Et vous trouvez qu'il faut réécrire "La Recherche" de Proust avec d'autres mots ?", la regardant dans les yeux, je lui répondis que oui, car Proust n'est pas facile à lire... Je ne lui ai pas avoué tout le plaisir, tout le bonheur, à faire ça, c'est une jouissance absolue. Guide pratique. Méthodologie et conseils. Depuis toujours, lorsque j'essaye "d'accumuler des connaissances", pour mieux les maîtriser, s'opère en moi, sans que je le veuille, une angoisse si forte me fermant la porte à toute velléité de compréhension. En fait, je le sais maintenant, ces efforts réclamés au cerveau déclenchent un stress que mon corps souffrant d'insuffisance surrénalienne ne peut affronter, et au lieu d'exciter mon désir de bien faire, il me fatigue dans un premier temps, puis me désespère, me déprime physiquement. Pauvre chéri, dites-vous, et vous avez raison…

 

191

… Car si l'on commence à écouter les maux des uns et des autres, ma pauvre dame, on n'en finirait pas. Donc, face à ce handicap, la seule parade que j'ai trouvée, depuis bien longtemps maintenant, est de ne faire les choses qu'avec plaisir. Là est toute ma philosophie, mon instinct de survie, je n'en ai pas d'autres, cela me constitue de la tête aux pieds, heureusement car sinon, quelle eut été mon existence autrement ? C'est pourquoi je veux être l'avocat de tous ceux qui à l'école n'ont pas trouvé là mieux que chez eux, mieux qu'à la maison. L'éducation nationale doit aider chacun dans sa particularité, et surtout ne jamais, je vous dis bien jamais, décourager, dégouter de la culture, quelle qu'elle soit. Amen ! Me faut-il un bon Coach pour retrouver le chemin du bac ? Coaching.   à Arriver à l'heure. à Apporter votre matériel. à Utilisez votre temps. à Rester concentré. à Rester naturel. à Soyez poli et souriant. à Maîtrisez votre stress. à Comprendre la question demandée. à Organisez votre réponse. à Lire le texte qu'on vous donne à lire, en tirer un axe. à Conduire l'explication. à Soyez intéressant, confiant, mais pas arrogant, soyez optimiste à la fin.

 

192

Après cet intermède sur le bac, et avant de passer un peu plus tard sur un autre thème pour l'obtention de ce fameux diplôme, revenons à Ivan Illich, à "une société sans école" et au "rite du progrès". Les normes imposées par les plus forts seront celles de tout le monde, rien d'autre n'est envisageable pour personne ni aucun pays. Quel risque encourt une société sans école, et y aurait-il du sang face à un mouvement de masse ? Se demande-t-il. "L'instruction ne peut être qu'une activité personnelle" : voilà une parole digne de Molière, le savoir n'est pas une marchandise. Il nous dit que le recours à la drogue serait comme une réponse, un soulagement aux pressions des maîtres et à la course aux diplômes, et va jusqu'à comparer la société scolarisée aux activités guerrières, sur le modèle de celle du Vietnam… Il y va fort le père Illich, je note toutefois son esprit libre de toutes limites. "L'aptitude de l'homme à poursuivre des buts absurdes…", cela est bien dans la nature humaine, il faudra un jour expliquer pourquoi il en va ainsi chez ces homos sapiens marchant debout.

Analyse spectrale des institutions.

 

193

"Plus il y a de morts vietnamiens et plus les Etats-Unis se font d'ennemis dans le monde", voilà une vérité méritant une minute de silence, et toute une vie de réflexion… Lancer des milliers de bombes du haut des avions faits pour ça coute la vie à beaucoup et pour les survivants, l'horreur absolue. Mais cela ne fait pas partie des statistiques, jamais nulle part la misère n'a fait fortune ! Passons à autre chose : "Dans les pays pauvres on devrait restreindre à deux ou trois modèles de voitures, robustes, lents mais capables de rouler partout, cela simplifierait le stockage et l'entretient…" dit-il, et rajoute : "On pourrait prévoir un système de rotation de façon à utiliser ces voitures 24h/24." Précurseur notre Illich ? Surement. Que voulez-vous à force d'écrire, il arrive parfois de belles histoires au bout de la plume… Seulement, les états ne l'entendent pas de cette oreille et encore moins les vrais décideurs que sont les usines devant produire toujours plus, peu leur importe si ce qui est produit correspond ou non aux besoins des gens. "Car ce que l'on veut c'est la vente des machines qui permettent d'extorquer aux contribuables l'argent nécessaire à la construction et l'entretien de nos routes et autoroutes".

 

194

"On justifie cette façon de faire par la réalisation de précieuses économies du temps…" Que viennent faire ces questions de voitures et de routes ici ? Pour lui, c'est dans ces établissements que se forment les futurs consommateurs de demain, plus encore, ils créent des besoins qui ensuite deviennent des nécessités pour tous. Les systèmes, dont fait partie l'éducation, sont des bureaucraties dont l'un des buts est la manipulation des êtres humains. "Le chômage est le résultat de la modernité, c'est l'oisiveté d'un homme pour qui il n'y a rien à "fabriquer" et qui ne sait pas quoi faire, dans quoi agir. Le chômeur croit que travailler est bon et ne pas travailler mauvais." Peut-on encore dire cela aujourd'hui ? Pour moi, cette question du chômage ne se pose pas en ces termes. Bien entendu le travail apporte une réponse à deux choses bien distinctes : l'occupation et la rémunération. Pour ce qui est de la première, il ne manque pas aujourd'hui de moyens pour occuper son temps, quel que soit votre niveau social, intellectuel. Par contre, pour ce qui est de l'argent, je pense que l'on est loin de comprendre qu'il faut payer un chômeur pendant ce temps où il ne "fabrique" pas, peu importe sa durée.

 

195

Je reviens donc toujours sur cette évidence : il faut un revenu pour tous afin de vivre tout simplement, soit par le salaire de son travail, soit par une indemnité compensatrice de 600 € par mois, ainsi qu'un petit logement gratuit de 15 m2 par personne, lorsque les gens n'en ont pas. Il n'est plus question d'accepter qu'une personne soit à la rue et sans revenus. Dès maintenant toute l'énergie des politiques devrait s'orienter vers cet objectif principalement, et convertir les constructeurs de voitures en constructeurs ou restaurateurs de "petits appartements". Logique de l'absurde. "Que faut-il faire face à la crise de l'enseignement, sinon revoir le principe sur lequel l'éducation se fonde. Les désertions se multiplient parmi les élèves de l'enseignement secondaire et les instituteurs." Dewey propose : "Faire de chacune de nos écoles un embryon de vie communautaire où de nombreuses occupations reflètent la vie de la société plus vaste, en les imprégnant de l'esprit de l'art, de l'histoire et des sciences." "À l'opposé du gavage (de connaissances) chaque personne désireuse de s'instruire serait à même de trouver les contacts nécessaires, de participer à sa propre croissance…" 

 

196

"Ce qu'il nous faut, ce sont des structures qui mettent les hommes en rapport les uns avec les autres et permettent à chacun de se définir en apprenant et en contribuant à l'apprentissage d'autrui." Les réservoirs du savoir. Ceux qui sont pour ne rien bouger, "demandons-leur où ils ont acquis leurs connaissances, leurs convictions, ils finiront par admettre que c'est le plus souvent en dehors d'un établissement scolaire. L'amitié ou l'amour, des programmes de télévision, des lectures, une rencontre fortuite ou bien quelques expériences personnelles, dans un hôpital, dans un atelier, un bureau, etc."  "…Ils ne conçoivent pas une société déscolarisée. Il nous revient donc de montrer que le contraire de l'école n'est pas utopique, que nous pouvons faire confiance à un apprentissage des connaissances qui soit l'affaire de chacun." "Donner à celui qui veut apprendre (tout au long de son existence) les moyens d'entrer en contact avec le monde autour de lui (alors que tout est fermé aujourd'hui)". Et comment ne pas lui donner raison lorsqu'il dit des bêtises comme celles-ci : "Il faut se consacrer à modifier tout d'abord le système politique et économique." Rien que cela !

 

197

Alors qu'internet n'existait pas encore, il écrit : "À tous ceux qui veulent apprendre, il faut donner accès aux ressources existantes, à n'importe quelle époque de leur existence… Permettre eux porteurs d'idées nouvelles, à ceux qui veulent affronter l'opinion publique, de se faire entendre." Merci la toile, maintenant tout cela est possible, à tous et à tout moment. "Abolir la ségrégation fondée sur la possession de certificats ou de diplômes." Voyez, avec les polémiques actuelles sur l'intérêt du Bac, entre autres, comme nous en sommes loin. "L'erreur consiste à se demander : "Que faut-il que quelqu'un apprenne ?" La question serait plutôt : "Celui qui veut apprendre, de quoi doit-il disposer, avec qui doit-il se trouver en rapport ?" …Et n'oublions pas ce miracle de l'émerveillement face à un nouveau savoir, apprendre par  exemple que les abeilles servent à polliniser les fleurs permettant ensuite d'avoir des fruits sur les étals de nos magasins. Plus on avance dans cette lecture, plus on se rend compte de l'extraordinaire révolution qu'à été l'arrivée de la toile dans nos chaumières, divulguée partout dans le monde, et adoptée par tous, même s'il y a mille critiques à faire sur cette  nouvelle technologie fondamentale.

 

198

L'homme qui sait, ferait-il tout pour garder pour lui seul son savoir ? Je relève cette formule d'Illich : "Un garçon ou une fille de douze ans doit devenir un citoyen responsable en commençant de tenir un rôle, d'assumer des tâches dans la communauté." Cette phrase m'invite à rappeler une de mes grosses obsessions : à quoi pourrait servir les travaux de ces 650 000 postulants au bac sinon obtenir ce papier grâce à des notes surévaluées ou non. Où passent ces millions de copies rédigées par nos jeunes, portant en eux, probablement, les réponses aux questions que tous les jours se posent ces vieux machins installés confortablement dans leurs fauteuils rouges et payés 12 000 € par mois, alors que les travailleurs manuels se crèvent le cul pour un SMIC qui augmente tous les ans de 0,5 %... Un scandale, ras le bol ! Ces faiseurs, de lois inutiles s'ajoutant à des millions d'autres lois, nous noient de leurs mots pour couvrir les nôtres de maux, et nous avoir comme des gueux ignares et innocents. Et le plus effrayant,  mes chers cons citoyens, c'est qu'ils nous coutent la peau des fesses, ils sont indécrottables, collés à ces hémicycles comme des abeilles à une ruche, et le miel, ils le gardent pour eux, bien sûr.

 

199

Et si dans ces copies se trouvaient les bonnes réponses à nos problèmes actuels ? Si c'était le cas, alors, vite fait, faut les détruire. J'ai du mal à imaginer ces tonnes de papiers, gardés dans des coffres de l'éducation nationale pendant un an avant d'être détruits définitivement en les jetant à la mer pour fondre l'essence même de tout espoir. Peut-être s'il en est ainsi c'est que l'on veut montrer à ceux qui voudraient prendre la place des vieux que ce sont eux qui décident de leur vie ou de leur mort… Être jeune n'a jamais été une sinécure, d'autres avant moi s'en sont rendu compte, et en ont fait des chansons, et même des poèmes. "L'école protège la jeunesse des périls de l'existence. Que vaut cet argument aujourd'hui ?" L'école est un établissement où les jeunes sont rassemblés pour les protéger des loups rôdant dehors, dans la rue. Le diplôme c'est :  "Convaincre autrui d'apprendre, ce qu'il ne désire pas savoir à une certaine période de son existence, un programme obligatoire et préalablement défini…" tout cela relève de la plus grande … connerie, pire, souvent, du désespoir des jeunes qui en arrivent parfois à des extrêmes fous… La cause de ces désordres est à chercher de ce côté-là avant tout.

 

200

"Aux Etats-Unis, le nombre des infirmières est en diminution, parce que maintenant, pour exercer ce métier, il faut suivre quatre années d'études spécialisées. Des femmes issues de familles modestes suivaient naguère un cycle de deux ans : aujourd'hui, elles cherchent un autre emploi… Pour ne pas manquer d'infirmières, il suffirait d'encourager celles qui exercent déjà à former de nouvelles, et les juger, non pas sur leurs diplômes, mais sur leurs aptitudes réelles. Les diplômes représentent un obstacle à la liberté de l'éducation…" Mille profs donnent le même cours à mille classes réparties dans le pays. Un seul pourrait être enregistré et retransmis sur internet. Ainsi, nous ferions l'économie de 999 profs, alors libres et disponibles à autre chose… Demain, tous les cours seront ainsi organisés, et les enseignants seront là pour guider, aider à la gestion de ces informations (vous remarquerez que je n'emploie pas, volontairement, ce saint-sacré-mot ne voulant plus rien dire : "connaissance"). La fonction de l'enseignant serait alors d'accompagner et évidemment ne jamais juger le travail d'autrui. Les maîtres mots pour définir l'école seraient donc : lieu d'accompagnement et de bienveillance.

 

201

25 % des 18/25 ans connaissent le chômage dans notre pays, alors, M6 a montré à notre Président de la République un reportage sur ceux qui dans ce domaine ont trouvé la solution la plus payante : l'Autriche. Pour nous tous, ce pays devient le modèle à suivre. Voyons de quoi il en retourne. Leur mot magique "est : l'apprentissage. Dès l'âge de 10 ans, lorsque l'école juge que les élèves n'ont pas le potentiel nécessaire pour aller jusqu'au BAC, ils sont orientés dans une école spécifique qui va les familiariser en 4 années au monde de l'entreprise. À partir de 12 ans, ils cherchent dans quel métier inscrire leur avenir. À partir de ce moment-là tout est mis en place pour ne plus avoir ces décrocheurs qui déshonorent l'image d'un pays (vous voyez de quoi je parle…) et pour cela, ils y mettent des moyens. Des coachs sont mis à leur disposition, avec aide à la rédaction d'un C.V., entretiens organisés avec des employeurs éventuels, et stages en entreprises pour se faire la main au travail. Les grandes entreprises vont jusqu'à créer des écoles au sein même de leurs établissements pour former ces nouvelles recrues à leurs besoins, et ces études-là sont souvent rémunérées 1000 € par mois.

 

202

Malgré tous ces efforts, mis en œuvre par ce pays de rêve, lorsque les jeunes ne trouvent pas de solutions, l'état autrichien vient alors comme Zorro les sauver en leur payant des apprentissages dans des métiers dont le marché est en manque de main-d'œuvre : maçons, dessinateur industriel… Une réussite absolue. Une fois ce message adressé radicalement aux Français par M6 et surtout à François Hollande, le présentateur ne demande pas l'avis de son invité sur ce reportage ; par contre nous avons droit au ronron habituel, rabattu depuis plus d'un an, sur les mesurettes prises ou à prendre dans un avenir proche. Depuis toujours on nous montre ce qui se fait de mieux ailleurs qu'en notre beau royaume, histoire de nous mettre face à notre réalité : nous sommes des nuls. Ceci étant dits pour libérer le fiel qui m'anime, nous pourrions demander aux

650 000 postulants au BAC, ce qu'ils pensent de l'apprentissage à partir de 12 ans. Voilà des copies que nous pourrions lire attentivement, et non les jeter à la poubelle, afin d’entrevoir les voies à suivre pour les années à venir. Ainsi, nous aurons la chance de remplacer la voix des députés/sénateurs par celle des principaux intéressés.

 

203

La notion d'égalité promue à l'école est de donner à chacun les bases pour réussir ses études. Cette opportunité démocratique (programmes de mathématique, d'orthographe, d'instruction civique, etc.) est certes le même pour tous au départ, mais quant à l'arrivée, c'est une autre affaire. "Un authentique système éducatif permettrait à chacun de choisir l'activité…" qui lui convient. Illich reconnaît toutefois ce bon côté des écoles : "Elles permettent à de nombreux enfants de se libérer du cadre trop étroit de leur famille, de nouer de nouvelles amitiés." Ce qui est un peu fou et formidable à la fois chez cet homme, c'est sa potentialité à mettre sur la table des idées complètement loufoques dont celle-ci : "Comme les écoles seraient difficiles à vendre, nous pourrions confier les salles de classe à des clubs, des associations qui fonctionneraient en permanence et seraient ouvertes à tous. Il pourrait y avoir des profs payés pour des cours qu'ils donneraient à des gens intéressés par le sujet et libres de leurs choix." Vous vous souvenez peut-être… Je me suis posé la question de savoir ce qui motivait cet homme d'église à vouloir remettre l'école en question.

 

204

On trouve à la page 325 de mon livre, ces mots troublants : "Les grandes religions n'ont jamais négligé l'intérêt de rencontres en terres lointaines, et, grâce à elles, les croyants ont su trouver le choix de la liberté. Cet esprit se retrouve dans les pèlerinages, la vie monastique, l'aide mutuelle entre les sanctuaires et les temples. Dans cette perspective, pourraient surgir des communautés qui existent dans la ville à l'état latent, mais sont, pour l'heure, étouffées." Étrangement, plus les possibilités sont grandes pour les hommes de se rencontrer, et internet ne manque pas de ressources, plus on vit seul dans sa tour d'ivoire, la souris collée à la main comme celle d'un curé sur son missel. "Dans une société déscolarisée, les gens de métier ne seraient plus dissimulés derrière leurs diplômes… Nous leur faisons confiance, nous allons voir le médecin, l'avocat, le psychologue, certains qu'ils méritent que nous croyions en eux parce qu'ils ont reçu une éducation spécialisée." D'après lui, dans une société sans école et idéale, nous n'irions voir ces gens-là que par la publicité qu'en ferait notre environnement immédiat. Cela mérite réflexion, pour l'heure je ne veux prendre aucune disposition allant dans ce sens. À vous de voir !

 

205

Pour varier notre discours, voyons un peu dans quel monde nous vivons, et comment le "changer", mot magique plaçant au sommet de l'État ceux qui le profèrent en toute quiétude. Et tout d'abord : LA DETTE. Que faire de ce boulet nous menant directement au fond de la mer ? Nous devons annuler les intérêts de cette folie commise par tous, et depuis longtemps, garantir le remboursement intégral de cette ardoise. Ces intérêts économisés permettront d'entrer enfin dans un processus responsable du remboursement de ces 2 000 milliards d'euros, et ce en 20 à 25 années. Cette proposition n'est pas à classer avec ces "rapports" mis au placard à peine pondus, elle doit être exécutée manu militari sans plus attendre. En parallèle, les dépenses de l'état doivent être égales aux recettes, nous allons voir, ici et maintenant, comment faire. Ces mesures prises, des répercutions sur l'économie se feront probablement sentir, nonobstant, nous devons accepter l'idée de récession puisque de toute façon le système sur lequel se reposait notre économie arrive à sa fin. Nous n'avons pas d'autres choix, c'est une évidence…

 

206

… Tout le monde tire la sonnette d'alarme, sans se faire d'illusion, sans apporter de remèdes sérieux. C'est là qu'Art-psy intervient en personne, tel Zizi Jeanmaire avec son truc en plume, pour apporter enfin un regard neuf d'artiste-philosophe, mais pas que cela… Il n'est pas certain que nous ayons pris conscience de la situation où nous sommes englués. Des mesures draconiennes sont à prendre, pas des mesurettes ne satisfaisants que des politiques soucieux de leurs privilèges et avenirs, de leur pouvoir, plutôt que de l'intérêt réel de tous les Français, car la France doit être sauvée, ça urge ! Je vous invite à une minute de silence, pas la Marseillaise, trop violent pour moi, je suis un calme en général ! Notre pays est dans une situation de guerre économique, la formule n'est pas de moi, nous la connaissons tous par cœur. Il nous faut donc de bons pédagogues nous préparant à prendre conscience qu'il faudra fonctionner autrement. En premier lieu, instituer un salaire maximum pour les fonctionnaires, et le privé pourquoi pas, de 4 à 5 000 € par mois par exemple. Au-delà tu payes plein pot mon gars … Grrr, j'entends déjà la foudre me tomber sur la tête, mais tenons bien la barre matelot, l'enjeu est de taille. 

 

207

Partout la devise sera de faire plus et mieux avec moins de moyens. Oui, moins de moyens, car maintenant nous ne sommes plus riches comme avant. Dans une famille endettée si des mesures ne sont pas prises rapidement la cellule éclate et les dégâts sont souvent irréversibles. Il est donc question ici de faire accepter de changer nos mauvaises habitudes d'enfants gâtés. Bien entendu, les pauvres, les miséreux, et il y en a dans notre beau pays, seront les premiers à profiter de ces changements, de ces économies aussi. Nous devons assurer à tous la dignité humaine, et surtout ne laisser personne sans ressources ni logement. Ceci est fondamental, c'est la base du changement. Comment récupérer de l'argent pour payer tout ça ? D'abord, en "ponctionnant", n'ayons pas peur des mots, les hauts revenus dépassant le plafond défini plus haut. On me dira que les  riches, dans ces conditions, vont partir. OK ! qu'ils partent, mais attention, à la frontière, quelle qu'elle soit, on leur fera payer 50 % des sommes transférées dans un autre pays, même s'il est européen. - Ouille, ouille, mais monsieur, cela est interdit, la circulation des hommes et des biens est libre, rien n'est possible dans cette direction.  

 

208

Que Nenni, vous répondrai-je la tête haute, rien n'est interdit pour venir en aide à un malade, à un mourant, rien, absolument rien. Nous risquons de nous mettre à dos nos partenaires commerciaux au niveau européen et mondial, soucieux chacun de leurs affaires, et c'est bien normal, mais ils doivent comprendre notre objectif. Avec eux, nous improviserons au fur et à mesure des problèmes, mais ce qui prime, c'est de reprendre les commandes du bateau. Nous devons offrir à tous chômeurs la possibilité de se rendre utile dans les activités offrant du travail et cela bénévolement, puisqu'ils sont indemnisés par la collectivité.  On parle beaucoup de stages venant au secours des rejetés. Seulement, ces stages, s'ils apportent parfois une solution à certains, il n'en reste pas moins que c'est de la poudre aux yeux coutant des milliards sans pour cela influer sur la courbe du chômage qui ne cesse d'augmenter. C'est qu'à la vérité le travail se fait ailleurs et il est temps de voir cette question d'une façon sérieuse. Posons-nous la question de comment payer les sans-emplois, sans que cela ne coute un centime à l'État et donc à l'ensemble des travailleurs, des contribuables que nous sommes tous ?

 

209

Nous devons oublier , c'est une révolution je vous l'accorde, ces histoires à dormir debout que sont les règles économiques dispensées dans nos "écoles spécialisées" et je pense à la balance des paiements, à l'égalité des échanges commerciaux entres pays jamais respectée… Si nous sommes dans la mouise, c'est à cause de ces lois imposées comme implacables, nous empêchant de réfléchir aux choses, nous rendant plus bêtes que nous sommes. Ces règles n'ont pour but que leurs transgressions sur lesquelles nous avons bâti nos châteaux de cartes, qui au premier coup de vent se trouvent à terre. Le coût du chômage doit être calculé tous les mois, tous les trimestres, et se financer par une taxe sur les produits provenant d'ailleurs. Des  variations de cette taxe pourront survenir selon les pays, mais l'essentiel est d'obtenir cette équation : coût du chômage = montant de cette nouvelle taxe sur les provenant d'ailleurs...

LA SÉCURITÉ SOCIALE. Nous savons tous que la sécu est en déficit, alors tristement nous culpabilisons de manger trop de médicaments, nous tremblons dans nos culottes de voir cette institution ne plus pouvoir nous soigner…

 

210

La première mesure à prendre serait de créer des usines d'état, en France, pour la fabrication des génériques, tous les génériques sans exception. Ces médicaments auront l'avantage d'être la copie conforme de la marque d'origine sans aucune variation comme c'est le cas actuellement avec certains génériques dont l'enrobage ou autres composants peuvent être différent de l'original, et peuvent avoir une efficacité moindre, ou pas d'efficacité du tout. Seuls ces génériques nationalisés seront remboursés par la sécu. Bien sûr, vous entendrez les laboratoires crier à gorges déployées la mort de leurs entreprises. Chers amis, nous ferons comme Tapie, nous les achèterons une bouchée de pain pour y installer nos machines, et les employés mis à la porte nous les reprendrons, car il nous faudra du bon personnel pour nos belles usines. - Ton histoire est utopique, cela ne verra jamais le jour ! me dira-t-on. Je sais, je sais, je sais cela est difficile à réaliser, mais une fois cette idée lancée, il ne lui reste plus qu'à suivre son bonhomme de chemin, séduire quelques hommes dont la réalité affole. La réalité des chiffres, l'absurdité du système actuel en la matière.  

 

211

Une autre mesure concernant les médecins. Tout le monde s'accorde à dire que nous n'avons plus les moyens de notre médecine. Pouvons-nous continuer la médecine libérale telle qu'elle se pratique aujourd'hui ? De mon point de vue, nous devons réformer le système des médecins : les fonctionnariser. Au premier abord, l'image du médecin de famille, consultant à son cabinet ou venant chez vous pour vous soigner est sécurisante, séduisante même, mais ne devient-il pas sans le vouloir un commerçant ? Ne doit-il pas faire un grand nombre de visites pour atteindre son chiffre d'affaires, "atteindre son objectif", comme diraient les cadres des entreprises dynamiques ? Prend-il toujours le temps nécessaire pour vous soigner sérieusement ? Si nous n'avions pas les problèmes financiers que nous connaissons nous pourrions garder ce système, mais ce n'est pas le cas. Les urgences des hôpitaux doivent être restructurées pour ne plus connaître l'horreur de leur quotidien. Une fois cela remis en état, nous devons doubler le nombre de médecins mis sur le marché (sic) chaque année, les fonctionnariser donc à 3000€ par mois pour 40 h de travail par semaine.

 

212

Nous, les malades, nous pourrions soit les consulter rapidement en passant par l'hôpital, soit en les faisant venir chez nous, comme SOS médecins ou le SAMU actuellement, avec un maximum d'efficacité. Cette médecine-là aura l'avantage d'être gratuite, sans aucun mouvement de fond entre le médecin et son malade. Les consultations privées ne seront plus prises en compte par la sécurité sociale, mais par les mutuelles éventuellement. Les sacs plastiques. Si nous cherchons sur la toile de quoi préparer un article sur les sacs plastiques, nous aurons de quoi passer un mois entier à étudier cette noble littérature pour nous dire qu'il faudrait que cela change, que cela cesse. Pourquoi ne sommes-nous pas arrivés à imposer le retrait pur et simple de ce mode d'emballage utilisé par tout le monde ? Chacun dans son coin doit essayer de faire autrement, limiter les casses en prenant son sac perso, son carton en carton… Grand merci à ceux qui procèdent ainsi, mais est-ce bien aux individus de faire ce travail pour une efficacité maximum, n'est-ce pas plutôt à l'état de mettre fin à cette liberté nous menant par le bout du nez par des fabricants sans scrupules, puisqu'on les laisse faire impunément. 

 

213

Nul n'est sensé ignorer la loi. Une fois la chose dite, on se lave les mains pour les avoir propres et passer à autre chose. Qui est capable d'une telle prouesse ? Personne, la raison est simple à comprendre : la loi n'est pas faite pour être comprise par tous, il faut pour cela un homme ou une femme, estampillé par les instances supérieures, habiles à vous représenter en cas de besoin contre quelques billets de banques, de préférence de 500 €. Depuis des années je préconise à qui veut m'entendre qu'il faudrait dissoudre l'Assemblée Nationale et le Sénat, pour le motif qu'ils ne servent à rien ni à personne sinon à eux-mêmes et aux sponsors lobbyistes de tous poils qui les téléguide. Et bien sûr pour la façade, la galerie, la télé, les médiats : l'intérêt général et l'utilité publique. D'ailleurs ce sont souvent les mêmes (avocats) qui vous conseillent et sont à la barre de ces hémicycles à vous représenter… Mon œil ! Tous les jours, ces hommes rondement payés justifient leurs positions de dominants à coups de bruit, beaucoup de bruit, qu'ils croient convaincant, imitant les acteurs au théâtre et tirant les ficelles mille fois rabattues depuis des siècles. Et tout ça pour rien, rien de rien.

 

214

Faut que cela cesse, faisons l'économie de tout ce cinéma et ouvrons les portes de ces belles demeures à ceux qui aujourd'hui veulent réellement débattre des questions de société particulièrement difficiles, et bénévolement, merci ! D'autre part, il est urgent de nommer des juristes pour éliminer toutes ces lois inutiles, et il y en a beaucoup, trop.

Les voitures neuves. Comme le sang circulant dans notre corps, nous croyons à tort ou à raison qu'il en va de même pour les déplacements des humains. Alors, en plus de nos deux jambes, nous inventâmes des substituts, à commencer par ces animaux : l'âne, le chameau, le cheval, la tortue, seulement cela ne suffit pas aux hommes avides de toujours plus de rapidité, leurs génies consubstantiels à leurs raisons d'être, inventèrent tout et n'importe quoi, à commencer par la roue, la brouette, la charrette, le vélo, la 2 CV et la BMW, et bien sûr les Citroën, Peugeot et Renault. N'oublions pas dans cet inventaire obligatoirement restrictif les gros avions nous transportant en vacances toute l'année, très très loin de chez nous pour nous faire oublier notre pauvre et  triste condition humaine, ses limites désolantes insupportables. 

 

215

Depuis sa création, le succès des voitures est incontestable, les usines en fabriquèrent toujours plus et toujours renouvelées, afin d'appâter le chaland à vite remplacer l'ancienne par la nouvelle beaucoup plus mieux… Certains d'entre nous ont même pris l'habitude à ce changement, c'est comme une drogue, et puis ça fait marcher le commerce des marchands de voitures. Malgré l'évolution de la technique, pour construire ces véhicules, il faut de la main-d'œuvre, des travailleurs, des ouvriers. Alors, s'est installé dans nos esprits de consommateurs heureux cette équation déculpabilisante : si nous achetons des voitures neuves nous contribuons à la pérennité de l'emploi en général, car comme pour le bâtiment, lorsque la voiture va, tout va. Seulement on oublie de nous préciser où tout cela va, où tout cela mène. Les constructeurs ont les rênes du pouvoir à cause de cet argument béton, ce sont eux qui dirigent les grandes lignes de nos politiques économiques, ils nous tiennent par le bout du nez, par ce chantage habile et sournois : si l'état ne nous aide pas (financement des reprises de voitures anciennes) nous mettrons des milliers d'ouvriers au chômage…

 

216

… Nous fermerons ces usines au coût trop élevé, puisqu'elles payent (ces usines) non seulement des travailleurs dix fois plus chers qu'ailleurs mais aussi des charges sociales les ruinant purement et simplement. Depuis dix ans, combien de véhicules encore en bon état de marche, ou à remettre en état à moindres frais, ont été mis à la casse parce qu'il fallait acheter neuf et faire fonctionner ces usines d'honorables travailleurs. Qui dira le gâchis que cela représente cette façon d'agir pour l'ensemble de la collectivité, au prétexte de sauvegarder encore ce qui marche en France. Nous avons émis ici même qu'une de nos priorités est de faire mieux avec moins d'argent. Pour ce coup, nous aurions pu prendre une option différente : restaurer sérieusement les voitures anciennes et consacrer quelques usines (et donc des ouvriers) à cette tache énorme puisqu’aujourd'hui nous sommes des millions à posséder ce moyen de transport. Ainsi, nous n'aurions pas consommé tant de matières premières et dépensés des milliards à dédommager ces reprises à mettre à la casse. C'est kafkaïen ! Conclusion : pour les autos comme pour d'autres industries, l'état doit décider les grandes lignes de sa politique.

 

217

Un article dans "Marianne" signale la proposition de Pierre Gattaz (Medef) au Président de la République pour ramener le taux du chômage de 10,4 % à 7 %, soit résorber 1 million de sans emploi. Par quel coup de baguette magique ce monsieur nouvellement élu à la tête des patrons, va-t-il arriver à résoudre cette équation impossible pour le commun des mortels ? "Moyennant un choc de simplification administrative et 100 milliards d'euros de baisses de charges et d'impôts patronaux étalées sur cinq ans", dit l'article. Je signale à tous les nuls en calcul ce que représente exactement 1 milliard d'euros : c'est 1 000 fois 1 millions, qui lui représente à sont tours 1 000 fois 1 000 euros en billets de banque ou en petite monnaie. Penons un chômeur, indemnisons-le sans se soucier s'il travaille ou non, il coutera environ 20 000 euros par an. Penons maintenant ces 20 milliards demandés par an et divisons ça par le cout d'un individu en difficulté, et nous aurons une idée plus exacte de la demande de ce monsieur Gattaz Pierre. Le résultat est stupéfiant : nous pouvons résorber 1 million de chômeurs, soit le même nombre que la proposition faite à François Hollande. De la tête de qui se fiche-t-on ?

 

218

"Comment va le monde, Môssieu ? Il tourne, Môssieu !" Ceci est le titre d'une pièce de François Billetdoux que j'ai vu à quatorze/quinze ans, dans un théâtre situé boulevard Saint-Martin, remplacé aujourd'hui par un immeuble de bureaux. Pourquoi ce souvenir me revient-il maintenant ? La raison m'apparaît, je la vois,  et comme je vous la dois, la voilà donc. Je ne veux nullement vous donner l'impression d'avoir en face de vous un bonhomme toujours à critiquer tout, à râler pour râler à la moindre occasion, même avec des arguments costauds. Tous les matins, je me lève et suis émerveillé d'ouvrir encore les yeux dans ce monde où je peux boire et manger à ma faim, sortir de chez moi sans me faire agresser, avec ou sans argent, je suis heureux de pouvoir aller où bon me semble, selon l'endroit où je vais poser mes pas, de profiter du ciel bleu et de la verdure gratuite des parcs et jardins de Paris et ses environs, des bistrots comme celui où je suis assis présentement et où je grignote quelques bonnes petites choses, bois un jus de fruits, un thé en sachet, grrr, et surtout écris une heure avec toujours autant de bonheur. Je suis émerveillé de respirer tout simplement…

 

219

… Émerveillé d'avaler encore la nourriture et les boissons (sans alcool) que je savoure en bénissant Dieu auquel je ne crois pas depuis belle lurette. Je suis heureux de voir des couples s'embrasser en toute liberté devant moi. Alors pourquoi toutes ces critiques à l'égard d'une vie que j'aime par-dessus tout ? C'est qu'en fait, je ne veux pas voir certains d'entre nous manquer de ces "choses basiques" dont je viens de parler, à savoir, manger, boire, dormir à l'abri et connaître la paix. Ceci est l'un des principaux objectifs à atteindre pour notre pays, d'abord, ensuite pour l'ensemble de l'Europe, et pour finir pour le monde tout entier. Et la morale ? Boire de l'alcool est mauvais pour la santé, même un verre de vin pris pendant les repas n'est pas aussi bénéfique qu'on nous l'a assuré pendant des années. Ajouté à cela les dégâts causés par le tabac : nos hôpitaux et nos cimetières sont pleins de cadavres ambulants, crevants secrètement pour ne pas affoler le consommateur. Si malgré ces drogues vous êtes encore en vie, il vous reste la possibilité de vous acoquiner à la Française des jeux pour dépenser le solde de votre salaire de misère et laisser votre famille crever de faim dans votre HLM pourri.

 

220

D'autres iront cet été par avion-bateaux-voiture, assurer le cérémonial des vacances afin d'oublier les embouteillages du reste de l'année. Tous ces passages obligés ont un point commun connu de tous : la bénédiction de nos gouvernants successifs à ponctionner ces drogues dures de bonnes taxes en monnaies sonnantes et trébuchantes, alimentant les caisses d'un état en ruine, je vous le rappelle. À y regarder de près, cette situation est indigne de nos civilisations dites éduquées, qu'un état se paye généreusement sur ce qui tue son propre peuple relève de la complaisance d'abord, de la compromission ensuite et pour finir, de la complicité avec ces pourvoyeurs de nos habitudes malsaines. Comment serait-il possible de changer quoi que ce soit si le donneur d'ordre n'a aucun intérêt à voir ses gus boire du jus de carottes, respirer le bon air plutôt que de fumer, rouler en bicyclette, marcher à pied… lorsque les ventes de voitures ont la courbe descendante et fait mal aux usines dont nous avons déjà parlé ici, aux ouvriers et au travail en général. Si je vous donne ces exemples de l'organisation des hommes à vivre en commun, c'est qu'ils représentent ce qu'on appelle "LA PERVERSION".

 

221

D'un côté on vous dira qu'il n'est pas bien de faire ceci ou cela, mais si vous suivez ces bons conseils pour votre santé ou votre environnement, on vous fera comprendre que vous participez sans vous en rendre compte à la grave dégradation de l'économie. Est perversion ce qui vous met dans une situation ambivalente où vous finissez par ne plus savoir ce qui relève de votre choix réel. Nonobstant ces bonnes paroles, dénoncer ces situations n'est pas satisfaisant du tout. Ce qu’il faudrait serait d'y apporter une réponse. Certains diront : c'est individuellement que les choses doivent se faire, seulement lorsqu'on pense "politique", c'est aux gens de pouvoir que revient d'apporter une réponse digne à ce qui nous mène dans le trou. L'austérité. Pour ne pas aggraver les déficits, il est question de savoir s'il faut ou non de l'austérité. Je ne sais pourquoi j'associe cette question à celle de croissance ou de décroissance. Je ne crois pas ces questions bonnes, ce qui est urgent est de répondre aux vrais besoins des hommes, à leur aspiration à vivre plus heureux et moins souffrir d'injustices inacceptables. Nous reviendrons inlassablement sur cette question tout au long de notre travail… 

 

222

Les contractuels/elles. Nous ne garons pas toujours nos voitures comme il faudrait, c'est pourquoi les "gendarmes" nous le rappellent par une amende aux tarifs variables. Curieusement, notre première réaction est de maudire ces "connards" au service d'un état pourri. Une fois calmé, on se ressaisit et mettons de l'eau dans notre vin, apaisons notre colère et passons à autre chose. Comme ici il nous est permis de voir de plus près comment et pourquoi nous acceptons ce qui pourrait ne pas l'être, allons-y franchement. Sommes-nous à ce point conditionnés que nous ne puissions remettre en question quoi que ce soit ? Nous avons évoqué plus haut, quatre taxes ponctionnées sur nos travers de comportements et nous nous sommes posés la question de savoir si cela était moral. Reprenons dès le départ notre analyse sans nous positionner en râleur acariâtre pédalant dans le yaourt. Entrons dans le cœur de l'organisation des humains à vivre ensemble en temps de paix. Cet argent provenant de vos consommations d'alcool, de tabac, d'essence, de jeux et de votre sale façon de vous garer, va servir à la bonne marche de l'école, des hôpitaux, des routes, de nos politiques et leurs caprices.

 

223

Cet argent proviendrait donc "du mal" pour faire "le bien". L'état se comporterait-il en dealer ? N'allons pas trop vite en besogne et voyons si tous les impôts relèvent de la même gymnastique. Impôts sur les revenus, consacrés au remboursement des intérêts de la dette,  représente la situation suivante : tu travailles et payes ta dime en plus des charges sociales sécu, retraite, allocs, chômage. Après ces ponctions sur tes revenus, tu paieras ton loyer ou le remboursement de tes crédits appartement, taxé d'impôts fonciers et locaux, ta nourriture et tout ce que tu vas consommer est aussi taxé d'une TVA, et tout cela s'ajoutant aux cinq premières taxes si tu es un être totalement immoral. Ce raisonnement est-il recevable pour quelqu'un de raisonnable ? On s'en fout, motivés que nous sommes devant la situation : nous allons crever, tous les systèmes économico/politiques sont pervertis, au bord de la faillite, il nous revient à nous de tout remettre en question même à prendre le risque de nous perdre en chemin. La notion de moralité a-t-elle sa place dès qu'il s'agit de parler d'économie, de politique ? La réponse est simple, demandez à Bernard Tapie.

 

224

Bernard nous dirait : en affaire, il n'y a pas de sentiments, seuls comptent les chiffres ! Mais de ça, nous, on s'en fout. On se doute bien que c'est ainsi que le monde  tourne et qu'il n'y a rien de nouveau sous le soleil, mais quand même, on veut explorer la grosse machine qui broie impitoyablement les hommes, presque tous les hommes. Pouvons-nous formuler cette équation : l'argent entrant dans la caisse de l'état n'est pas un argent propre puisqu'il est issu d'alcool, de tabac, d'essence, de jeux, de contraventions... Imaginons maintenant que vous soyez enfin raisonnable et consommiez moins ces choses taxées, que se passerait-il ? Bercy aurait moins d'entrées et donc moins de moyens pour payer juteusement ses fonctionnaires faisant bien comme il faut ce qu'on leur demande d'exécuter sans broncher… Moins de moyens pour nous guérir ou nous empoisonner, nous mal éduquer si je me réfère aux travaux de notre Ivan Illich. Reprenons les  choses autrement. En consommant moins de ces "drogues", nous risquons d'être moins malades, moins assistés, plus indépendants, plus responsables de notre vie, et couterions beaucoup moins à la collectivité.

 

225

Un dealer, c'est quoi ? Tout d'abord un métier permettant de se nourrir à sa faim et de boire autre chose que de l'eau plate, mais il implique d'accepter de jouer un rôle rejeté par la société. Pour son activité, l'homme doit se trouver un territoire où il règnera en maître et des partenaires, en amont comme en aval. Un patron pour obtenir les produits à vendre et quelques gosses faisant le gué pour être tranquille. Ce qu'il vend est interdit de circulation. S'il ne l'était pas, le dealer ne pourrait pas participer à ces transactions où il est dénommé le vendeur, car il lui faudrait dans ce cas montrer patte blanche et avoir l'autorisation administrative qu'il serait incapable d'obtenir du fait de ses difficultés à entrer dans le système "normal" de la société, celle-ci l'ayant mis à la porte de l'école, physiquement et mentalement, dès la première année scolaire, avec mauvaises notes à répétition menant plus facilement aux portes des prisons qu'à celles du fonctionnariat. Pourquoi je vous parle de ça, moi qui ne connais rien à ces choses-là, n'ayant jamais, je le jure, ni vendu ni acheté une quelconque drogue pouvant arranger ou détériorer ma pauvre vie, si précaire pourtant.

 

226

Je veux avant tout mettre le doigt sur une ambiguïté : ces produits, venus de pays lointains, sont arrivés à infiltrer nos familles, toutes nos familles, à commencer par nos établissements scolaires, où nos gendarmes furent et sont toujours défaillants, car pour une efficacité maximale il faudrait prendre des mesures que nous ne voulons pas prendre. – Pouvez-vous nous dire de quelles mesures faites-vous allusion ? Permettez-moi de ne pas aller plus loin sur ce point, éteignez vos caméras, merci ! Une fois ces gosses imbibés, le reste suit, la population en redemande et pour cause : ces produits vous envois au septième ciel, vous font connaître le nirvana, à vous qui avez besoin d'entrer dans votre imaginaire en mal d'activité, dans ce monde imparfait. Le dealer a donc ses clients et ils lui sont fidèles, car tout cela se fait sous un porche, dans le plus grand anonymat. Comme pour l'alcool, le tabac, les jeux, le pétrole et les contractuelles, la drogue est néfaste à votre santé et votre portefeuille. Si nous étions "raisonnables", usant de la bonne raison, comme dirait Michel Onfray, nous ferions le tri et ne toucherions jamais à ces saloperies.

 

227

Seulement, il y a l'accoutumance, ce poison terrifiant qui est la cause de tous nos malheurs. Conclusion : nous devons nous battre tous les jours de nos sales habitudes, demain, je lâche Germaine ! Et si l'on se posait maintenant d'autres questions ? Par exemple, que peut la plume ? Elle sublimise, idéalise le réel, le transforme en possible, toujours inatteignable, inaccessible, plus proche du rêve, du phantasme, construit des châteaux en Espagne, des tours de Babel chancelantes, assis sur une chaise de bistrot à siroter une menthe à l'eau sous la chaleur de l'été chaud. Bien ! Reprenons notre lecture d'Illich, mise en souffrance depuis quelques semaines. Comment se passerait, selon lui, l'éducation après la fin de l'école ? Il y aurait plus d'éducateurs qu'aujourd'hui, mais des éducateurs ayant une longue expérience du sujet dont il auraient la charge, ajoutez-y une once de sagesse et vous aurez le profil type du futur avenir d'une vie proche de la perfection. C'est cela l'idéal, et donc la fonction de la plume, Ivan n'y échappe pas, ni personne s'engageant dans l'écriture, moi inclus. L'expérience serait prédominante, la connaissance rangée au fin fond de nos bibliothèques…

 

228

… Bibliothèque où je suis présentement installé à vous écrire ma pensée chaotique. Il y a deux semaines encore, cette salle de lecture, de travail, regorgeait d'étudiants préparant le plus sérieusement du monde ce Bac dont vous avez lu précédemment ma littérature de révolutionnaire exalté. Elle compte plusieurs tables et 34 sièges, tous vides sauf le mien. Aucun bruit, pour la concentration c'est plutôt bien, mais une question sournoise me hante depuis la fin de cet examen porteur de tant de succès, preuve à l'appui du sérieux des jeunes à déployer de l'effort lorsqu'il le faut. Seulement, pourquoi ne reviennent-ils pas travailler, étudier ici après leurs Bacs, après ce fameux effort ? C'est là l'effet pervers de l'éducation marathon, bourrage de crâne : n'arriver point à donner du plaisir à ces choses de la culture, le livre pour ce qui nous concerne ici. L'effort fatigue à la longue, pas le plaisir. "Il n'y aurait plus de problèmes de discipline, de rapports avec les familles, de recrutement et d'inspection des maîtres, de respect des programmes, achat de manuels obligatoires, d'entretenir des terrains et des équipements… " Voilà la chanson de Sheila : l'école est finie, prémonitoire, tous les jours seraient des dimanches de liberté.

 

229

Il y aurait des gestionnaires de réseaux éducatifs, plus d'enseignants, plus de maîtres, plus d'autorité et donc plus de jugement sur le travail d'autrui, plus de jugements négatifs du moins. Terrible accusation proférée par Illich : "actuellement ceux qui sont attirés par l'enseignement sont trop souvent profondément autoritaires, ils ne seraient pas capables d'assurer les tâches qu'on leur demanderait." Chaque étudiant ferait ses choix pour son avenir et demandera l'aide de personnes compétentes pour avancer dans son projet. Ses nouvelles façons d'arriver à l'enseignement parfait, serait, dans notre monde à l'esprit mal tourné, interprété comme une invite à un formidable bordel où les uns et les autres voudraient apprendre quelque chose pour en fait approcher l'autre, faire connaissance… Pour ma part, je n'y vois aucun inconvénient, ma devise n'est-elle pas : seul l'amour compte ! Il parle beaucoup de réseaux, que dirait-il aujourd'hui avec cette toile aux millions de possibilités, probablement nous sommes très proches de ce dont il a rêvé dans ses papiers. Par contre, je n'aime pas, je n'ai jamais aimé, le concept de "maître", encore moins de "maître à penser", je ne veux ni dieu ni maître, merci !

 

230

Et voilà qu'il nous sort cette carte, le modèle à suivre, comme s'il y avait dans ce monde de chiens un seul individu digne de confiance pleine et entière. Plus grave, il lui affecte "une sorte de vision prophétique de valeurs nouvelles…" Diantre ! Ses origines catholiques feraient-elles des siennes dans ses idées bienveillantes ? "Et d'estimes mutuelles entre le maître et l'élève…"Alors, pas bête, il nous avertit : "L'histoire ne manque pas de charlatans de tout poil, de démagogues, de tyrans, de prêtres simoniaques et de faiseurs de miracles …" C'est amusant ce gars, franchement je le trouve sympa ! Mais que fait-il d'un paramètre crucial pour la compréhension de ce qui ne va pas dans l'école et pour les gosses en particulier. Que fait-il de la famille, de là où vivent ces enfants à peine nés sans avoir rien demandé à personne. Si vous saviez ce qu'ils vivent dans l'ensemble, vous baisseriez les bras et ne croiriez plus à rien, vous iriez planter vos choux au centre de la France, celle qui va une fois l'an regarder comme des cons le Tour passer à vélo, avec ou sans maillot jaune. C'est pourtant là le réel problème : les enfants ne devraient plus avoir à supporter ces adultes…

 

231

… Immatures et irresponsables que nous sommes tous. Cette remarque peut nous faire rêver aux kibboutz d'Israël, avec ses enfants élevés par la collectivité et non leurs parents. Mais est-ce la solution, vu le peu de succès que ce mode de fonctionnement a eu de par le monde ? Cette question reste toujours fondamentale, aujourd'hui plus que jamais, les enfants portent en eux les stigmates de ce qu'ils vivent au sein de leur no man's land familial, leurs chaos quotidiens avec leurs "maîtres" de papas et mamans fous. Mais lui, parle d'autre chose, d'Aristote, de Thomas d'Aquin, préconisant l'amour entre le maître et l'élève : "Le maître comme le disciple y trouvent plaisir", le mot est lancé enfin, je l'attendais sans grand espoir, il vient, il est là, je vous disais que ça finirait dans un backroom… Seul l'amour compte, seul l'amour compte ! Chantons cela tous en chœur, mes frères ! Nous avons tous en tête cette image d'Épinal d'une jeune et jolie étudiante aux bras d'un prof d'Université, aux cheveux gris, gris comme les miens. Seulement n'allez pas perdre votre temps à chercher dans ses écrits la moindre frivolité, la moindre légèreté d'ordre sexuelle, y a rien, rien à se mettre sous la dent !

 

232

"Nous devons bâtir une société ou l'acte personnel retrouve une valeur plus grande… que la manipulation des êtres ?" L'enseignement serait d'abord et avant tout un loisir, c'est à dire quelque chose d'agréable, de jouissif, car que cherche l'homme sinon la jouissance pure et simple ? À supposer l'école non obligatoire, combien d'élèves fréquenteraient encore ces établissements ? La déscolarisation de notre société impliquerait les parents, de l'éducation qu'ils envisagent pour leurs progénitures. Seulement, rien n'étant parfait, les plus démunis seraient moins à même d'apporter une réponse relevant du libre choix, les injustices sociales seraient lors plus criantes encore qu'aujourd'hui. "Aucune découverte scientifique ou technique ne pourrait fournir à tous les habitants du monde les biens et les services dont disposent les pauvres des pays riches."… Et plus cette évidence est rabattue, plus les hommes agissent contre elle, à commencer par la divulgation de *la voiture du peuple* partout sur terre, alors que les ressources se tarissent et les gens crèvent par millions chaque année. Pourquoi donc est-ce ainsi me demandez-vous ?

 

233

Je vais vous le dire afin de voir dorénavant l'humanité avec plus de recul… attention en reculant de ne pas vous casser la figure ! Voilà donc la vérité toute crue, du moins pour cette question : les hommes ne travaillent pas pour avoir une meilleure vie, ils s'en foutent, toutes leurs activités mêmes les plus effrayantes telles les guerres, la haine de l'autre, etc. ont cette fonction précise : fuir l'ennui, repousser aux calendes grecques d'avoir à se regarder devant une glace tel qu'on est, nu. Enfin, enfin, nous voilà bientôt sauvés de tous les cataclysmes économiques et sociaux : ce mois-ci, les consommateurs ont consommé 0,50 % de plus que l'année dernière à la même époque. Notre président et son ministre jubilent, ne l'avaient-ils pas prévu dans leurs harangues optimistes tout feu tout flamme de chef de scouts arrivés enfin à la maturité sexuelle de quinze ans, âge requis par la loi de la République pour tout écart à la normale saisonnière. Mon psychanalyste en lisant cela se retourne dans sa tombe, pourtant bien confortable puisqu'il l'a payé fort cher du temps de son vivant où ses putains de séances nous a couté à tous la peau des fesses.

 

234

On se demandait un peu partout dans le monde si "l'homo faber" est bien l'homme véritable. Cette question ne se pose pas sous cette forme aujourd'hui, l'homme se sent démuni après avoir consommé plus que de raison, plus il possède, plus est grand son vide intérieur. Mais toutes ces choses-là, messieurs 'dames, ne sont encore que des considérations des privilégiés que nous sommes à nous masturber la tête avec nos bons et généreux sentiments orientés vers le bonheur de l'humanité mon cul, c'est-à-dire de personne. Alors cessons de nous voiler la face, le monde est un désordre infiniment chaotique que rien ne pourra changer, sauf peut-être, ces modestes artistes que nous sommes en agissant chacun à notre façon et dans le domaine qui est le notre. Oui, monsieur Illich, nous sommes bien "pris au piège", vous avez tout compris, fait comme des rats morts au fond d'égouts aux fétides odeurs, quotidien de ceux qui se placent involontairement au plus bas de l'échelle sociale et dont les politiques ne veulent plus regarder, ayant résolu ce problème en postulant ce diagramme fort inquiétant : si l'on aide les pauvres, on fera des fainéants de tous nos ressortissants.  

 

235

Comme j'aimerai  lire de la plume d'un homme d'aujourd'hui ces quelques lignes d'une justesse absolue : "De génération en génération, nous nous sommes efforcés de parvenir à un monde meilleur, et pour ce faire nous avons développé la scolarité. L'entreprise s'est soldée par un échec, nous avons contraint les enfants à gravir l'escalier sans fin de l'éducation qui ne fait que favoriser celui qui part en avance, a une meilleure santé, ou une meilleure préparation par son environnement, sa famille. L'enseignement obligatoire mine la volonté personnelle d'apprendre. Le savoir considéré comme marchandise qu'il faut stocker et distribuer…" Comment répondre à ces évidences sinon par l'intelligence de nos esprits révoltés à tout jamais meurtris par ces injustices infernales parce que jamais résolus, rendant le malheureux plus bas que terre sans que personne ne s'en offusque. Surement avez-vous déjà lu ici ce genre de remarque, de plainte, mais que voulez-vous, tant que le monde ne changera pas, moi je continuerai à gueuler avec mes membres désarticulés à tout jamais. Seulement, comme Ivan, nous sommes convaincus que ce monde éducatif doit et va disparaître, mais…

 

236

… Ce qui viendra après cette révolution n'augure nullement un monde meilleur. Par cette clairvoyance, je constate combien notre bonhomme connaît bien les hommes lorsqu'ils sont regroupés pour former un "pouvoir". Malgré tout, il espère un monde où "la technologie sera mise au service d'une société plus simple, plus transparente, de sorte que tous les hommes puissent façonner leurs propres vies." Seulement la réalité est bien là, prégnante, efficace : "L'éducation est un produit dont la fabrication est assurée par une institution officielle appelée "école"". Comme les grands esprits se croisent et se rencontrent en dehors du temps lorsque les idées sont fondamentales, essentielles. Tout le monde a lu attentivement mes diatribes mille fois rabattues sur internet depuis plus de quinze années : "Pour l'abolition des notes à l'école" et voilà qu'à la page 359 de notre livre d'Illich, je relève ces mots : "Une école libérée idéale fournirait une éducation ne pouvant être utilisée pour établir une structure de classe, ne devienne un même étalon permettant de mesurer l'élève. Elle ne devrait donc pas soumettre ce dernier à la répression ou au contrôle, de tenter de le définir…"

 

237

Puis-je être d'accord avec ce dictat ? : "Éduquer pour une société de consommation revient à former des consommateurs." Tout d'abord, je rappelle ma position sur cette société-là : il est inacceptable que certains manquent de tout. Le reste n'est qu'une question de choix, j'avoue être un grand consommateur et peut-être est-ce une drogue chez moi, du moins une activité occupant mes journées bien heureuses. S'il en est ainsi c'est que je vis dans cette société et m'y adapte selon mes moyens et mes intérêts, rassurez-vous, je ne change pas de voiture tous les deux ans, cela ne m'intéresse pas du tout, ce genre de produit me laisse totalement indifférent. Seulement si nous voulons réellement voir la société évoluer vers plus de justice entre les hommes, il va nous falloir prendre des décisions mettant bon nombre de nos consommations sur le banc des accusés. Mais qui veut ça ? Qui est prêt à mettre ses mains dans le cambouis de cette remise en cause de peur de perdre les pédales et devenir fou. Où mène l'école de notre Éducation Nationale ? Je viens d'apprendre que ma nièce qui veut se consacrer au métier de journaliste, va passer six mois dans une école privée afin de préparer un concours…

 

238

… Concours qu'elle obtiendra ou non à l'issu de cette période. Coût de l'opération : trois mille euros. De surcroit, je soupçonne ces écoles privées de se faire subventionner par l'état pour je ne sais quelle raison hasardeuse. L'école gratuite, permettez-moi de rire, mais de rire jaune, mes poils se hérissent, je tremble de colère pour ceux qui ne peuvent pas se payer ça. Ceux qui en ont les moyens et font ce choix, je dirais que c'est leur affaire, pas la mienne ! "… L'homme doit retrouver le sens de sa responsabilité personnelle lorsqu'il apprend ou enseigne. C'est ainsi que l'on mettra un terme à l'aliénation où vivre et s'instruire ne se rencontrent pas." À priori, je ne peux qu'abonder dans ce sens, mais à y regarder de près, étant athée jusqu'aux dents, je sais que l'idéal chez les humains n'est jamais atteignable, ce qu'il faut, surtout aujourd'hui, c'est éviter les dégâts causés par cette institution en permanence, dégâts irréversibles sur la personnalité profonde des êtres dont elle a la charge dès le plus jeune âge. C'est justement parce qu'ils sont jeunes et malléables que tout peut advenir et marquer à vie, en bien comme en mal, l'aventure humaine de chacun d'entre nous.