SANS DI-ANTALVIC

JE MEURS !

 

 

Si ce titre est quelque peu provocateur

il n'en reste pas moins

que oui, sans cette drogue

j'ai voulu mourir.

 

 

Ce n'est pas dans ma nature de vouloir en finir avec la vie

J'ai déjà écrit quelque part que mourir était idiot

Aujourd'hui je ne sais plus trop bien

Mais je me sens dans l'obligation de témoigner

De dire ce qui m'est arrivé afin que d'autres personnes

Ne se trouvent pas dans la même situation.

 

Aux alentours de mai/juin 2009 une information est tombée :

Le Di antlavic et tous les médicaments contenant

Du Dextropropoxifène seront retirés de la vente,

L'argument étant que les Anglais se suicidaient avec...

Alors que faire, depuis plus de vingt ans je consomme

Trois capsules jours, un le matin, un le midi, un le soir,

Le dosage prescrit par mes médecins était de six capsules/jour.

 Puisque la décision de stopper la vente de ce produit était prise en hauts lieux

Il me fallut décider de m'en défaire petit à petit

Ce que je fis sans trop souffrir physiquement.

Ce produit est un antalgique, c'est à dire

Qu'il est fait pour calmer les souffrances,

Comme je prends également pour mes rhumatismes des anti-inflammatoires,

Je n'ai pas ressenti une grande différence quant à la douleur

D'autant que j'ai mis plus d'un trimestre

Pour mettre un terme à ces prises de Di antalvic

Passant de trois comprimés à deux, puis de deux à un,

Et de un à zéro. Seulement, en parallèle, ma santé s'est dégradée gravement,

Depuis de nombreuses années je souffre de plusieurs pathologies

Allant de la maladie de Crohn à la spondylarthrite rhumatismale

De l'insuffisance surrénalienne à un déficit musculaire des membres inférieurs.

Je prends donc beaucoup de médicaments pour vivre génialement

Alors comment expliquer cette dégradation de mon état général :

Je perdais du poids de jour en jour, passant en quelques mois de 63 kg à 55kg

Et physiquement j'allais de plus en plus mal,

 j'avais de moins en moins de force pour rester debout, marcher,

Et surtout, surtout psychologiquement pour ne pas dire psychiatriquement

L'un de mes plus terribles symptômes était d'avoir des idées involontaires,

Bien sûr des idées qui vous traversent l'esprit chacun de nous connait cela

Il n'y a rien d'anormal là-dedans, mais là,

Une idée, toujours la même, devenait obsessionnelle et ne me quittait plus

Je voulais mettre fin à mes jours car je ne voyais pas comment

J'allais affronter la vie sans ce minimum de force qu'il faut pour être indépendant.

Arrêtons-nous sur ce "minimum de force"... C'était exactement

L'expression employée lors d'une séance chez un psy, Je lui disais

Il faut au moins ça pour vivre, il m'avait répondu positivement, ce qui allait de soi,

Mais moi, je n'avais plus maintenant cette force minimum...

Peut-être à ce moment-là nous aurions pu lever le lièvre,

La petite dose de morphine que contient le Di antalvic m'a-t-elle permis

Pendant des dizaines d'années d'entretenir ce fameux "minimum de force" ?

Il n'y a rien de plus angoissant que de ne plus avoir confiance en soi

Au point de m'écrouler souvent et d'appeler les urgences le jour, la nuit,

J'ai été pris en charge convenablement, mais pour m'entendre dire, après examens,

 Qu'il n'y avait rien de plus que je ne connaissais depuis des années,

Alors bredouille, je retourne à la maison...

 Je devais affronter mon mal tout seul comme un grand.

À l'un de ces passages à l'hôpital où je restais une semaine pour faire le point,

Un médecin fou interdisait à ses infirmières de donner des antalgiques

(Aspirine, Doliprane, Di-antalvic) à ses malades, car ces médicaments cachent,

Ce qui est vrai aussi, des douleurs qu'il est préférable de constater

En cette période d'introspection du corps souffrant.

Les crises d'angoisses s'accentuaient, je fis appel à un psychiatre

Afin de lui faire part de mes idées suicidaires, idées étrangères à ma volonté,

C'était comme si je voyais en la mort la seule porte de sortie à tous mes maux,

Il y avait là une logique implacable, impossible à maîtriser.

Il fallut vivre avec cela, je consultais à son cabinet le psy rencontré à l'hôpital,

Mais combien il m'a déçu, il n'a su que m'écouter, ce n'est pas suffisant

Lorsqu'on est dans cet état-là. Toutefois, malgré tout,

Je m'étais rendu compte que parfois vers 18 heures mon état psychique

Allait un peu mieux. Il m'arrivait l'après-midi de prendre un Di antalvic

Lorsque j'avais mal quelque part, mais malheureusement,

Mais j'ai mis près d'une année à faire cette association

Entre l'abstinence de ce médicament et mes nouveaux malheurs.

Le produit n'étant pas encore retiré de la vente

Je décidais vers le mois de mai 2010 de revenir à mes anciennes amours

D'en reprendre trois gélules comme avant, et là, miracle,

Je retrouvais mon esprit habituel et cette envie de mourir a disparu.

 

Dans l'actualité depuis quelques semaines on parle beaucoup du Médiator.

Ce produit est commercialisé depuis 1976 et entre donc dans le domaine public,

Puisqu'il a plus de dix ans d'existence. Curieusement, ce n'est qu'en octobre 2009

Qu'apparaît son premier générique et, un mois plus tard, comme par hasard,

On le retire de la vente à la suite du scandale que l'on sait.

Le laboratoire Servier a tout intérêt à voir disparaître ces vieilles molécules

Et mettre en circulation un nouveau produit à la place qui lui,

Ne pourra être génériqué que dans dix ans.

Le Médiator n'est pas le seul sur la sellette, on a aussi ce fameux Di antalvic

Qui est de 1964 et donc si le Dextropropoxifène venait à être éliminé des étals

De nos pharmacies (il y a en France 8 millions d'utilisateurs

Pour le seul Di antalvic et ses génériques) d'autres produits tout neufs,

Viendront les remplacer pour le plus grand bien de certains laboratoires

Ayant perdu le marché d'une importance mondiale considérable

À cause de ces génériques faisant tant d'économies à la sécurité sociale.

Par ailleurs voilà quelques autres médicaments faisant l'objet d'un retrait

Lorsqu'ils ne sont pas déjà hors commerce, avec leurs dates de mise sur le marché

Fonzylane (1976) - Buflomédil (1982) - Parfenac (1974)

Silomat (1964) - Thalidominde (1950) et tous ceux-là sont sous génériques

et donc plus rentables pour nos majors des laboratoires.

Cette analyse est une hypothèse sur laquelle des chercheurs, des journalistes

Pourront faire leurs investigations, je laisse à d'autres le soin d'y aller

Fourrer leurs nez pour savoir si ces dires ont de l'intérêt pour les malades

Que nous sommes tous et pour la sécu évidemment aussi...